Le collectif Alda, qui milite contre la spéculation immobilière et pour l'accès au logement au Pays basque, occupe depuis vendredi un appartement Airbnb à Biarritz dont ils dénoncent l'illégalité.
C'est un studio de quelques mètres carrés, idéalement placé sur le littoral de Biarritz au Pays basque. Exigu, situé au rez-de-chaussée, il se loue 65 euros la nuit, hors saison. L'appartement "fait face à la Villa Belza, dans laquelle un appartement a été vendu 40 000 euros le mètre carré", précise Alda dans un communiqué.
Un logement non déclaré en mairie
Depuis vendredi, des membres de ce collectif, qui milite pour que les habitants du Pays basque puissent "vivre et se loger au pays", occupent cet appartement à tour de rôle. Selon les militants, l'appartement est loué dans l'illégalité : son numéro d'enregistrement, pourtant obligatoire ne figurait pas sur la plateforme Airbnb où il est proposé à la location.
Nous sommes dans un lieu symbole de l'absence totale de limites d'un marché immobilier que rien ne vient réguler, un lieu symbole de l'impossibilité pour une partie de plus en plus grande de la population locale de pouvoir vivre et se loger chez elle.
Collectif Alda
Les militants ont pris possession de l'appartement après l'avoir réservé via la plateforme. Mais ils sont restés dans les lieux après le 23 octobre, jour de la fin du bail. Et menacent de ne pas bouger tant qu'ils n'auront pas eu des réponses claires. "Nous, on demande un éclaircissement sur ce logement. On est en attente de réponses du propriétaire et de la mairie. On a une réunion mardi pour décider si on continue à l'occuper ou pas", précise Catherine, membre du collectif.
"Le propriétaire a commencé à régulariser sa situation. Il ne s'était pas enregistré auprès de la mairie, mais il nous a dit qu'il pensait être dans son bon droit, car il payait une taxe de séjour à Airbnb", précise Txetx Etcheverry, porte-parole d'Alda.
Ruée sur les petites villes
Depuis deux ans, dans certaines villes comme Paris ou Bordeaux, la location d'une surface en meublé de tourisme implique pour le propriétaire de proposer à la location une surface équivalente en location longue durée.
"Depuis, les entreprises ont stoppé leur développement dans ces grandes villes et se redéployent sur les plus petites villes et les territoires ruraux avec des investisseurs", poursuit Txetx Etchevvery. Conséquence : au Pays basque, de moins en moins de logements sont disponibles à la location longue durée, et les habitants peinent à se loger.
"Selon nos estimations, au moins 7 000 logements sont loués en meublés de tourisme sur le Pays basque. Alors que le parc privé locatif compte 41 600 logements à la location. Et au moins 2/3 de ces logements ne sont pas enregistrés", poursuit le militant.
"Exemples dissuasifs"
Le collectif soupçonne Airbnb d'entretenir volontairement le flou en ne publiant pas les numéros d'enregistrements des logements proposés, ce qui empêcherait les communes de distinguer les appartements frauduleux des autres, et ne leur permettrait pas de connaître exactement le montant de la taxe de séjour qui en découle.
Airbnb s'en défend précisant que la plateforme "collecte et reverse automatiquement la taxe de séjour dans plus de 29 000 communes en France et ce depuis 2018. Cette procédure est automatique : elle s'applique à chacune des transactions effectuées via Airbnb pour un logement loué en France, qu'il dispose ou non d'un numéro d'enregistrement. "
Le collectif demande désormais à la mairie de Biarritz d'attaquer la plateforme en justice, ainsi que deux propriétaires de logements illégaux "afin de faire des exemples dissuasifs pour tous les autres", et assure ne pas quitter le studio d'ici là.
"Nous sommes prêts à aller devant un juge pour qu'il nous dise si l'occupation illégale d'un logement illégal est illégal", assure Txtex Etcheverry.
Un rendez-vous est prévu en fin de semaine.
La mairie manque de moyens pour contrôler les fraudeurs
De son côté, la maire de Biarritz Maider Arosteguy reconnaît "une accélération incroyable de cette industrialisation d'Airbnb qui assèche le marché du logement à Biarritz", ainsi qu' une "flambée des prix", et se reconnaît parfois démunie : "Nous ne sommes pas en capacité d'évaluer le manque à gagner, car nous n'avons pas assez d'agents pour nous livrer aux contrôles".
La maire assure "ne pas s'interdire" de porter plainte contre Airbnb, tout en restant prudente. "Je pense que ça ne résoudrait pas la problématique du logement à Biarritz, même si cela remettrait quelques logements sur le marché". Pour autant, face à l'urgence de la situation, des mesures de compensation, identiques à celles déjà mises en place à Bordeaux, devraient être instaurées dans les prochains mois sur les zones sous tension, en accord avec la communauté d'agglomération du Pays basque.