Depuis une semaine, les permanences agricoles ont ouvert dans le Lot-et-Garonne. Ce dispositif, qui devrait perdurer jusqu'à l'été, doit permettre de venir en aide aux exploitants. Audrey, en difficulté, est allée les solliciter pour leur faire part de sa situation.
Les soucis comptables, Audrey Verhoeven ne les connaît que trop bien. Ses comptes sont dans le rouge et les difficultés financières font partie de son quotidien. Cette agricultrice installée à Monbahus dans le Lot-et-Garonne possède 100 chèvres, 6 vaches et 80 brebis. Elle a aussi 200 000 euros d'emprunt, 18 000 euros de rentrée d'argent, contre 20 000 euros de dépenses mensuelles. Une équation insoluble.
"On ne vit pas"
"Aujourd'hui, la ferme dépense plus qu'elle ne rapporte. Pourtant, on travaille beaucoup, on vend beaucoup de yaourts et de desserts. Je me bats pour sauver ma ferme, sauver mes bêtes, sauver mon métier, mon savoir-faire, témoigne l'agricultrice, touchée de plein fouet par les hausses de prix. Le coût de l'énergie, de l'eau et de l'alimentation des animaux a augmenté de 50 % à 100 %. "On ne vit pas", souffle-t-elle.
On n'est plus rentables : les factures d'il y a dix ans et celles d'aujourd'hui, c'est mathématique, ça ne marche pas.
Audrey VerhoevenPaysanne fromagère
En 2012, sa famille a traversé une lourde épreuve, quand Guillaume, le mari d'Audrey, lui aussi éleveur, s'est donné la mort. "Derrière, avec les enfants, on a voulu continuer : c'était mon métier autant que celui de Guillaume. On a mené le projet jusqu'au bout, on l'a appelé la ferme de Guillaume pour qu'il soit toujours avec nous."
Aide administrative
C'est pour maintenir ce projet à flots qu'Audrey s'est rendue à la permanence agricole mise en place à la sous-préfecture de Villeneuve sur-Lot. Les bras chargés de dossiers et de factures, elle ne cache rien de sa situation au sous-préfet, au directeur du territoire et à la responsable du service des impôts, réunis autour de la table. Le cœur lourd et les traits tirés, l'agricultrice leur explique les difficultés qui s'amoncellent : grippe aviaire, grêle, gel... "Ça fait partie de notre métier, mais ça a été très compliqué à vivre, avec beaucoup de mortalité sur les bêtes", souligne-t-elle. Face à elle, ses interlocuteurs l'écoutent et la renseignent sur des questions administratives et les conditions de dépôt de dossier.
Des permanences très demandées
Audrey n'est pas seule. Depuis la mise en place de ce guichet, chaque jour, une dizaine d'agriculteurs se rendent dans ces permanences, tenus à Marmande, Villeneuve-sur Lot ou Agen. "C'est un succès, estime préfet Daniel Barnier. Les personnes qui prennent rendez-vous souhaitent évoquer des questions de trésorerie, de fiscalité, d'urbanisme... Tout ce qui fait partie de la vie courante d'une exploitation".
Pas de baguette magique, mais un coup de main bienvenu. Ce signalement a son importance pour la paysanne lot-et-garonnaise. "Aujourd'hui, vous n'avez plus le droit à l'erreur, constate-t-elle, avec amertume. Il faudrait que tous les paysans français aillent aux rendez-vous. Si on ne signale pas le malaise et la détresse paysanne, ils n'existeront pas".