A 91 ans, Guy Maurice Chouly a connu la vie secrète des maquis de Dordogne, les grandes heures du Communisme en banlieue parisienne mais aussi la répression policière des manifestations contre la guerre d’Algérie dans les années 1960. Une vie riche qu’il raconte dans ses mémoires.
"Tout ce que j’ai écrit, c’est ce que j’ai vécu de A à Z !" clame-t-il en fièrement. Dans ses mains Guy Maurice Chouly brandit un ouvrage intitulé "Parcours pluriel de l’enfance à la retraite". 276 pages de mémoires, sans détours, écrites de ses propres mains pendant près de 3 ans. Un récit personnel, intimement lié à l’histoire contemporaine de son pays.
"Bichou" le maquisard
C’est dans le petit village de Sarlande (24), à la frontière entre la Dordogne et le Limousin que le jeune Guy Maurice Chouly voit le jour en 1930. Ainé d’une fratrie de quatre garçons, "Bichou" n’a qu’une dizaine d’années lorsqu’il voit débarquer les premiers maquisards à la ferme familiale. Il s’agit d’Espagnols et de Français réfractaires du Service du Travail Obligatoire.
Alors que son père part souvent le soir, passe-partout et hache à la main, bloquer la route aux miliciens, Guy Maurice et sa mère s’occupent principalement du nourrir la communauté. Des souvenirs forts.
Le jeune garçon est particulièrement reconnaissant envers ses parents. L’impliquer dans cette dangereuse aventure c’était aussi prendre le risque qu’il dévoile tout à l’ennemi. Mais Guy Maurice n’en fit rien, pas même sous la menace des miliciens.
Le 8 mai 1943 ils descendent à Sarlande pour traquer son père et les autres maquisards. Ils viennent chercher Guy Maurice alors qu’il est encore à l’école. S’en suit un violent interrogatoire. Mais, même sous les gifles, le jeune "Bichou" garde sa langue.
Les grandes heures du Communisme Français
Une fois la guerre terminée Guy Maurice arrive à Limoges pour ses études. Il se forme à Beaublanc et devient ébéniste. Une fois son diplôme en poche il monte sur la capitale. Après quelques déboires de travail le jeune homme va se syndiquer.
C’est le début d’un long engagement politique qui le portera jusqu’à la mairie de Romainville (93) ou il sera élu adjoint sur une liste communiste en 1959. Une fonction qui l’amènera à rencontrer les grands noms de l’ère soviétique, comme le cosmonaute Pavel Popoviç à l’automne 1969.
L’engagement politique de Guy Maurice dépasse les frontières françaises. A la même période, il s’engage avec le comité de la paix de Romainville. Il milite pour la paix dans le monde et notamment contre la guerre qui fait rage en Algérie. Le 8 février 1962 il participe à une marche dans les rues de Paris à l’appel de différents partis de gauche pour dénoncer les actions de l’Organisation de l’Armée Secrète (OAS).
J’ai été touché à l’arcade sourcilière, au maxillaire. Mon poignet me fait toujours mal.
La manifestation est très violemment, réprimée par les forces de l’ordre. Huit personnes trouveront la mort, écrasées contre la grille de la bouche du métro Charonne où ils tentaient de se réfugier. Une neuvième décèdera à l’hôpital. Guy Maurice réussira à se sauver à temps en passant sous un bus à l’arrêt. Il en garde quelques séquelles.
Retraite et volonté de retransmettre
S’il prend sa retraite en 1990, Guy Maurice n’en reste pas moins un homme engagé. Il intègre la direction nationale du Secours Populaire Français. Il organise notamment l’aide aux pays de l’Est comme la Hongrie, la Tchécoslovaquie et la Roumanie ou il se rend début 1990.
En août 1999 il perd sa compagne, Christiane. Ses trois fils étant loin, Guy Maurice sombre dans la solitude. Sur les conseils de son frère il décide de se remettre à danser. C’est ainsi qu’un lundi de Pâques, dans un bal à Couzeix (Haute-Vienne), Guy Maurice rencontre Simone autour d’une danse. Sous le charme, il lui laisse son numéro de téléphone. Trois mois plus tard elle se décide enfin à le rappeler. Puis après quelques temps d’errances, "Bichou" et "Sissi" finissent par s’installer à Saint-Junien (87), ville d’origine de madame.
C’est d’ailleurs ici, et grâce à l’oreille bienveillante de Simone, que Guy Maurice se décide à écrire ses mémoires. En 3 ans il parvient à compiler 91 ans d’une existence palpitante, dont il n’a pas oublié un seul détail.