La colère d'Elisabeth Boissinot contre l'aide juridique dont bénéficie Salah Abdeslam suscite débats et interrogations chez les internautes. Au délà des rumeurs et des approximations, voilà tout ce qu'il faut savoir sur l'aide juridicitionnelle.
Depuis la publication de notre article sur la colère d’Elisabeth Boissinot, la mère de Chloé, tombée sous les balles des terroristes du 13 novembre dans un bar du 11e arrondissement, la presse nationale s’est emparée de cette polémique. Les grandes stations de radio et chaînes de télévision se font fait l’écho du désarroi de cette mère endeuillée.
Elisabeth Boissinot dénonce le système de l’aide juridictionnelle, cette réglementation qui permet à un détenu de bénéficier gratuitement d’un avocat en l’absence de revenus. La mère de Chloé menace de "geler ses impôts" car elle ne supporte pas que ses deniers puissent financer la défense de Salah Abdeslam, le logisticien présumé des attentats de Paris. Elle vient d’envoyer une lettre en ce sens au Président de la République, François Hollande.
Que dit le droit ?
Toute personne a le droit à un avocat. En Cour d’Assises, l’accusé a l’obligation d’être assisté par un avocat.Pour autant, les procès de criminels de guerre et de génocidaires, comme Maurice Papon, Aldof Eichmann ou Paul Touvier, ou encore de meurtriers tels que Patrick Henry sont émaillés de polémiques. A chaque fois, le débat ressurgit dans les mêmes termes : "comment défendre un monstre pareil ?".
Certains avocats, comme Jacques Vergès, ont même construit une part de leur personnage sur ce côté sulfureux. Celui qu’on surnommait le "salaud lumineux" confessait volontiers son goût du scandale : "J’ai un très grave défaut, expliquait-il, quand je suis insulté par des gens que je méprise, pour moi c’est un bonheur rare".
Combien va coûter l’aide juridique dont bénéficie Salah Abdeslam ?
S’il n’a pas des ressources suffisantes pour se payer les services d’un avocat, l’accusé peut recourir à l’aide juridictionnelle. Celle-ci peut être partielle ou totale en fonction des revenus de l’accusé et du nombre de personnes qu’il a à sa charge.Par exemple, les frais d’une personne seule dont le salaire mensuel est inférieur ou égal à 1000 euros seront pris en charge par l’Etat. En 2016, le budget de l’aide juridique a été fixé à 406 millions d’euros, ce qui représente moins d’1% des dépenses de l’Etat.
L’avocate médiatique, Caroline Mecary, a même calculé le coût de l’aide juridique prodiguée à Salah Abdeslam. Frank Berton, son avocat, va toucher 1375 euros à la fin de l’instruction, qui finira "vraisemblablement dans trois ou cinq ans", nous indiquent plusieurs avocats. Durant ce temps-là, la défense du seul survivant des attentats de Paris coûtera 0,000078125 centimes à chaque contribuable. C’est encore trop pour Elisabeth Boissinot qui refuse qu’un seul centime de ses impôts puisse aider à la défense du présumé terroriste. Au premier jour du procès, Frank Berton gagnera de nouveau 1375 euros puis 440 euros par jour d’audience.
Quels sont les droits des victimes de Salah Abdeslam ?
Selon l’article 9 alinéa 2 de la loi de 1991 relative à l’aide juridique, toute victime de crimes d'atteintes volontaires à la vie et ses ayants droits peuvent prétendre à l’aide juridictionnelle.Elisabeth Boissinot pourrait donc en bénéficier. Toutefois, comme le fait remarquer l’association des victimes du 13 novembre, tous les avocats n’acceptent pas ce dispositif car il n’est pas assez rémunérateur. L’aide juridictionnelle est censée couvrir tous les frais avancés par l’avocat. Mais, dans ce genre d’affaire, la défense est souvent perdante sur le plan financier.
Frank Berton, par exemple, est un ténor du barreau de Lille. "Pour une affaire comme celle-ci, il devrait demander environ 40 000 euros à Salah Abdeslam, estime Maître Rolland-Gosselin, avocat pénaliste au barreau de Poitiers. Il n’a vraiment rien à gagner dans cette affaire : médiatiquement, il est compliqué de défendre un terroriste et financièrement, Frank Berton pourra au mieux rentrer dans ses frais."
