De nombreux utilisateurs du site de réservations Airbnb, parmi eux des clients de Toulouse, font part sur la toile de leurs déboires lorsqu’ils ont dû annuler leur réservation pour cause de reconfinement. Un groupe a été créé sur Facebook pour dénoncer ces pratiques qu'ils ne cautionnent pas.
Prendre le large et aller passer un moment en famille à Marrakech, c’était le plan initial de François, habitant de Haute-Garonne. Ce jeune "grand-père de 56 ans" comptait y réunir la tribu en avril 2020. Un premier confinement, un second, un troisième…. Au gré des confinements qui s'enchaînent, le séjour familial au Maroc s’est transformé, un an plus tard, en une location de maison dans l’Aude, près de Gruissan, pour la dernière semaine d’avril. Une semaine de vacances scolaires posée par toute la famille bien en amont.
C’était sans compter un décalage de dates des vacances scolaires couplé à un reconfinement. François est contraint d’annuler, ce déplacement n’étant pas possible avec le confinement et la règle des 10 km. Mais les choses s'avèrent plus compliquées que ce qu'il imaginait : "Naïvement, j’ai pensé que c’était un cas de force majeure et que je serais remboursé à 100 %, que nenni ! À la première vague, Airbnb a remboursé tout le monde, cela a eu un gros coût et cette fois Airbnb se cache derrière les propriétaires qui choisissent leurs propres conditions d’annulation".
Depuis le premier confinement, Airbnb a modifié sa politique d'annulation
Airbnb a en effet ajouté à ses conditions générales une mention « pour les réservations après le 14 mars 2020 » qui exclut le cas de force majeure si l’annulation est liée à un reconfinement par exemple : "Les réservations de logements et d'expériences Airbnb effectuées après le 14 mars 2020 ne sont pas couvertes par la Politique relative aux cas de force majeure, sauf si le voyageur ou l'hôte est actuellement malade du COVID-19. Les circonstances liées au COVID-19 suivantes ne sont pas couvertes (...) Notre Politique relative aux cas de force majeure vise à protéger les voyageurs et les hôtes contre les imprévus survenant après la réservation. Maintenant que le COVID-19 a été déclaré pandémie mondiale par l'Organisation mondiale de la santé, la Politique relative aux cas de force majeure ne s'applique plus parce que le COVID-19 et ses conséquences ne sont plus imprévus ni inattendus". Rares sont ceux qui lisent les conditions générales et politiques d'annulation des sites de A à Z, se pensant peut-être aussi couverts par le caractère exceptionnel de la situation sanitaire actuelle.
« Le Covid m’a piégé trois fois » ironise François. Et pourtant, il reconnaît avoir eu de la chance. Il raconte son "chemin de croix avec Airbnb qui refusait catégoriquement de rembourser au départ ou de décaler le séjour" Finalement sur les 1000 € déboursés, il aura perdu 464 €, c’est-à-dire 50 % du montant dû, "moins la centaine d’euros de frais que se garde Airbnb". Il indique que la médiatisation sur internet d'avis négatifs a joué favorablement dans son cas : "quand l’hôte a vu qu’il commençait à y avoir des publications sur les réseaux sociaux, il a finalement accepté de décaler le séjour. Comme nous devons tous reposer des congés, ce sera pour avril 2022"
Un groupe Facebook pour obtenir les remboursements
Si François, l'utilisateur toulousain de Airbnb, s'en est plutôt bien sorti, il souhaite que son expérience, loin d'être un cas isolé, serve. "Aujourd’hui mon combat est contre les pratiques d’Airbnb. Airbnb plateforme de mise en relation de particulier à particulier, c’était au tout début ! Ce sont souvent des professionnels, mon hôte gère une dizaine d’appartements en Occitanie. Et il faut aussi noter que les règles sanitaires ne peuvent pas être respectées comme dans un hôtel. »
Pour faire remonter plus facilement ces expériences malencontreuses, le groupe Facebook « collectif remboursement Airbnb » a été créé. Une sorte de page de doléances sur laquelle 1200 personnes ont déjà fait part de leur mésaventure. Obtenir les remboursements demandés et dénoncer des pratiques jugées non acceptables, voilà le but de ce collectif. Une avocate parisienne défend les dossiers qui lui seront présentés moyennant une trentaine d'euros par dossier et un pourcentage sur les gains.
Marine et ses amies feront peut-être également appel aux services de cette avocate. Pendant ces vacances d’avril, la jeune femme de 34 ans devait participer à l' "EVJF" (enterrement de vie de jeune fille) de son amie Fiona. Initialement, la destination retenue était le Portugal. Même cause, mêmes conséquences, point de Portugal, la joyeuse petite troupe se rabat sur un Airbnb à Saint-Laurent-sous-Coiron, en Ardèche, pour un long week-end pendant les vacances scolaires car beaucoup d’entre eux travaillent dans l’éducation nationale. Pas de déplacement possible, nécessité d’annuler. Un premier échange avec l’hôte, par mail uniquement via la plateforme.
On nous a proposé d’annuler cette réservation et de réserver sur une autre date en cochant bien la case annulation de séjour, ce qui équivaut à une fraude à l’assurance, nous avons refusé cela !
Marine et ses amies auraient donc dû « faire preuve de créativité ». Et la réponse du site Airbnb n’a pas dû apaiser leur colère : « Ce n’est pas honnête de la part de votre hôte, dénoncez-le mais 50 % du montant de votre réservation sera quand même retenu. L’hôte vous doit la mise à disposition du lieu mais n’est pas concerné ou responsable du reste. » Sur une location à 3000 €, une perte de 1700 €, pour un évènement qui n’a pas eu lieu.
Marine fait part de sa grosse déception et de son écoeurement : "Airbnb profite du fait que le Covid-19 ait été déclaré pandémie et que la situation est désormais connue et reconnue, le cas de force majeure ne s’applique plus. » Elle ajoute : Ce qui nous ulcère, par ailleurs, c’est que l’hôte est un professionnel. Il a des tas de villas partout dans le monde. Il vit d’ailleurs en Afrique. Du personnel s’occupe de ces villas, de l’accueil, ce n’est plus du particulier à particulier, c’est un business. Ces gens-là peuvent continuer à travailler alors que les hôtels sont fermés depuis un an quasiment, ce n’est pas équitable ».
Ce qui est rageant, c’est que chacun se renvoie la balle. Airbnb se cache derrière les conditions d’annulation favorables aux hôtes. Et nous sommes les perdants !
François, Marine, Fiona, ils sont nombreux en ligne à vider leur sac et à raconter leur expérience avec le site. Les retours sur la toile des personnes qui ont pris le soin de rédiger un avis sont assez parlants. Leur retour d'expérience n'est globalement pas positif.
Entre écoeurement et volonté d’aller au bout de leur démarche, certains vont jusqu’à appeler au boycott de la plateforme de réservation.
Le site Airbnb, quant à lui, surfe sur la vague de la campagne qui a le vent en poupe. Le site a en effet conclu un partenariat avec les maires des communes rurales de France. 100 euros seront versés pour chaque nouvelle annonce publiée dans une commune rurale.