L'ancien leader de l'ETA, Josu Ternera, qui venait d'obtenir mercredi sa remise en liberté par la justice française, a été arrêté dans la soirée
en exécution d'une demande d'extradition adressée à la France par la justice espagnole, a appris l'AFP de sources judiciaires.
Josu Ternera, détenu à la prison de la Santé à Paris après son arrestation mi-mai en France après plus de 16 ans de cavale, a été "placé en rétention judiciaire par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI)" sur instruction du parquet général de Paris, "suite aux pièces qui lui ont été communiquées aux fins de remises aux autorités espagnoles".
L'ancien leader de l'ETA, Josu Ternera, qui venait d'obtenir aujourd'hui sa remise en liberté par la justice française, a été arrêté dans la soirée en exécution d'une demande d'extradition adressée à la France par la justice espagnole #AFP
— Agence France-Presse (@afpfr) June 19, 2019
La justice française avais pourtant remis ce mercredi en liberté, sous contrôle judiciaire, l'ancien chef de l'aile politique de l'organisation séparatiste basque ETA, Josu Ternera, arrêté à la mi-mai en France où il a été condamné deux fois par contumace.
►Pays basque : l'ancien leader de l'ETA Josu Ternera remis en liberté sous contrôle judiciaire
Le leader indépendantiste, également réclamé par la justice espagnole, devait remettre son passeport et ne pouvait pas quitter le territoire français. Il devait pointer une fois par semaine dans un commissariat, a indiqué la cour d'appel de Paris.
Ses avocats Laure Heinich-Luijer et Laurent Pasquet Marinacce ont argué que le maintien en détention provisoire de M. Ternera, en attente de nouveaux jugements, était "incompatible avec son état de santé". Selon les médias espagnols, l'ancien "etarra" de 68 ans souffrirait d'un cancer.
Il avait été arrêté le 16 mai, après plus de 16 ans de cavale, sur le parking d'un hôpital français où il se rendait pour être soigné.
"La détention doit constituer une exception quand il y a des éléments permettant d'affirmer que le prévenu se présentera au tribunal", a déclaré à l'AFP Me Marinacce. Louis Joinet, ancien magistrat et conseiller des droits de l'Homme à l'ONU, a proposé d'héberger M. Ternera, selon ses avocats.
Interrogée par l'AFP, Consuelo Ordóñez, présidente du Collectif des victimes du terrorisme du Pays basque (Covite), a exigé que M. Ternera soit extradé vers l'Espagne.
"Nous le réclamons depuis 17 ans", a-t-elle rappelé.
M. Ternera est notamment recherché pour son rôle présumé dans un attentat commis en 1987 contre une caserne de la garde civile à Saragosse, dans le nord de l'Espagne, qui avait fait 11 morts, dont cinq enfants.
Dans cette affaire, la justice espagnole a demandé récemment à la France de lui remettre l'indépendantiste. Il est également recherché pour son implication présumée dans l'assassinat, en 1980, d'un cadre du groupe Michelin en Espagne, selon des
médias hispaniques.
"L'abuelo"
Présents à l'audience, le fils et la fille de Josu Ternera, Egoitz et Irati Urrutikoetxea, ont plongé dans les bras l'un de l'autre en apprenant la remise en liberté de leur père. Cette décision "ouvre de nouvelles perspectives sur la voie de la réconciliation", avait assuré Egoitz.La justice française devait encore examiner les recours formés par Ternera contre ses deux condamnations en France par défaut, quand il était en fuite: la première à cinq ans de prison, prononcée le 1er juin 2010 puis alourdie à sept ans en appel, et la deuxième à huit ans de prison, le 1er mai 2017. Une audience procédurale devait se tenir à ce sujet le 28 juin au tribunal de Paris.
Josu Antonio Urrutikoetxea Bengoetxea, de son vrai nom, a été à partir de la fin des années 70 le chef de l'appareil politique de l'ETA.
"Ternera, c'était l'"abuelo" (grand-père) de l'organisation (...) respecté pour sa trajectoire", selon Gorka Landaburu, directeur du magazine Cambio16 et rescapé d'un attentat de l'ETA.
Il est alors considéré comme l'instigateur de la stratégie d'attentats à la voiture piégée. Et celui qui a mis sur pied le commando "itinérant" d'ETA, formé de militants français, le plus meurtrier de l'organisation."Il a pris rapidement le pouvoir à la fin des années 1970 et a été un des chefs d'ETA au moment des attentats les plus meurtriers dans les années 1980", ajoute-t-il.
Il avait été interpellé une première fois en France en 1989, à Bayonne (Pays basque français), une grenade à la main et muni de faux papiers, puis condamné à 10 ans de prison et expulsé vers l'Espagne après sa remise en liberté en 1996.
Il s'était alors petit à petit fait le promoteur de négociations de paix avec l'État espagnol, avant d'être écarté de la direction du groupe en 2006.
Elu en 1998 au Parlement autonome basque espagnol, il avait été désigné en 1999 comme l'un des trois négociateurs de l'ETA dans le processus de paix finalement avorté. L'indépendantiste s'était évanoui dans la nature en 2002.
Fondée en 1959, l'ETA est considérée comme responsable de la mort d'au moins 853 personnes durant quatre décennies de violence, avant que l'organisation ne décrète un cessez-le-feu en 2011. C'est Josu Ternera qui, le 3 mai 2018, avait annoncé sa dissolution.