À l'occasion de la Journée mondiale contre l'homophobie, la transphobie et la biphobie, deux femmes trans ont accepté de nous livrer leur témoignage concernant leur transidentité. Une parole précieuse pour contrer les discriminations qu'elles subissent. En 2022, le nombre de cas de transphobies a augmenté de 35% par rapport à 2020, selon le rapport de SOS Homophobie.
Depuis l'âge de 6 ans, Léonor Gellibert se sent femme : "pour moi, cela a toujours été une évidence, quelque chose de naturel et de simple. C'est devenu compliqué lorsque j'ai compris que cette transidentité n'était pas acceptée par le monde extérieur".
Ce sont des remarques étranges, comme si nous n'étions pas de vraies femmes.
Léonor Gellibert
À 36 ans, elle est aujourd’hui costumière et bien dans sa peau. Le harcèlement, lui, a toujours fait partie de sa vie : "À l'école, pour certains, j'étais un garçon trop efféminé, ou parfois une fille. À ce titre-là, j'ai vécu beaucoup de misogynie. Et quand j'ai fait ma formation de costumière, des professeurs disaient qu'il y avait des "costumières", et des "costumières-mières. Ce sont des remarques qui sont étranges, comme si nous n'étions pas de vraies femmes".
Des réflexions transphobes que Sophie a subi au sein même de sa famille lorsqu'elle a officialisé son statut il y a cinq ans, et bien que sa situation soit très bien acceptée dans son travail : "ma transition n'a pas été très bien reçue de la part de ma famille. Ils ont mis du temps à l'admettre, et ils m'ont longtemps genrée au masculin. Ce sont des gestes, de l'ignorance... Cela s'améliore, et je suis consciente que ce n'est pas pour ça qu'ils ne m'aiment pas ! Je n'ai pas été rejetée non plus comme certain.es ami.es ont pu l'être par leurs proches".
Une transphobie en hausse constante
Dans la rue, dans les commerces, dans les services ou au sein même de la famille, la violence envers les personnes trans ne cesse d'augmenter, notamment chez les plus jeunes. Elles cumulent les discriminations : précarité, problèmes administratifs, d'accès aux soins et aux logements.
C'est ce que montrent les chiffres du rapport publié par SOS Homophobie ce 17 mai, à l'occasion de la Journée mondiale contre l'homophobie, la transphobie et la biphobie. Les témoignages recensés dans le rapport décrivent 1195 situations LGBTIphobes en France, soit une augmentation de 5% par rapport à 2021. Le nombre de cas de transphobies est, encore une fois, en forte augmentation : +26% de cas en 2022 par rapport à 2021, 35% par rapport à 2020.
Il faut que nous ayons les mêmes droits que les autres personnes sur cette terre.
Sophie
Des cas qui, bien trop souvent, sont synonymes de violences. Des personnes trans sont tuées, frappées, des guets-apens sont même organisés pour attaquer des personnes trans, gays ou lesbiennes.
Ce que Léonor a bien noté : "même si les choses ont évolué ces derniers temps et que les personnes trans sont plus visibles, cela ne veut pas dire que le problème est réglé. Il y a un gros soucis dans la façon dont les gens nous perçoivent. Puisque nous sommes au début de cette visibilisation, dès qu'une personne trans apparaît dans les médias, elle devient la représentante de notre communauté. Mais comme tout le reste de la population, nous sommes toutes et tous différent.es".
Cette journée est importante, mais selon Sophie, "cela ne doit pas s'arrêter à aujourd'hui. Ce qu'on demande, et toute l'année, c'est de la tolérance, de la bienveillance. Il faut que l'on soit reconnus, et que nous ayons les mêmes droits que les autres personnes sur cette terre".
Un futur centre LGBTQIA+ à Limoges
Ces discriminations, Evelyne Sagnet, référente SOS Homophobie à Limoges, les remarques de plus en plus lorsqu'elle se rend dans les lycées pour parler de l'association : "depuis environ trois ans, la haine envers les LGBTQIA+ est de plus en plus terrible". Selon elle, cette haine peut notamment s'expliquer par le fait que "lorsque l'on se rapproche des extrêmes, et notamment l'extrême droite, la parole se libère, et on n'a plus honte de dire des choses épouvantables".
Selon elle, il est donc "important d'aider les personnes trans, public déjà fragilisé par le fait d'être emprisonné dans un corps qu'il ne souhaite pas, à rencontrer les bonnes personnes, les bons médecins (car la maltraitance médicale existe)".
Un centre pour les LGBTQIA+ devrait bientôt voir le jour, pour accueillir, informer, accompagner, et aider les personnes fragilisées, "mais aussi un service à la population en général qui cherche des renseignements, ainsi que de former les personnes dans les commissariats, dans les tribunaux, dans l'éducation nationale". Les solutions sont multiples, pour espérer que le rapport de SOS Homophobie ne soit pas aussi "catastrophique" - comme le décrit Evelyne- dans les années à venir.