École à la maison : l’académie de Toulouse accusée de refuser massivement les demandes

Avec la loi du 24 août 2021, les parents souhaitant faire l’école à la maison sont obligés d’en faire la demande auprès du rectorat. Mais face au flou de cette loi, de grandes disparités existent d’une académie à l’autre. Toulouse aurait le taux de refus le plus élevé d’après les associations de parents.

Mathilde n’a jamais été du genre rebelle, mais depuis ce jeudi 1er septembre, elle est hors la loi.

La raison ? Elle fait l’école à la maison. Pourtant, cela fait deux ans que Mathilde et son conjoint s’occupent de l’instruction de leurs enfants à domicile. Depuis les 3 ans de leur aîné, Owen. “C’était son choix, il n’en a jamais démordu et nous l’avons respecté”, indique la maman. Les parents font les choses dans les règles et déclarent leur enfant comme étant scolarisé à domicile. Ils reçoivent une visite d’un représentant de la mairie ainsi que chaque année, celle d’un inspecteur de l’Éducation nationale. “Son dernier rapport rend compte d’un environnement sécurisant pour une instruction riche et variée”, ajoute-t-elle. “Nous ne nous sommes donc pas inquiétés lorsque nous avons fait la demande pour notre cadette qui va bientôt avoir 3 ans.” Mais cette nouvelle demande est refusée. Owen peut rester à la maison mais sa sœur Livia doit faire sa rentrée scolaire à l’école. Car entre-temps, la loi a changé.

Une loi aux critères flous

Depuis le 24 août 2021 et la loi “séparatisme”, les règles concernant l’instruction à domicile ont changé. Une déclaration suivie d’une inspection ne suffit plus. Les familles doivent désormais effectuer une demande auprès du rectorat, une demande motivée par l’un des 4 motifs acceptés : pour raison de santé, afin de permettre une pratique artistique ou sportive intensive, à cause d’une vie en itinérance ou trop loin d’un établissement scolaire, ou enfin, par la présence d’une situation propre à l’enfant motivée par un projet éducatif. Le régime d’autorisation se substitue au régime déclaratif. 

A l'échelle nationale, nous avons 53% de réponses positives au titre (du critère) 4. Là où nous pêchons au niveau du ministère, c'est qu'il y a des écarts très forts et des contrastes très forts entre académies et départements quant aux réponses qui sont fournies. Dans certains départements, c'est un non massif. Dans d'autres, les services académiques fournissent des réponses plus ouvertes et donc nous devons absolument équilibrer les choses à l'échelle du pays.

Pap Ndiaye, ministre de l'Éducation nationale

Problème : le 4e motif est assez flou et n’est pas interprété de la même façon selon les académies. Face à cette situation, la Coopli (Coordination pour la liberté de l’instruction) a réalisé une enquête auprès des familles affiliées aux associations de parents d’enfants scolarisés à domicile. Les résultats révèlent un refus pour près de la moitié des demandes (46,6%). Une chiffre qui dépasse les 50% sur l’académie de Toulouse. “Sur toutes les demandes de motif 4, il y a eu moins de 5 dossiers acceptés sur Toulouse, c’est l’une des académies les plus difficiles”, déplore Marina Souagnet, de l’association Nonsc’Ô Toulouse.

 

Des informations démenties par le recteur d’académie. “Il y a différents critères d’acceptation et nous avons accepté plus de 80% des demandes contrairement à ce qui peut se raconter ici ou là”, oppose Mostafa Fourar. “Simplement, certaines demandes relevaient du motif 4, c’est-à-dire un projet lié à la situation particulière de l’enfant, là nous avons une forte demande pour des enfants âgés de 3 ans. On voit bien que pour certaines familles, ça peut être un levier pour éviter l’obligation de scolarité à 3 ans et nous sommes là pour appliquer la loi.”

Des recours déposés devant le tribunal administratif

Nombreuses sont les familles concernées par ces refus à avoir déposé un recours devant le tribunal administratif. Mais pour Mathilde et sa fille Livia, la décision n’a pas été rendue en leur faveur. “Nous nous retrouvons face à deux possibilités : aller à l’encontre de l’intérêt et le bien-être de notre fille ou entrer en désobéissance civile.” La famille a tranché : ce sera la désobéissance civile. 

Il y a le cadre de la loi et il y a l’interprétation de la loi. Nous sommes dans une situation nouvelle puisque la loi a été votée récemment et son application est pour cette rentrée. Donc forcément les appréciations peuvent être différentes. Nous sommes en démocratie, les parents qui ne sont pas satisfaits de la décision administrative peuvent bien évidement faire un recours au tribunal administratif et c’est le juge qui va nous guider dans l’examen des dossiers à venir.

Mostafa Fourar, recteur de l'académie de Toulouse

Une situation subie aujourd’hui par plusieurs familles en Occitanie. “Tout le monde est parfaitement conscient que l’instruction en famille n’est un risque ni pour notre société, ni pour les enfants, alors que les scandales ne cessent dans l’Éducation nationale (harcèlement scolaire, pénurie d’enseignants”, s’indigne Marina Soulagnet de l’association Nonsc’Ô Toulouse. “Pourquoi interdire à ces familles ce choix de vie, alors que ce sont des familles déjà contrôlées ? Pourquoi vouloir faire disparaitre la liberté d'instruction ?”

Pour protester, les familles sont appelées à manifester le 15 septembre prochain. Le rendez-vous est donné à Toulouse, à 14h à la Prairie des filtres.

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