Une association de collectionneurs de cyclomoteurs Solex de Tavel, dans le Gard, attaque devant le Conseil d'État un récent décret imposant un contrôle technique sur leurs véhicules. Ils craignent de voir leurs cyclomoteurs, souvent construits avant les années 1960, inaptes à passer le contrôle, ce qui pourrait "tuer la collection".
"On a peur de perdre une partie de notre patrimoine", lance Yannick Miras, président de l'association Tavelosolex, à Tavel dans le Gard, qui rassemble des collectionneurs des mythiques cyclomoteurs de la marque Solex.
La raison de cette peur, c'est un décret du 23 octobre 2023, signé par la Première ministre, qui impose, pour des raisons de sécurité routière, un contrôle technique à une nouvelle catégorie de véhicules : les deux-roues de cylindrée inférieure à 125 cm3. Ainsi, les propriétaires de cyclomoteurs Solex devront désormais passer en contrôle technique chez un garagiste s'ils veulent continuer à utiliser leur deux-roues sur les routes des villes. Le décret doit entrer en application avant la fin du mois de décembre.
Or, les "Solex" qui peuplent les garages des membres de l'association sont des véhicules "de collection", argumente Yannick Miras. La plupart d'entre eux sont antérieurs aux années 1960 et seraient bien incapables de convenir aux critères d'un contrôle technique. "Un de mes Solex freine avec des patins", illustre le président d'association : "On risque d'être entaillés dans la collection si on doit faire le contrôle technique des véhicules. On a peur que des collectionneurs évacuent leur véhicule".
"Ça fait partie de notre patrimoine, le Solex."
Yannick Miras, président de Tavelosolexà France 3 Occitanie
Et pour les membres de Tavelosolex, ce serait la fin d'une époque. L'association qui restaure les anciens Solex organise aussi des visites des vignobles gardois en cyclomoteurs. "On a fait découvrir le Solex à beaucoup de personnes et des anciens sont heureux de les revoir rouler. On retape, on restaure et on remet les machines sur les routes. Ça fait partie de notre patrimoine, le Solex", déclare son président.
"Tuer la collection"
Les règles de l'Union européenne exigent bien le contrôle technique des deux-roues, mais seulement pour ceux de cylindrée supérieure à 125 cm³. L'association Tavelosolex porte donc recours en excès de pouvoir contre le gouvernement français. "Le législateur national a entendu aller au-delà de ce que lui imposait ses obligations européennes communautaires et ce sans qu’aucun élément ne puisse justifier de la fixation de ces règles", avance le recours de Tavelosolex transmis à la juridiction administrative.
"On va tuer la collection, un petit plaisir qui ne coute pas cher", déplore Maître Alexandre Coque, l'avocat de Tavelosolex, qui plaidera devant le Conseil d'État. Il dit vouloir "poser une question d'ordre citoyen" en attaquant sur le décret sur le fond : "Est-ce que les cyclomoteurs sont dangereux ?", demande-t-il. Et l'avocat ironise : "C'est pas avec ça qu'on fera un rodéo urbain !" "On fait du recyclage, la consommation est faible et le but, c'est d'avoir un faible impact sur environnement", ajoute Yannick Miras.
"On va tuer la collection, un petit plaisir qui ne coûte pas cher."
Maître Alexandre Coque, avocat de Tavelosolexà France 3 Occitanie
"Avec ce contrôle technique, soit on fabrique juste une formalité et c'est du racket, soit on est en train d'aligner le régime des cyclomoteurs sur celui des voitures de collection", abonde l'avocat, qui déplore l'absence de distinguo entre des véhicules qui méritent différents régimes face au contrôle technique.
L'audience devant les juges administratifs devrait avoir lieu "d'ici deux ans", informe l'avocat de l'association. Il espère que, d'ici là, le gouvernement "reviendra à la raison" concernant les cyclomoteurs.