Au Grau-du-Roi, près de la plage de l'Espiguette, un stock d'hydrocarbures vieux de 50 ans

Dans le Gard, au coeur d'un site naturel protégé, il y a un dépôt d'hydrocarbures totalement méconnu . Et il est là depuis la Guerre froide. Il est aujourd'hui visé par des procédures lancées par des défenseurs de la zone.

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Il est situé à 500 mètres à peine de la plage de l'Espiguette, une des plus belles de Méditerranée. Ce dépôt d'hydrocarbures classé Seveso seuil haut, date de la Guerre froide et il est largement méconnu.  

Des hydrocarbures ici, sur un site naturel aussi exceptionnel? Mais ce serait une aberration !

Michèle Tavernier, une sexagénaire habituée du Grau-du-Roi, la commune dont dépend la plage, n'en revient pas. Elle se promène souvent dans les dunes avec ses petits-enfants, sans savoir qu'ils se trouvent à quelques centaines de mètres du dépôt d'hydrocarbures.

Il s'agit de 6 cuves semi-enterrées à enveloppe simple de 11.000 m3 chacune, dont la construction a été décidée en 1954.


Peu ou pas d'information de la population 


C'est en participant à une enquête publique en 2015 sur ce dépôt vieillissant que certains habitants de la région ont appris sa présence de ces cuves, raconte Virginie Richon, de l'association "Comité d'alerte pour l'Espiguette" (Cape), formée dans la foulée.

La population le pensait inactif ou ignorait même son existence! Ce dossier est bien sûr gênant pour la notoriété et l'économie de la commune. A nos yeux il est très grave d'engager la sécurité  et santé des personnes et de faire fi de l'environnement.
 

Pourtant le dépôt échappe très largement à la compétence du Grau-du-Roi et de son maire Robert Crauste (DVG), la ville semblant surtout redouter des effets négatifs sur le tourisme alors que des milliers de personnes fréquentent chaque jour l'Espiguette en période estivale.

Les installations du dépôt s'étendent sur une vingtaine d'hectares de terrain grillagé au sein de cet écosystème fragile.


Un vestige de l'histoire mondiale


Elles ont été mises en service en 1962 et font partie d'un réseau d'oléoducs et de dépôts d'hydrocarbures de l'Organisation du Traité de l'Atlantique nord (Otan), baptisé Central Europe Pipeline System, présent en Belgique, aux Pays-Bas, en Allemagne, au Luxembourg et en France.

Géré par le Service national des Oléoducs interalliés (SNOI), placé sous la double tutelle du ministère de la Défense et du ministère de l'Environnement, le site reçoit, expédie et stocke notamment des carburéacteurs Jet A1, un liquide hautement inflammable.

Le dépôt était à l'origine alimenté par un sea-line depuis une bouée située au large du Grau-du-Roi, abandonné en 1983 au profit d'un pipe-line le reliant à la station de pompage haute pression de Noves (Bouches-du-Rhône).

Depuis l'abandon de son approvisionnement par la mer, "plus rien ne justifie une telle installation dans ce site naturel aussi sensible", estime Cape.

La préfecture du Gard assure que toutes les mesures de sécurité nécessaires ont été prises.


Des recours déposés contre des arrêtés préfectoraux et ministériels


Mais l'association ne désarme pas. Avec l'aide de l'avocate spécialiste des dossiers environnementaux et sanitaires Me Marie-Odile Bertella-Geffroy, elle a déposé 2 recours devant le tribunal administratif de Nîmes contre un arrêté préfectoral de mai 2016 dispensant de Plan particulier d'intervention (PPI) et contre l'arrêté du ministre de la Défense du 11 avril 2016 autorisant la poursuite du fonctionnement du dépôt, qui fait l'objet d'un Plan de prévention des risques technologiques (PPRT).

Dans ce dernier recours datant du 10 avril, dont l'AFP a obtenu copie, Me Bertella-Geffroy met l'accent sur le "caractère insuffisant de l'information délivrée au public" et des "données environnementales".

Le dossier de demande d'autorisation ignore totalement les milliers d'estivants fréquentant la plage de l'Espiguette alors que ceux-ci peuvent se trouver cependant à 500 mètres de l'exploitation.

Le recours évoque notamment au moins une fuite d'hydrocarbure qui s'est produite en 1990 et s'inquiète de l'évolution de la côte, dans une zone soumise à une forte érosion.

Selon le texte du recours formé par Cape, "la zone cumule donc des facteurs de risques considérables", notamment en cas d'"incendie ou accident dans le dépôt d'hydrocarbures" et de "fréquentation en nombre de la plage", alors qu'il existe une unique "voie d'accès (par la route) pour les services de secours et d'évacuation pour les blessés et le public".

La seule façon d'assurer la sécurité des personnes et de préserver l'environnement est de minimiser les facteurs de risque et de procéder à la fermeture du dépôt d'hydrocarbure

Ce recours a peu de chance d'aboutir face au ministère de la Défense mais vise à informer.

Possédant l'un des massifs dunaires les plus remarquables et les plus fragiles du littoral méditerranéen, l'Espiguette est un site classé, notamment Natura 2000 et Zone naturelle d'intérêt écologique, floristique et faunistique, appartenant au "Grand site" de la Camargue gardoise.

Une centaine d'espèces d'oiseaux et 25 espèces végétales rares et protégées ainsi que des dunes mobiles de type saharien (Barkhanes), rarissimes en Europe, y sont présentes.

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