Figure régionale du journalisme, Sandrine Leclère est décédée la nuit dernière

Notre consœur Sandrine Leclère s'est éteinte la nuit dernière après des mois d'une lutte acharnée contre la maladie. Elle avait incarné pendant des années l'édition du midi du journal de France 3 Poitou-Charentes avant de devenir rédactrice-en-chef des éditions de Limoges puis de Bordeaux.

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C'est un dimanche de début de printemps. La neige tombe abondamment à Poitiers. Le quartier des Couronneries, où est alors située la rédaction de France 3 Poitou-Charentes, s'émerveille de voir le quartier se recouvrir d'une épaisse couche de blanc. À son bureau où elle écrit le journal de la mi-journée, Sandrine Leclère s'exclame : "Et si on faisait le journal dehors dans la neige ?"

Aussitôt dit, aussitôt fait. À la machine à café où une partie de l'équipe termine sa pause, l'enthousiasme de Sandrine mobilise. "Tout le monde a donné un coup de main", se souvient Thierry Cormerais, monteur à la rédaction de Poitiers. "Il fallait tirer tous les câbles, fibre et son, jusqu'à la régie et on a improvisé un plateau en extérieur sur le parking !" 

Une caméra, un éclairage, plusieurs dizaines de mètres de câbles et Sandrine, micro à la main, le journal se fait ce jour-là avec les moyens du bord et surtout, avec l'idée de faire vivre aux téléspectateurs ce petit bonheur du jour : la neige tombée dans la matinée.

"Avec elle, on aimait travailler et on le faisait dans la bonne humeur, se souvient Alexandra Filliot, rédactrice-en-chef adjointe à la rédaction de Limoges, où Sandrine a ensuite occupé le poste de rédactrice-en-chef. C’était une très grande bosseuse, jamais fatiguée, toujours passionnée. Elle était juste, elle était forte, c’était une collègue formidable." 

Sandrine est arrivée au journalisme au début des années 2000 après avoir travaillé dans la communication. Dans l'édition de la mi-journée Limousin-Poitou-Charentes d'alors, elle anime une chronique consacrée aux sites Internet régionaux. "Comme elle avait suivi une formation de webmaster et qu’elle voulait faire du journalisme, c’était pour elle le rôle idéal, se souvient Fabrice Bidault, aujourd'hui rédacteur-en-chef adjoint à Limoges. Je me souviens de ces moments à l’antenne où elle exprimait déjà tout ce qu’elle était : l’enthousiasme, la conviction, la joie de vivre, son incroyable capacité à crever l’écran et à capter l’attention."  

Sandrine a alors appris son métier de journaliste. D'abord rédactrice, elle se forme aussi à celui de reporter d'images. Caméra ou stylo au poing, elle arpente le Poitou-Charentes, devient présentatrice du journal du midi à Poitiers. Avec sa collègue Patricia Périn, aujourd'hui rédactrice-en-chef adjointe à Poitiers, elle développe un module de reportage consacré à la découverte d'une petite commune de la région : Itinéraire Bis. "Elle adorait ça, se souvient Patricia Périn. On partait à l'aventure dans une commune. On y allait au culot, à la rencontre des gens." 

Itinéraire bis à Charroux (86) - Reportage de Sandrine Leclère, Julien Delage, Aurélie Grignard et Christophe Pougeas

"Elle était dans la vie comme elle était dans Itinéraire Bis : pleine de vie et bienveillante", témoigne Sandrine Papin, présentatrice du journal régional à Bordeaux. "Pour moi, Sandrine c’était d’abord un grand sourire. Elle aimait les gens, aller à leur rencontre et les écouter raconter des histoires".

À l'antenne, des moments de franche rigolade transparaissent. Après le travail, également. À l'annonce de sa disparition ce matin, l'émotion des équipes était particulièrement vive. "Je garde de très nombreux et bons souvenirs dont un, à Brive", témoigne Eric Muller, rédacteur-en-chef adjoint à Limoges : "Après une grosse journée de travail, nous avons avons fait des tours d’auto-tamponneuses (dans une fête foraine). C’était tout ça Sandrine ! Aujourd’hui je suis triste et abattu".

Maquilleuse pour les journaux télévisés à l'antenne de Poitiers de France 3, Séverine Labenère avait construit une relation amicale forte avec Sandrine. "Elle adorait son métier", dit-elle. "Je me souviens d'elle à ses débuts à France 3. Elle faisait des reportages pour la culture. Elle visait une intégration. Quand elle l'a eue (en décembre 2007), on l'a fêtée. Elle en rêvait de cette titularisation ! C'est quelqu'un qui doutait souvent. Elle avait besoin de prouver qu'elle pouvait faire..."

« Comment tu vas ? », « Qu’est-ce que t’en penses ? » 

À la rédaction, Sandrine Leclère arrivait le matin avec l'énergie d'une meneuse. "'Comment tu vas ?', 'Qu'est-ce que t'en penses ?', nous disait souvent Sandrine, le sourire aux lèvres. Elle restera toujours pour moi cette grande fille simple, sans façons, la clope électronique en main, toujours curieuse, drôle aussi, qui faisait son boulot sérieusement sans se prendre au sérieux, que ce soit à ses débuts ou quand elle est devenue notre rédactrice-en-chef à la rédaction de Limoges", témoigne Annaïck Demars, journaliste. 

À Limoges, Angélique Martinez, présentatrice du journal régional, se souvient de son "franc parler", de "ses conférences de rédaction 'les pieds à côté de ses chaussures' (qui) laissent un très grand vide depuis son départ de la rédaction et encore plus aujourd'hui. Partout où Sandrine passait, il y avait des 'artistes'. Nous étions tous ses artistes. Elle était à l'écoute et pas la dernière à rire".

"Sandrine fait partie des meilleurs professionnels que j’ai croisés tout au long de mon parcours à France 3", témoigne Franck Petit, journaliste à Limoges. "Excellente journaliste, puis encadrante hors pair. Passionnée par l’actualité et investie dans le Limousin, sa région de cœur, elle aimait faire travailler les gens ensemble. Elle a été d’un optimisme sans faille, jusqu’au bout."

Dans le Limousin, Sandrine Leclère participait aussi aux rencontres du Club de la presse qui lui rend hommage. "Comme partout où elle est passée, elle avait des idées pour bousculer les lignes. Elle était une journaliste énergique, pas « dans le moule » et très appréciée. Elle parlait franchement, et appréciait la même chose en retour", témoigne Cécile Descubes, présidente du Club de la presse du Limousin.

Dans un communiqué diffusé en fin de matinée, la ville de Limoges lui rend également hommage et se souvient de "la grande professionnelle de l’information, (de) l’enthousiasme qu’elle mettait toujours dans ses échanges et (de) l’esprit coopératif dont elle ne s’est jamais départie."

"Je garde le souvenir d'une personne unique", conclut Séverine Labenère. "Elle aimait Michaël Jackson et elle dansait le moonwalk." Séverine fait une pause puis poursuit : "Quand on se voyait en fin de semaine ou le week-end, on partageait toujours une coupe de champagne. Sandrine, c'était 'Champagne !', évidemment."

Sandrine Leclère avait 49 ans.

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