De sources concordantes collectées par l'Agence France presse, l'organisation basque annoncerait sa dissolution "avant l'été". Une décision historique. Les Artisans de la Paix n'interviennent pas pour l'instant. Jean Massias, universitaire bayonnais nous livre son analyse de l'après ETA.
La direction d'Eta avait appelé ses membres à dissoudre l'organisation il y a quelques semaines. Un vote d'ailleurs était en cours en février d'après le quotidien basque Gara qui lui sert traditionnellement de tribune.
Moins d'un an après avoir rendu les armes, l'organisation séparatiste basque s'apprête donc à annoncer la fin de son histoire.
L'AFP a consulté plusieurs sources concordantes, et précise qu'ETA devrait faire cette ultime annonce avant l'été.
Pour l'universitaire bayonnais Jean Massias, spécialiste du dossier, c'est une suite logique qu'ETA décide de sa dissolution.
Ce vote lancé au sein des membres est un mode de fonctionnement qui se veut consensuel et qui permet de faire assumer la dissolution à l'ensemble des militants.
Voir le reportage de France 3 Aquitaine
ETA a renoncé à la violence en octobre 2011. L'organisation séparatiste basque a annoncé en avril dernier son "désarmement total". Elle a livré une liste de cache d'armes aux autorités françaises. Mais ce geste avait été jugé insuffisant pour le gouvernement espagnol. Lui demandait à l'organisation de s'auto-dissoudre.
D'après l'AFP, cette dissolution prendra une forme à portée historique . Elle associera des personnalités de tous bords afin que sa légitimité ne souffre d'aucune contestation, promettent des sources proches de l'ETA.
Un long processus
Les Artisans de la paix , sous l'impulsion de trois personnalités issues de la société civile (Michel Berhocoirigoin, Jean-Noel Etcheverry « Txetx » et Michel Tubiana) sont rentrés en contact avec l’organisation clandestine ETA. Ils lui ont demandé de leur déléguer la responsabilité de son arsenal, d'où cette journée du désarmement le 8 avril 2017.
Aujourd'hui, ils ne souhaitent pas commenter ces informations.
Contactée ce matin au téléphone, Anaïs Funosas, Membre des Artisans de la Paix - BAKE BIDEA - ajoute :
ETA est dans une phase positive. Notre ressenti, c'est que les choses avancent. Ce débat interne est une bonne chose, ETA est entrée dans une logique de paix. On a décidé de ne pas intervenir, dans l'attente de la la fin de ce débat.
"Voilà une organisation qui est en grande partie désarmée, en tout cas elle a remis 3,5 tonnes d'armements. Même si on n'a pas tout retrouvé par rapport à la quantité d'armes qu'on sait être en circulation, il y a une démarche sincère de sa part, le dernier pas qu'on attend est sa dissolution", estime aussi Samuel Vuelta Simon, procureur de la République à Bayonne (Pyrénées-Atlantiques), interrogé par l'AFP.
"Le plus important lors de la dissolution d'ETA, c'est ce qui sera dit", explique à l'AFP Me Jean-François Blanco, défenseur de nombreux membres de l'ETA.
"Il faut qu'ETA dise clairement qu'elle regrette le sort des victimes innocentes", insiste Me Blanco, avocat par ailleurs de Jean-Noël Etcheverry dit "Txetx", militant altermondialiste et cheville ouvrière du désarmement d'avril 2017 à Bayonne.
"Lors de cet acte de dissolution, ETA va sans doute faire mention du GAL (Groupes antiterroristes de libération, NDLR), des aveux extorqués sous la torture, c'est exact, mais le plus important est aussi de reconnaître la souffrance de l'autre", dit Me Blanco.
Dans les années 1980, une soixantaine de militants d'ETA ont été assassinés en Espagne et en France dans des attentats commis par des groupes à la solde de la police espagnole, notamment le Bataillon basque espagnol (BBE), puis les GAL.
La lutte porte désormais sur le sort des détenus: une petite soixantaine en France et quelque 260 en Espagne. La dissolution permettra-t-elle de régler leur sort ? Le procureur de Bayonne, ancien magistrat de liaison auprès du ministère de la justice espagnol dans les années 1980 avance ceci :
Ce n'est pas un marché. Ce n'est pas +on se dissout, vous libérez nos prisonniers+. En revanche, sans aucun doute, la dissolution favorisera le retour à la normalité de ces personnes-là. La justice tient compte de la réalité du moment
L'après ETA ?
"Une base de travail commence à se profiler: il y a ceux qui ont du sang sur le mains et ceux qui n'en ont pas", ajoute-t-il, rappelant qu'un premier pas vient d'être fait par l'administration pénitentiaire française avec le transfèrement de deux détenus depuis une prison du Nord vers le Sud-Ouest, près de leurs familles.
"Nombre des membres de l'ETA arrêtés ces dernières années n'étaient pas passés à l'acte, surtout chez les jeunes", observe M. Vuelta Simon.
Pour le spécialiste de l'ETA, Jean Massias, " Cette décision appelle une réponse du gouvernement espagnol et un peu français. "
On passe à l'après-conflit. Il ne reste plus d'obstacles au traitement des prisonniers.
Au point selon l'universitaire de rendre plus complexe la situation du gouvernement espagnol car cette décision va priver Madrid de son argument pour lutter contre les velléités d'indépendance basque.
La fin d'ETA ne fait pas disparaître la revendication indépendantiste.
Si cette dissolution est effective avant l'été comme annoncé, ce serait , l'épilogue de près de 60 ans de combats meurtriers, sans parvenir à créer un État indépendant des deux côtés des Pyrénées.