En 2023, 31 personnes ont trouvé la mort sur les routes du Lot-et-Garonne. Un chiffre en nette augmentation depuis 2019, l'alcool et le téléphone au volant étant souvent mis en cause. Les forces de l'ordre vont renforcer les contrôles et la prévention cette année.
"Cela reste un traumatisme. J'entends les cris des familles dans la nuit, je revois les maires choqués des trois villages concernés". 22 heures, le 7 juillet 2023, le colonel Emmanuel Houzé, commandant des gendarmes du Lot-et-Garonne est appelé. Deux jeunes filles de 16 ans ont perdu la vie dans un accident de la route. Elles circulaient dans un véhicule dont le conducteur, un jeune de 18 ans, a perdu le contrôle. Il a percuté de plein fouet un arbre et a été grièvement blessé. L'enquête est toujours en cours mais une vitesse excessive figurait dans les causes.
"On ne s'habitue pas"
"Quelle horreur pour un parent de perdre son enfant, quelle horreur pour un enfant de perdre un parent. Chaque gendarme a rencontré au moins un drame sur la route dans sa carrière. On ne s'habitue pas et on ne lâchera pas le contrôle de la route", assène le patron des gendarmes.
Les deux adolescentes font partie des 31 victimes de la route en 2023, dans 254 accidents. Un chiffre important, en augmentation par rapport à 2022, avec 28 tués. En 2019, 23 morts ont été comptabilisés. Au-delà des froides statistiques, on retrouve de nombreuses familles brisées et beaucoup de blessés, marqués à vie : 340 sur la seule année 2023 dans le département.
Comportements dangereux
Le 12 février, Daniel Barnier, préfet du Lot-et-Garonne a détaillé, avec inquiétude, ces chiffres lors d'une conférence de presse. Dans les accidents mortels, les plus de 65 ans sont les plus touchés, mais ce ne sont pas forcément les auteurs des accidents. Huit personnes décédées avaient moins de 25 ans.
"Les principales causes des accidents mortels sont dans l'ordre, l’alcool, la vitesse excessive ou inadaptée et l’inattention," a rappelé le préfet.
Les comportements dangereux sur la route sont à l'origine de trop nombreux accidents en Lot-et-Garonne. Chacun d'eux est un drame pour les victimes et leurs familles.
Daniel BarnierPréfet du Lot-et-Garonne
Les accidents mortels ont été enregistrés, essentiellement en zone rurale, où la gendarmerie a relevé 19 000 infractions. "Dans le département, on a des axes dangereux, des routes parfois sinueuses ou des grandes lignes droites en forêt où les gens roulent vite", précise le colonel Houzé.
"On aurait pu avoir un bilan encore plus lourd avec de nombreuses sorties de route. Les véhicules plus récents et solides sauvent des vies aussi," ajoute le gendarme. A titre de comparaison, il y a eu autant de victimes sur les routes qu'en Dordogne en 2023, un département qui compte pourtant 80 000 habitants de plus que le Lot-et-Garonne.
Téléphone au volant, absence de ceinture
Le gendarme veut à son tour alerter sur un problème de comportement : "on voit que la consommation d'alcool, de stupéfiants, la vitesse excessive touchent toutes les catégories sociales". Les anecdotes ne manquent pas à l'occasion des contrôles routiers. "Récemment, on a eu un homme qui conduisait en regardant une série sur son téléphone, et quelqu'un qui avait installé un enfant de trois ans sur le siège avant, avec juste la ceinture", illustre-t-il.
L'omniprésence du téléphone dans la vie quotidienne n'arrange pas les choses. Presque un quart des infractions sont liés à des usages du téléphone au volant, un phénomène en forte augmentation (+ 13 %) par rapport à 2022. Un autre fait marque le gendarme, l'absence du port de ceinture.
Trop de gens ne portent pas la ceinture, souvent dans des véhicules anciens. Les conducteurs sont d'âges variés.
Colonel Emmanuel HouzéCommandant des gendarmes du Lot-et-Garonne
Face à ces infractions, 778 conducteurs et conductrices se sont vus suspendre leurs permis l'an dernier, un chiffre stable par rapport aux années précédentes. Le nombre de permis suspendus plus de dix mois est lui en augmentation. Le principal motif est la consommation excessive d'alcool.
Contrôles renforcés
Les services de l'Etat veulent freiner ces mauvais chiffres de l'insécurité routière, "priorité absolue" selon le préfet. "La mobilisation des forces de sécurité sera renforcée pour assurer des contrôles routiers. L'accent sera notamment mis sur l'usage du téléphone au volant", assure la préfecture.
La semaine dernière, 13 motocyclistes CRS sont ainsi venus prêter main forte aux policiers du département pour mener des contrôles notamment "contre les conduites addictives en sortie de bars et discothèques."
J'ai demandé aux gendarmes d'augmenter aussi les contrôles d'alcoolémie à toute heure du jour et de la nuit, de faire la chasse aussi aux contrôles techniques non effectués.
Emmanuel HouzéCommandant des gendarmes du Lot-et-Garonne
La gendarmerie départementale, qui compte près de 500 militaires, pourra compter cette année sur l'arrivée de 17 gendarmes supplémentaires avec la création de trois nouvelles brigades à Pont-du-Casse, Fouleyronnes et Clairac.
"Il y a le volet répressif et l'éducation des plus jeunes. Les comportements de tous sont à faire évoluer au quotidien, on est là aussi pour protéger ceux qui n'ont rien à se reprocher et peuvent être tués dans des accidents", selon le commandant.
En 2024, les actions de prévention seront renforcées aussi, sur divers thèmes : conduites à risques, risques routiers professionnels ou conduite des seniors. La lutte contre l'insécurité routière est un combat de longue haleine. Depuis le début de l'année 2024, cinq personnes ont déjà perdu la vie sur les routes lot-et-garonnaises.