Colère au barreau de Poitiers : les avocats dénoncent le contrôle de leur sacoche professionnelle à l’entrée du commissariat de Châtellerault. La démarche s’inscrit dans le cadre de l’état d’urgence, leur répond la police.
Les avocats de la Vienne dénoncent de récents contrôles dont ils font depuis peu l'objet à leur arrivée au commissariat de Châtellerault, au nord de Poitiers. Certains ont dû ouvrir leur sacoche professionnelle, sous peine de ne pas pouvoir entrer, alors qu'ils venaient assister un client placé en garde à vue. Pour eux, ce contrôle est injustifié.
“Le sac d’un avocat est le prolongement de son cabinet”
“Cet examen visuel ne devrait pas avoir lieu”, condamne Me Nicolas Gillet, bâtonnier des avocats du barreau de Poitiers qui a pris ses fonctions le 1er janvier 2022. “Le sac d’un avocat est le prolongement de son cabinet, et donc de tous ses dossiers ! Quand on veut entrer dans le cabinet d’un avocat, il faut le faire avec une perquisition. Sans perquisition, pas de fouille.” Une atteinte au secret professionnel, selon le bâtonnier.
Aucun texte de loi n'autorise un pouvoir d’inspection visuelle des sacs, selon l’Ordre des Avocats. Mais une circulaire d’avril 2021 du ministère de l’Intérieur prévoit des mesures de sécurité pour accéder à tous les établissements recevant du public, dont l'inspection visuelle des bagages, dans le cadre du plan Vigipirate.
“La police justifie ces contrôles par l’état d’urgence, comme n’importe quel lieu public. Pourtant il n'y a qu'à Châtellerault que l'on subit ces contrôles, pas à Poitiers”, assure Me Nicolas Gillet. “Non seulement ce sont des fouilles très localisées, et en plus, tous les fonctionnaires de police ne la font pas. Certains avocats entrent avec contrôle, d’autres non. Nous n’arrivons pas à comprendre pourquoi.”
Trois cas remontés depuis octobre
Si l’entrée en commissariat nécessite la carte d’avocat, le dépôt de la carte d’identité, et l’accompagnement d’un policier jusqu’au client en garde à vue, il est courant qu’un avocat entre dans un commissariat sans ouvrir son sac, insiste le bâtonnier.
Depuis la remontée de la problématique, l’Ordre des avocats demande aux avocats de signaler les faits et de se retirer des locaux. “On a eu trois cas depuis le mois d’octobre”, note Me Nicolas Gillet, qui prenait déjà le problème très au sérieux aux côtés de son prédécesseur Emmanuel Breillat. “Mais ça ne reflète sans doute pas la réalité : entre les avocats qui ne savent pas qu’ils n'ont pas à ouvrir leurs sacs et ceux qui n’ont pas fait remonter l’information, il y a toute une partie non visible”.
Me Nicolas Gillet a adressé un courrier à la direction de la police locale, pour un rendez-vous sur les lieux.
Contacté, le commandant Étienne Martineau du commissariat de Châtellerault n'a pas souhaité donner suite à nos sollicitations.
Le bâtonnier, lui, compte aborder la problématique avec le conseil de l’Ordre des avocats, qu’il préside, à l’occasion d'une réunion le mercredi 12 janvier.