Le XV de France a sévèrement chaviré dès le premier de ses trois test-matches contre l'Australie (50-23) samedi à Brisbane, et devra se gratter la tête pour enrayer sa dérive vers les abysses.
Panique à bord: le XV de France a pris des airs de vaisseau-fantôme pour son entrée en matière contre les Wallabies. Surclassés dans tous les compartiments de jeu, les Bleus doivent se souvenir avec mélancolie du temps - pourtant pas si lointain - où ils infligeaient une leçon (33-6) aux hommes en jaune un soir de novembre 2012 au Stade de France.
Empruntés, jouant en pagaille et la peur au ventre, les hommes de Philippe Saint-André n'ont jamais renoué le fil d'une partie qui leur a totalement échappé. Il faudra sans doute plaider l'accident industriel, version catastrophe de Bhopal, pour éviter d'hypothéquer le reste de cette tournée de juin qui pourrait se transformer en chemin de croix.
Mais à 15 mois du Mondial en Angleterre, se dessine en filigrane l'urgence d'enclencher une dynamique de victoires pour ce XV de France incapable de prendre le meilleur, si ce n'est très ponctuellement, sur les trois grandes nations du sud.
Certes les Australiens, repris fermement en mains par Ewen McKenzie il y a un an, voguaient sur une probante série de quatre victoires d'affilée acquises en novembre en Europe. Mais, pour leur premier match de la saison, ils n'ont guère eu besoin de forcer leur talent. Ils se lancent en tous cas parfaitement pour cette campagne 2014 sous le signe de la rédemption, après avoir entamé 2011 (Samoa), 2012 (Ecosse) et 2013 (Lions britanniques) par une défaite.
On attend donc avec appréhension leur montée en puissance programmée sur les prochaines semaines, avec un test à Melbourne le 14 juin, puis à Sydney le 21 juin.
Meilleurs dans les duels, plus puissants, systématiquement en surnombre sur les extérieurs et jamais gênés par la défense inversée à bout de souffle des Français, les Wallabies ont par moment donné l'impression d'effectuer une joyeuse répétition avant leur Four Nations qui débutera en août.
Si lumière il devait y avoir dans une semaine à Melbourne, peut-être viendra-t-elle de l'intégration des finalistes du Top 14 - Bastareaud au centre, Tales à l'ouverture, Dulin à l'arrière - et le retour de blessure du capitaine Thierry Dusautoir, encore trop juste ce samedi.
Mais le mal est d'abord venu samedi du manque cruel de maîtrise collective des Bleus, dans la gestion des temps faibles et forts. Ceux-ci avaient pourtant attaqué le match avec de jolies intentions...feu de paille.
Réaction tardive
Les Australiens ne tardèrent pas à étaler crânement leur confiance, en allant chercher une pénal-touche, plutôt qu'une pénalité facile entre les poteaux, dès la 18e minute, alors que le score était coincé à 3-3.
Belle inspiration: sur le lancement de jeu, Israel Folau aplatissait en bout de ligne et ouvrait un long et douloureux festin pour les Français.
Le reste: une litanie de célébrations jaunes et vertes dans l'en-but des Bleus. Adam Ashley-Cooper (24), Michael Hooper (33) et Matt Tomua (39) permettaient aux Wallabies de rallier la pause avec la quasi-assurance du match gagné (29-9)
Côté Français, Frédéric Michalak, d'un drop et deux pénalités, n'entretenaient que très vaguement l'espoir d'une remontée.
Restés tranquillement en cercle sur le terrain à la mi-temps, en attendant des Français rentrés aux vestiaires puiser on ne sait quelle énergie du désespoir, les Wallabies poursuivirent leur effort peu avant l'heure de jeu par un essai du "Honey Badger" Nick Cummins.
Les vannes de nouveau ouvertes, Kurley Beale (68) et Pat McCabe (70) forcaient le trait de la déroute.
Une timide réaction en fin de match, concrétisée par un essai de Morgan Parra puis un autre de pénalité derrière une mêlée conquérante, permettait au moins aux Bleus de ramener la jauge à 27 points d'écart. Soit à quelques encablures de la correction reçue en France en novembre 2010 (59-16). C'est déjà ça.