Sciences. Nouvelle découverte majeure de l'équipe du chercheur poitevin El Albani : des fossiles d'organismes planctoniques vieux de 2 milliards d'années

La découverte de fossiles vivant en flottaison dans l'eau de mer il y a 2,1 milliards d'années sur le site géologique gabonais, qu'ils explorent depuis quinze ans, constitue une nouvelle avancée majeure dans la connaissance de l'émergence de la vie multicellulaire sur Terre.

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Voilà 15 ans qu'Abderrazak El Albani explore les roches du site gabonais de la région de Franceville, et que ses découvertes ne cessent de bouleverser les connaissances scientifiques des origines de la vie sur Terre. "On s'est rendu compte en 2008 qu'il y avait des formes de vie qui n'auraient pas dû être là", se souvient-il.

Une nouvelle découverte majeure

Les dernières recherches de l'équipe internationale de douze chercheurs qu'il dirige ont mis en évidence "les plus vieux fossiles de protistes eucaryotes (les premières cellules complexes qui composent le vivant), qui vivaient dans l’eau de mer il y a 2,1 milliards d’années". Les premières traces de plancton jamais observées.

Une nouvelle découverte qui fait l'objet d'une publication ce mardi 2 mai dans la revue Earth Planetary Sciences Letter.

"Jusqu’à présent, les plus anciens protistes eucaryotes planctoniques reconnus étaient datés de 570 millions d’années. Cette nouvelle découverte met en évidence une innovation biologique qui soulève de nouvelles questions sur l’histoire de l’évolution, à savoir : des formes de vie planctonique perfectionnées existaient-elles déjà il y a 2,1 milliards d’années ?", précise le communiqué de presse du CNRS annonçant la publication.

Le rôle du zinc

Ces délicates créatures aux allures de soucoupes volantes marines, dont la taille peut atteindre 4,5 centimètres, seraient donc les premiers planctons macroscopiques à être apparus sur Terre. Un assemblage de cellules complexe et sophistiqué, qui a la particularité de comporter un enrichissement en zinc. Des analyses chimiques extrêmement pointues des fossiles ont révélé la présence, à l'intérieur du fossile, de "deux fois et demi plus de zinc que sur la roche autour", indique Abderrazak El Albani. "Le zinc, c'est un élément nutritif qui entre dans la composition des protéines et de l'ADN, c'est indispensable pour le métabolisme biologique" précise-t-il. Une présence du zinc qui distingue définitivement ces organismes des bactéries.

Des découvertes à l'encontre des dogmes

Ces fossiles ont été découverts dans le fameux gisement gabonais de Moulendé, qui avait déjà livré les plus vieux organismes multicellulaires « Gabonionta ». La date d’apparition d’une vie pluricellulaire sur Terre avait alors été reculée d’environ 1,5 milliard d’années, passant de - 600 millions à - 2,1 milliards d’années." Parler d'une vie sophistiquée, complexe, à -2,1 milliards d’années, c'était inimaginable jusque-là. Ces découvertes ont vraiment bouleversé nos connaissances sur l'apparition de la vie multicellulaire sur Terre. Et ça n'a pas été simple de le faire admettre à la communauté scientifique qui peut se montrer dogmatique. Nos résultats ont été contestés au départ", précise le chercheur."Après 15 années de production scientifique, les faits sont là, les plus rétissants s'y sont rangés et nous sommes très sollicités pour visiter nos collections à Poitiers, ou exposer nos specimens de fossiles dans les musées du monde entier" se réjouit-il.

Protéger le site par un classement au patrimoine mondial de l'Unesco

Le professeur El Albani et son équipe vont retourner au Gabon pour poursuivre leurs travaux de recherche. Ces quinze dernières années, ils en ont profité pour former une dizaine de doctorants gabonais. L'objectif aujourd'hui, c'est d'obtenir le classement définitif du site au patrimoine mondial de l'Unesco, afin de le préserver d'éventuels pillages, et de mettre ce site exceptionnel à la disposition de la communauté scientifique mondiale grâce à un comité de pilotage des programmes de recherche qui pourraient y être menés.

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