Pour faire des économies, la direction de la maison d'arrêt de Carcassonne est accusée de couper le chauffage la nuit entre 23 heures et 5 heures du matin. Des chauffages d'appoint devraient être mis à disposition des surveillants... mais pas des détenus.
« Je suis frigorifié. J’ai l’impression qu’il fait plus froid en cellule que dans la cour de promenade. Le froid nous réveille la nuit, c’est très dur » témoigne l’un des détenus de la prison de Carcassonne auprès de France 3 Occitanie.
En cause, les coupures de chauffage entre 23 heures et 5 heures toutes les nuits, dont est accusée la direction de cette maison d'arrêt. Celle-ci n’a pas souhaité s'exprimer sur le sujet.
« Nous appliquons les consignes d’énergie » explique un des surveillants pénitentiaires, Jean-Pierre Limarola, sans plus de précisions.
"Ce problème n'existait pas l'année dernière"
Selon ce représentant du syndicat pénitentiaire des surveillants (SPS), il n'existe pas de solution alternative pour diminuer le chauffage sans le couper complètement.
La chaudière que nous avons ne permet pas de régler la température.
Jean-Pierre LimarolaSurveillant pénitentiaire à la prison de Carcassonne Représentant syndical SPS
Cette décision de couper le chauffage la nuit serait récente. « Il est certain qu'il n'y avait pas ce problème l'année dernière » atteste Yohann Verschelle, qui exerce comme surveillant pénitentiaire depuis 2017 à la maison d'arrêt de Carcassonne.
Ce dernier dit avoir eu connaissance de ces coupures il y a seulement quelques jours. « Des détenus nous ont demandé si il y avait des problèmes avec la chaudière. J'ai demandé à la direction et c'est là que j'ai appris qu'il y avait des coupures la nuit » affirme ce représentant syndical de FO Justice.
Mauvaise isolation, manque de couverture...
La prison de Carcassonne fait partie des plus vieilles de France. Elle a été construite en 1898. « Elle est très mal isolée. Dans les cellules, ce sont majoritairement des fenêtres à simple vitrage et beaucoup sont cassées » nous décrit Yohann Verschelle.
Pour se chauffer, un « double tuyau de circulation d'eau chaude qui passe sous la fenêtre » traverse chaque cellule. « C'est même pas un vrai chauffage » précise l'un des détenus qui a accepté de témoigner de façon anonyme.
Autre problème : celui de la surpopulation. A Carcassonne, la densité carcérale est estimée supérieure à 220%. Il en découle logiquement un manque de matériel, tous les détenus ne peuvent pas disposer de couvertures la nuit.
On a des couvertures marrons type SNCF à donner mais on fait comme on peut car on a pas de grosses capacités de stockage et c'est long pour se réapprovisionner.
Yohann VerschelleSurveillant pénitentiaire à la prison de Carcassonne Représentant syndical FO Justice
Il convient de rappeler que les matelas des prisonniers sont situés à même le sol, facteur de froid supplémentaire.
Selon les témoignages récoltés, les détenus seraient par ailleurs contraints d'aérer régulièrement leur cellule si ils veulent éviter que de la moisissure se développe, faute d'un système suffisant pour ventiler la douche.
"Peu de différence avec la température de l'extérieur"
Difficile d'estimer quelle est la température réelle dans la prison de Carcassonne. Pour le surveillant Yohann Verschelle, il est certain qu'il fait moins de 15°C. Il estime même que « des fois il ne doit pas y avoir une grande différence avec la température de l'extérieur ».
Suite à ce constat, Yohann Verschelle a discuté avec la direction et a obtenu le droit d'avoir quelques chauffages d'appoints, seulement pour les surveillants.
Pour le moment, le problème semble seulement concerner la prison de Carcassonne. Mais selon l'auteur du compte Twitter @Syndicat des détenu(e) de France qui a lancé l'alerte, la problématique pourrait toucher l'ensemble des prisons de la métropole.
« Ca ne m’étonnerait pas que cela existe dans d’autres prisons mais c’est la 1ère fois que j’entends parler d’une coupure de chauffage la nuit » explique ce journaliste anonyme qui s'est spécialisé sur les questions de détention.