Une femme de 40 ans de nationalité nigériane est décédée au CHU de Poitiers le 17 mai dernier. Selon nos informations, la piste du féminicide n'est pas exclue. Une enquête est ouverte pour déterminer les circonstances exactes qui ont conduit à son décès. Les associations appellent à un rassemblement vendredi soir devant la mairie.
Une femme de 40 ans qui, selon les premières investigations, "se livrait à la prostitution" à Poitiers, est décédée le 17 mai dernier au CHU de Poitiers, a-t-on appris de source judiciaire.
De nationalité nigériane, elle avait été transportée par le SAMU le 12 mai dernier.
À la suite de son décès cinq jours plus tard, le parquet précise qu'un "obstacle médico-légal était posé par le médecin constatant son décès". Une enquête pour déterminer les causes de sa mort a alors été ouverte par le parquet de Poitiers.
Dans ce cadre, une autopsie réalisée le 22 mai au sein de l'Institut médico-légal (IML) n'a pas mis en évidence de "traces de lésions particulières", mais a révélé "des saignements intracrâniens qui nécessitent des analyses médicales complémentaires".
À ce jour, les circonstances précises ayant conduit à la mort de cette femme restent encore à déterminer, mais selon nos informations, la piste du féminicide n'est pas exclue.
Les services de la sûreté départementale de la Vienne et de la police judiciaire de Poitiers ont tous les deux été saisis pour poursuivre les investigations.
Demande d'asile
Selon nos informations, cette femme exerçait son activité boulevard Pont-Achard, dans le quartier de la gare de Poitiers et avait lancé des démarches de demande d'asile.
Les filles subissent des agressions et des violences verbales
Yolande MicheauAssociation AIDES
Mobilisée aux côtés des personnes prostituées à Poitiers, Yolande Micheau de l'association Aides, se souvient très bien de cette femme. "Elle voulait sortir de la prostitution. Mais sans papier, elle ne pouvait pas", témoigne-t-elle.
Quelques jours avant son admission aux Urgences du CHU, elle se souvient d'un dernier échange avec elle. "Au cours de ma dernière maraude, elle m'avait dit que des personnes à scooter s'attaquaient à elles, mais aussi aux clients. Ils en profitaient pour leur voler leurs sacs, leur argent. Les filles subissent des agressions et des violences verbales."
Quelle verbalisation des clients ?
Ancienne députée socialiste de la Vienne et ancienne présidente de la délégation du droit des femmes à l'Assemblée nationale, Catherine Coutelle est l'auteure de la loi du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées à travers un parcours de sortie de la prostitution.
La loi de 2016 est appliquée, mais pas suffisamment.
Catherine CoutelleAncienne députée socialiste de la Vienne
L'ancienne députée estime que sa loi est, certes, "appliquée, mais pas suffisamment".
La préfecture de la Vienne indique que "la prévention et la lutte contre la prostitution constituent toujours une préoccupation des politiques publiques de l'État" et met en avant les parcours de sortie de la prostitution : 17 dans la Vienne, le nombre le plus élevé en Nouvelle-Aquitaine qui en comptabilise 93, en tout, depuis 2016.
La loi de 2016 prévoit également de pénaliser le client en interdisant tout achat d'acte sexuel. "Il n'y a pas de politique volontaire (sur ce sujet, NDLR)", ajoute l'ancienne députée. "Quand vous êtes souteneur, une femme vous rapporte pendant une vingtaine d'années ! Elle vous rapporte plus que de la drogue", dénonce-t-elle.
À ce jour, nos demandes de renseignements quant au nombre de contraventions dressées auprès de clients de la prostitution sont restées sans réponse.
Les associations de soutien aux droits des femmes appellent à un rassemblement vendredi 26 mai à 18 h, devant la mairie de Poitiers.