De la Bretagne à l'Alsace et du Pays basque à la Corse en passant par l'Occitanie, les propos du président de la République à l'Académie française, qualifiant les langues régionales "d'instrument de division de la nation", font réagir les défenseurs de ces langues vernaculaires, qui le vivent comme un affront.
"De la part d'un président de la République, c'est indigne !". Sylvan Carrère ne décolère pas depuis le discours prononcé par Emmanuel Macron le 14 novembre devant l'Académie française, où il a déclaré :"Les langues régionales étaient un instrument de division de la nation".
Pour le directeur de Radio Pais, "la vòsta ràdio en gascon" (votre radio en gascon), ces propos sont incompréhensibles : "Une langue, c'est fait pour parler ensemble. Nous, on ne défend pas un morcellement, on a voué nos existences à la défense de ces langues et de ces cultures et on s'inscrit dans la République, on perçoit des aides publiques, rappelle-t-il. On sait bien que la seule langue officielle est la langue française."
La France ne serait pas la France sans ces identités et ces langues portées par un certain nombre de peuples.
Jean-René EtchegarayMaire de Bayonne (Renaissance)
"Inadmissible"
Au Pays basque, le sentiment d'offense et de stigmatisation résultant des propos du chef de l'État est tout aussi fort, et les réactions tout aussi vives, même de la part des représentants du parti d'Emmanuel Macron. "C'est quand même inadmissible d'entendre un président de la République nous dire que les langues régionales sont un ferment de division de la nation. C'est exactement le contraire. C'est mal connaître nos territoires d'une manière générale, et c'est mal connaître aussi ce qu'est cette diversité culturelle", affirme ce 26 novembre, le maire Renaissance de Bayonne, Jean-René Etchegaray, à l'occasion du 75ᵉ anniversaire de la journée internationale de la langue basque.
Nortasunei eraso eginez, identitarismoa eraikitzen da.
— Jean-René Etchegaray (@JreneEtchegaray) November 22, 2024
Gure mintzairek, euskarak eta gaskoinak, egiten dute gure lurraldearen batasuna, ez dute zatitzen. Aldi berean aukera bat eta ardura bat dira guretzako. Jarraituko dugu lan egiten horien biziberritzearen alde. https://t.co/XQI0YdL5zS
Dès le 22 novembre, il avait dénoncé, dans un message posté en français et en basque sur le réseau social X, des propos qu'il estime "plus que malvenus". "À malmener les identités, nous fabriquons de l’identitaire. Nos langues, le basque, le gascon, fédèrent sur notre territoire beaucoup plus qu’elles ne divisent. Elles sont à la fois notre chance et notre responsabilité. Nous continuerons de les faire vivre".
Une réaction également partagée par Peio Dufau, député NFP de la sixième circonscription des Pyrénées-Atlantiques. Il rappelle quant à lui : "Nos langues ne divisent pas, elles sont une richesse."
Ces propos d'@EmmanuelMacron sont une insulte à nos territoires et à ceux qui, comme le peuple Basque, ont résisté pour préserver leur identité malgré des siècles de politiques d’effacement. Nos langues ne divisent pas, elles sont une richesses.
— Peio DUFAU (@PeioDUFAU) November 21, 2024
Le véritable instrument de… pic.twitter.com/CTPAsP1zmp
Reconnues par la Constitution depuis 2008
Les défenseurs des langues régionales rappellent que depuis la révision constitutionnelle de 2008, l'article 75-1 de la Constitution de la Vᵉ République mentionne que "les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France".
Ils interpellent aussi le président de la République à ses contradictions : instruments de division aujourd'hui, les langues de France étaient en effet qualifiées de "trésor national" par Emmanuel Macron en avril 2021.