En un mois, le centre anti poison de Nouvelle-Aquitaine a recensé autant d'intoxications aux champignons traitées que sur l'ensemble de l'année 2021. De nombreuses espèces sont dangereuses, voire mortelles. Vigilance.
" Regardez il y a des petites lépiotes comme ça qui sont extrêmement dangereuses alors qu'elles ont un air tout à fait anodin" montre Robert Cazenave alors qu'il se promène dans une forêt du sud Gironde, à Préchac.
" Là, ce sont des galères marginées qui poussent sur des bois" continue ce passionné de champignons et président d'une association mycologique. Il prévient : "c'est tout petit et c'est mortel. On en voit beaucoup. Il y a souvent confusion avec une autre espèce qui lui ressemble et dont certains raffolent".
90% des champignons sont toxiques
Sur les quelque 5 000 espèces recensées en France, une centaine seulement peut être consommée sans risque particulier. " A condition d'en manger en petites quantités, bien cuits et jamais à tous les repas" recommande la société mycologique de France.
" La plupart du temps, les personnes victimes d'intoxication ont l'habitude de ramasser des champignons. Elles croient bien les reconnaître. Sauf que non. Et elles se font piéger" explique Magalie Labadie, la responsable du centre anti poison de Nouvelle-Aquitaine.
Règles de base
Pour éviter les erreurs, les spécialistes conseillent d'abord de s'équiper d'un couteau et de ramasser l'ensemble du champignon, depuis sa racine.
" Il faut creuser en profondeur et le déterrer car le bas du pied donne des indications précieuses qui permettent de faire la différence entre un comestible et un mortel" assure Jacques Boyer, membres du cercle d'études mycologiques d'Aquitaine, également de la balade dans les bois de Préchac.
Les deux spécialistes donnent l'exemple de l'amanite phalloïde et de sa volve à sa base, spécificité qui permet de l'identifier. " Si on le coupe et on ne le déterre pas, on ne voit pas la volve et on peut se tromper. C'est le champignon qui provoque le plus d'intoxications en France" assure Robert Cazenave.
Ingurgiter 80 grammes de cette espèce potentiellement mortelle suffit pour provoquer d'importants problèmes hépatiques et rénaux. " Elle contient des toxines qui attaquent le foie, les reins et plusieurs zones vitales. Elles provoquent une très grande déshydratation.
Le problème est que les premiers symptômes ne se manifestent que 24 à 48 heures après. Et là les molécules ont eu le temps de faire pas mal de dégâts dans l'organisme
Robert Cazenave - mycologueà France 3 Aquitaine
On a donc compris l'utilité du couteau.
L'autre recommandation de ces hommes de terrain est de s'équiper d'un panier pour la récolte.
Il faut bannir les sacs en plastique. Ils accélèrent la fermentation et le développement de bactéries toxiques
Robert Cazenave - mycologueà France 3 Aquitaine
" Vous pouvez arriver chez vous avec des cèpes parfaitement comestibles au départ qui vont vous rendre malades".
Nous voilà prévenus.
Pic d'intoxications en Nouvelle-Aquitaine
Au centre antipoison qui gère l'ensemble des appels en provenance des douze départements de Nouvelle-Aquitaine, Magalie Labadie a relevé une augmentation impressionnante du nombre d'intoxications ces dernières semaines.
On a eu, en un mois, autant d'intoxications qu'en un an l'année dernière
Magalie Labadie - responsable du centre anti poison de Nouvelle-Aquitaineà France 3 Aquitaine
Pas d'explication particulière à ce phénomène particulièrement sensible dans notre région. " Les gens sont peut-être plus avides de sorties dans les bois après la covid où il y a eu des pousses importantes de champignons toxiques, on n'a pas vraiment d'éléments précis pour comprendre cette tendance" indique la toxicologue.
Prendre des photos
Le centre reçoit plusieurs appels par jour concernant des intoxications aux champignons sur son numéro d'urgence (05 56 96 40 80 24h/24 - 7j/7).
" Quand les gens ont pris une photo de la cueillette, ça nous aide beaucoup" souligne-t-elle, " on arrive à identifier les espèces qui ont pu être responsables des symptômes".
Photographier systématiquement son panier est donc des plus conseillé.
Au moindre doute, il faut consulter un pharmacien mycologue ou une société de mycologie qui se fera un plaisir de regarder le panier
Magalie Labadie - responsable centre anti poison Nouvelle-Aquitaineà France 3 Aquitaine
Robert Cazenave confirme. " On est tous disposés à répondre et disponibles pour partager nos connaissances. Ça fait partie de la charte de nos associations".
N'hésitons donc pas à les solliciter et à leur envoyer des photos. Il existe plusieurs centaines de sociétés mycologiques en France.