Au dernier jour de son 50ème congrès à Toulouse, la CGT tourne la page Bernard Thibault et confie les rênes à Thierry Lepaon dans un contexte difficile de crise sociale et de confrontation avec le gouvernement socialiste sur l'accord emploi
Thierry Lepaon, 53 ans, ex-salarié de Moulinex, a été officiellement élu vendredi secrétaire général de la CGT, au congrès de Toulouse, succédant à Bernard Thibault qui a dirigé le premier syndicat français pendant 14 ans.
Thierry Lepaon est le sixième secrétaire général de la CGT depuis la dernière scission de 1947. Il a été élu en marge du 50e congrès à Toulouse par le Comité confédéral national (CCN, parlement) qui l'avait déjà désigné en novembre dernier au terme d'une crise de succession de plusieurs mois.
Le CCN a élu également un bureau confédéral paritaire (direction resserrée) de dix membres et qui inclut des protagonistes de la bataille de succession l'an dernier, notamment Eric Aubin.
Thierry Lepaon qui présidait le groupe CGT au Conseil économique, social et environnemental (Cese), s'était fait connaître dans la lutte pour la défense des salariés de Moulinex début 2000. Il a été aussi secrétaire général du comité régional CGT de Normandie.
Depuis la dernière scission, en 1947, qui vit la naissance de FO, la CGT a été dirigée successivement par Benoît Frachon (1948-1967), Georges Séguy (1967-1982), Henri Krasucki (1982-1992), Louis Viannet (1992-1998) et Bernard Thibault depuis 1999.
Pendant cinq jours les quelque mille délégués, dont 80% participaient pour la première fois à un Congrès de leur syndicat, ont débattu parfois dans le chahut et des griefs adressés à la direction, l'orientation pour les trois prochaines années.
Un point a fait l'unanimité: le refus du projet de loi sur la sécurisation de l'emploi. Le nouveau dirigeant de la CGT a annoncé une nouvelle mobilisation début avril contre ce projet.
Les critiques ont été parfois violentes contre la CFDT, qualifiée de "traître" par des militants pour avoir signé l'accord "scélérat" sur l'emploi, et la direction a dû mettre tout son poids dans la balance pour défendre sa stratégie d'unité syndicale.
Finalement, le document bilan des dernières années et l'orientation prônée par la direction ont été adoptés à plus de 80%.
"Ce ne sont pas les décibels qui fixent l'orientation mais le vote" des délégués", a lancé M. Thibault qui s'est targué de la confiance ainsi manifestée par la base. La crise de succession qui a secoué la centrale en 2012 est résorbée: une nouvelle
direction de 56 membres, autant d'hommes que de femmes, a été élue jeudi soir par les congressistes. Renouvelée à 40%, elle inclut toutefois les protagonistes de la bataille.
Vendredi matin, le Comité confédéral national (CCN), le tout puissant parlement de la CGT, a donc officialisé l'élection de Thierry Lepaon,
Au terme de quatre mandats, Bernard Thibault laisse en héritage une CGT réformée, débarrassée de l'emprise du PCF, qui préserve son rang de premier syndicat français. Mais son talon d'Achille reste sa difficulté à recruter de nouveaux adhérents, même si les effectifs se sont redressés légèrement à 692.000. Cette arlésienne a été été au coeur des débats du Congrès et des efforts sont demandés aux militants pour aller vers les salariés, en particulier ceux des petites entreprises, des jeunes et des précaires.
Le reportage de Pascale Lagorce et de Jack Lévé :