Procès des assistants parlementaires européens. "C'est une tragédie humaine !", à la barre, François Bayrou, combatif, ne recule pas

François Bayrou a été entendu ce mardi 7 novembre, devant la 11e chambre du tribunal correctionnel de Paris, dans le cadre du procès des assistants parlementaires des eurodéputés du Modem, ouvert le 16 octobre. Le président du parti, renvoyé devant le tribunal pour complicité par instigation de détournement de fonds publics, s'est montré combatif dans sa défense.

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Il ne s'était pas encore exprimé publiquement depuis le début du procès, gardant son énergie pour sa défense à la barre. Calme, souriant, écoutant patiemment la lecture des faits et de son accusation par le président du tribunal, François Bayrou apparaît ce mardi 7 novembre déterminé à combattre.

Après six ans d'enquête, le procès, ouvert le 16 octobre dernier devant la 11e chambre correctionnelle de Paris, doit déterminer si l'actuel maire de Pau est coupable de complicité par instigation de détournement de fonds du Parlement européen, par l'intermédiaire des députés européens de son parti.

Le Modem est en effet accusé d'avoir utilisé les fonds du Parlement européen visant à rémunérer les assistants parlementaires des députés du Modem, sans pour autant que ces derniers n'aient réalisé de missions correspondant à cette enveloppe. Des faits qui s'étaleraient sur une période d'une dizaine d'années, entre 2005 et 2017. Pour les deux juges en charge de l'enquête, François Bayrou, en sa qualité de président du MoDem, serait complice de ces détournements, en ayant mis en place tout un système frauduleux.

"Quel mobile ?"

"Quel est le mobile ? Des difficultés financières ? Il n'y en a jamais eu !" se défend d'emblée le maire de Pau, dès le début de sa prise de parole, très attendue, à la barre. Et le président du MoDem de continuer en défendant l'intégrité financière de son parti : "Y a-t-il un système pour renflouer les caisses du MoDem ? Nous sommes le seul parti sans dette, notre liberté est garantie par les financements publics selon le nombre de voix, mais aussi grâce au siège immobilier de l'UDF. Dire qu'on voulait renflouer les caisses est un non-sens !"

Pourtant, le parti centriste a déjà connu des difficultés financières. En 2012, il avait dû vendre un de ses bien immobiliers, rue de l'Université, pour récupérer des fonds. Seize personnes avaient aussi été licenciées pour ramener les comptes à l'équilibre.

Jamais nous n'avons eu de menaces financières aussi graves qu'elles nous entraînent dans l'illégalité.

François Bayrou, président du MoDem

À la 11e chambre correctionnelle de Paris

Celui qui n'a cessé de clamer son innocence depuis le début de l'enquête, dénonçant des "accusations infondées", a choisi, en plus de l'intégrité financière, plusieurs axes de défense. D'abord, en réitérant son attachement, et celui de son parti, à l'Europe et aux instances européennes.

Ensuite, en argumentant son manque d'informations et de suivi sur ce qui pouvait advenir au Parlement européen. "En 2007, lors de l'élection présidentielle, je n'avais pas le temps de m'intéresser aux assistants parlementaires. Pareil en 2011-2012, je préparais la présidentielle, se défend l'actuel maire de Pau. Et je n'ai jamais eu aucune autorité sur les assistants parlementaires, c'était du ressort des députés européens. Dans notre famille, jamais personne n'a songé à donner des instructions pour le recrutement d'un assistant."

"J'ai envisagé de les poursuivre pour faux en écriture publique"

Sans notes, connaissant le dossier par cœur, François Bayrou rétorque même directement au président que sur les 131 assistants parlementaires que comptait le MoDem, "l'instruction n'en a conservé que quelques-uns, dont la majorité n'a jamais travaillé pour nous." Et il accuse le tribunal de se "focaliser sur deux assistantes, avec lesquelles il y a eu un problème d'ordre humain".

Après une suspension de séance, la projection du rapport de synthèse, signé par Corinne Lepage, fait grand bruit. "Vous avez dit lors de l'instruction que les enquêteurs de police avaient falsifié des documents ?" interroge le président. "Je maintiens ! répond François Bayrou sans se démonter. Ils ont falsifié le rapport de synthèse. C'est le document central de l'accusation, c'est scandaleux ! J'ai envisagé de les poursuivre pour faux en écriture publique."

Vous croyez qu'on est dans un complot mystérieux, mais c'est faux !

François Bayrou, président du MoDem

à la 11e chambre correctionnelle de Paris

"C'est une tragédie humaine ! Ce que vous insinuez, c'est une affabulation", finit même par asséner le président du MoDem, avant que son audition à la barre ne prenne fin. Durant un long après-midi de questions-réponses, François Bayrou aura donc plaidé sa cause, devant ses nombreux soutiens ayant fait le déplacement, comme la députée de Pau Josy Poueyto.

De longues heures debout, François Bayrou a déroulé son argumentaire, dans un dossier qu'il connaît par cœur, et où il sait qu'il peut perdre gros. L'élu risque en effet au maximum dix ans d'inéligibilité, ainsi que, au maximum, dix ans d'emprisonnement et un million d'euros d'amende. Le jugement devrait être mis en délibéré, à la fin des audiences, prévue le 15 novembre.

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