Pour la 35e fois en 35 éditions, Daniel Mangeas anime et commente le Tour Poitou-Charentes en Nouvelle-Aquitaine. À 72 ans, celui qui assura la "voix du Tour de France" pendant 40 ans, est toujours imprégné par la même passion.
Une "vedette", le "meilleur", une "légende", … Sur les routes du Tour Poitou-Charentes en Nouvelle-Aquitaine, les spectateurs ne sont pas avares de compliments pour Daniel Mangeas. La "voix du Tour de France", s’il n’y commente plus les courses depuis 2014, reste, à 72 ans, un "personnage du cyclisme" qui vit pour sa passion.
Une voix historique
Sur le podium, d’où il présente et commente les étapes, il est chez lui, dans son élément. Aucun coureur n’a de secret pour lui. Et le public le lui rend bien. Daniel Mangeas signe des autographes et est attendu en fin de course pour discuter. Son timbre, si particulier, est familier aux spectateurs. "C’est une vedette sur les courses", sourit Marc, un passionné venu observer l’arrivée de la première étape à Parthenay.
C’est même plus que cela pour Alain Clouet, le président et directeur du Tour Poitou-Charentes en Nouvelle-Aquitaine : "Les gens viennent aussi pour le voir !" Avec le speaker, ils sont amis. De vrais amis, les deux hommes aiment à le rappeler. "J’ai fait les 35 éditions du Tour Poitou-Charentes. La première, nous la commentions tous les deux, se rappelle Daniel Mangeas. Cette année-là, sur une étape, 3 passages à niveau se sont abaissés devant le peloton et ceux de devant ont pris une avance. Ce sont des choses que l’on peut plus voir maintenant."
J'étais fait pour ça ! À 14 ans, quand je passais mon certificat d'étude, le sujet était : raconter le passage du Tour de France dans votre village. Je peux vous assurer que j'ai eu la meilleure note !
En 1986, lors du premier Tour Poitou-Charentes, le Normand Daniel Mangeas était déjà connu et reconnu. Il a commenté sa première course à 16 ans, en 1966. Huit ans plus tard, il se retrouve à remplacer le speaker du Tour de France au pied-levé. "À l’époque, je me suis dit : "Même si je n’en commente plus après, au moins j’aurais fait celle-là"", se remémore le speaker. Il passera encore 40 années et 873 étapes sur le Tour de France avant de terminer cette belle histoire en 2014.
Ce n’est pas pour autant la ligne d’arrivée pour Daniel Mangeas. Il ne fait plus le Tour de France, le Paris-Nice et le Critérium du Dauphiné mais continue bien d’animer toutes les autres. "Quand ce fut la fin avec le Tour de France, je me suis dit que je ne pouvais pas m’arrêter. La course, c’est quelque chose de passionnel", répète-t-il. La "voix du Tour" ironise même : "Maintenant j'ai des vacances en juillet !"
La passion, est bien le moteur de Daniel Mangeas. Le directeur du Tour Poitou-Charentes en est aussi persuadé. "C’est bien évidemment son travail, mais il est surtout là pour vivre les moments. Daniel a un cœur immense. Comme les meilleurs artistes, il mourra sur scène", lance Alain Clouet. Le cyclisme est presque une religion pour le speaker de 72 ans. Il lui fait des infidélités footballistiques uniquement pour le Stade Rennais et l’US Avranches, ses deux clubs de cœur. Pour le reste, Daniel Mangeas respire vélo.
"Comme beaucoup, j’ai grandi avec sa voix, reconnaissable entre toutes. Il connaît tout, c’est le meilleur", s’enthousiasme Jean-Pierre, 66 ans, venu à l’arrivée à Parthenay. Quand il s’agit de cyclisme, la mémoire de Daniel Mangeas ne le trahit jamais. "Quand je dois aller faire les courses, j’en oublie la moitié", jure l’intéressé en riant. En citant un coureur, il n’oublie jamais ses faits d’arme. "Depuis qu’il y a de la concurrence, il s’est amélioré", affirme même l’ancien coureur pro des années 60 et 70, Gianni Marcarini, que Daniel Mangeas a vu courir.
L'amour de la course
Beaucoup louent son niveau de connaissance quasi-encyclopédique dans le domaine. "Je n’ai jamais compris pourquoi les chaînes de télévision ne lui ont pas demandé de commenter", avoue Alain Clouet. Avant d’ajouter : "Je crois que de toutes façons, il préfère être sur place auprès des gens. Il a toujours un mot sympathique pour tout le monde."
Mais jusqu’à quand ? À quelques minutes de son entrée en scène pour lancer pleinement la 35e édition du Tour Poitou-Charentes, Daniel Mangeas parle de l’épreuve physique que représente, tout au long de l’année, l’animation des courses à travers l’hexagone. Sa voix est rudement mise à l’épreuve. Il la soigne avec du miel et quelques vocalises.
Du haut de ses 72 ans, un certain épuisement peut également se faire ressentir. "Oui, parfois on est fatigué mais dès qu’on se retrouve sur le podium, ça repart", assure le speaker. Sa phrase à peine terminée, Daniel Mangeas se lève. Il s’agite, ne pouvant contenir son grand sourire : "Ah voilà les premiers coureurs qui arrivent !" Ses yeux pétillent. Semblables à ceux d’un enfant qui verrait les coureurs pour la première fois. La passion n’a pas d’âge.