Après l'abattage complet de son élevage, une productrice de porcs lance une cagnotte en ligne pour relancer son activité

Depuis la découverte fin janvier 2024 que son élevage était contaminé par la brucellose, une maladie infectieuse qui se manifeste par des avortements, les autorités sanitaires ont procédé à l'abattage de toutes ses truies. Sans revenus depuis, elle lance une cagnotte en ligne pour financer le redémarrage de son élevage.

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Bérengère Gaillard se souvient encore très bien de ce jour de début février 2024 lorsque l'agent de la Direction départementale de la protection de population (DDPP) l'a appelée pour lui donner les résultats des analyses pratiquées sur ses truies. Depuis peu, plusieurs d'entre elles mettaient bas avant terme. "On savait que c'était un signe de la brucellose et l'agent me l'a tout de suite confirmé." La brucellose, c'est cette maladie très contagieuse qui provoque des avortements, notamment chez les truies. "On a fait un deuxième test pour confirmer. Mais, à partir du coup de fil, on savait ce qui allait se passer. Et, on n'était pas bien", confie-t-elle, encore sous le choc.

En l'espace de quelques semaines, toutes ses truies ont dû être abattues. "Il a fallu faire un abattage total, raconte-t-elle, pour faire un vide sanitaire et que la brucellose ne revienne pas. Les truies ont toutes été abattues en un mois."

Sur le quai, il fallait pousser les truies dans les camions. J'en étais incapable.

Bérengère Gaillard

Eleveuse de porcs

Sur son élevage de porcs à Sanxay, dans la Vienne, Bérengère Gaillard contemple les bâtiments dans la pénombre, toujours vides. La journée où il a fallu emmener son cheptel de truies reste gravée dans sa mémoire. C'était au printemps dernier. "Voir le camion qui vient chercher les animaux pour les emmener à l'abattoir, déjà en temps normal, c'est dur, mais là, ça l'était encore plus. Il fallait être là, sur le quai, pour pousser les truies dans les camions. J'en étais incapable", lâche-t-elle, encore bouleversée par l'épreuve traversée avec son mari, Nicolas, et ses parents, Véronique et Hervé.

Ce jour-là, cela faisait déjà dix semaines que la contamination à la brucellose était connue. Deux mois et demi, c'est le temps qu'il a fallu pour déterminer le type du variant qui s'était répandu dans la maternité de l'élevage. "Au final, le variant ne posait pas de problème pour la consommation humaine de la viande des porcs, mais il fallait tout abattre", se remémore-t-elle. "Et, tout nettoyer".

Les porcelets ont été "mis à engraisser" dans une autre exploitation. Pendant un mois et demi, trois personnes se sont relayées dans l'exploitation pour nettoyer les bâtiments. La désinfection a ensuite été réalisée par une entreprise spécialisée. Depuis, la vie sur le GAEC n'est plus que démarches administratives et attente. Plus aucune activité. Auparavant, les mises bas s'étalaient tout au long de l'année et permettaient une régularité pour la vente des animaux et donc des rentrées d'argent. Les prochaines recettes ne sont désormais pas attendues avant août 2025. Une éternité à l'échelle de l'exploitation.

Exclu du dispositif d'indemnisation

La perte des animaux en raison de la brucellose aurait pu être indemnisée par l'État, mais le GAEC s'est retrouvé exclu du dispositif d'aide. "La mise aux normes de l'exploitation était toujours en cours", explique Bérengère Gaillard.

À ses côtés, son père ne cache pas son incompréhension. "Si on n'est pas aux normes sanitaires, pas d'indemnisations. On ne l'était pas, certes. Mais, on était sur le point de terminer. Tous les matériaux restants avaient été commandés, achetés, avant la maladie. On a fourni les factures, la preuve des commandes...", lâche-t-il, désemparé. Mais leur dossier n'a pas permis d'inclure l'exploitation dans le dispositif étatique d'indemnisation.

"On se retrouve sans revenus depuis février, explique-t-elle. On a fait nos dossiers pour avoir le RSA, en attendant."

Une cagnotte en ligne

La famille ne perd pourtant pas espoir de voir l'activité de l'exploitation repartir. La solidarité autour d'eux s'organise très progressivement. Le banquier a acté "une année blanche" sur des remboursements de prêts. La Coop avec laquelle le GAEC travaille pour l'alimentation animale (et à laquelle est vendue la production de céréales dont s'occupe Nicolas) leur a également accordé des facilités. Les parents, aussi, sont à leurs côtés. Mais, c'est à peu près tout. L'idée d'une amie de lancer une cagnotte pour racheter des truies est venue mettre du baume au cœur de la famille.

Sur la plateforme MiiMOSA, dédiée au financement des projets agricoles et alimentaires, une page vient d'ouvrir et permet aux particuliers d'apporter leur contribution. L'objectif du GAEC est de récolter 45 000 euros. Si le premier palier de 3 000 euros est en passe d'être atteint, la famille compte sur cette nouvelle forme de solidarité, celles des habitués, des clients à la ferme, notamment, pour réamorcer l'activité.

Le GAEC a contracté un nouvel emprunt auprès de l'un de ses partenaires, très présent à ses côtés, pour l'achat de l'alimentation animale. Dans les prochaines semaines, les dix-huit premières truies devraient arriver dans l'exploitation et permettre au site de renouer avec un début d'activité. Cette première étape se révèle cruciale pour le moral de la petite équipe familiale.

Si l'élevage de truies existe depuis 1988, d'abord à Soudan, dans les Deux-Sèvres, il s'est depuis transformé à de multiples reprises, passant de 50 truies à ses débuts à 140 dans sa forme actuelle, à Sanxay, où il a été repris en 2011 par Bérengère, puis avec son mari et sa mère.

Avant le drame de la brucellose, l'exploitation produisait 2 500 porcs charcutiers à l'année pour un chiffre d'affaires de 600 000 euros et, pour suivre les évolutions de la législation, venait d'investir dans une nouvelle maternité "équipée de parcours extérieurs pour chaque truie".

>>> La cagnotte, sur la plateforme Miimosa.

Reportage de Jérôme Vilain et Romain Burot.

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