Il a vécu le "derby de la Garonne" des deux côtés, au TFC puis avec les Girondins de Bordeaux, pendant les années 90 : pour l'attaquant Anthony Bancarel, la rivalité entre les 2 clubs et les 2 villes a sa source dans "une opposition de styles".
Ce mercredi 10 février à 14H45, le Toulouse Football Club et les Girondins de Bordeaux s'affrontent en 32ème de finale de la Coupe de France : ce match sera diffusé en direct sur les antennes de France 3 Occitanie et de France 3 Aquitaine. Rencontre avec un spectateur avisé de ce derby : un certain Anthony Bancarel.
Né à Millau (Aveyron) il y a bientôt 50 ans, Anthony Bancarel a naturellement choisi le TFC (Toulouse Football Club) pour faire ses premières armes. Il y a débuté en équipes de jeunes : en cadets, par exemple, il a joué aux côtés d'un certain Fabien Barthez. Au fil des années Anthony a gravi les échelons, jusqu'à passer professionnel : en cinq saisons disputées avec l'équipe première des Violets, cet attaquant de vocation a marqué 26 buts en 108 matches avant d'être transféré... aux Girondins de Bordeaux.
Il a évolué pendant trois saisons au sein du club Marine-et-Blanc, avec lequel il a marqué 19 buts en 84 matches.
Depuis sa retraite sportive, Anthony Bancarel a intégré le staff du centre de formation, au sein duquel il supervise les attaquants. Pour avoir vécu le "derby de la Garonne" des deux côtés, il était le plus à même de parler du ressenti que procurent ces duels particuliers à Toulouse comme à Bordeaux. Entretien.
France 3 Occitanie : quelles sont les différences entre ces deux équipes du Sud-Ouest ?
Anthony Bancarel : Au niveau de l'identité, Toulouse c'est une ville étudiante, la plus "espagnole" du Sud-Ouest, avec sa population chaleureuse. Bordeaux ce n'est pas le même standing : une ville plus "bourgeoise", plus riche, où l'accueil est plus froid.
Cela se ressent au niveau des clubs : les Girondins font partie des "grands" du football français, ils ont un tout autre palmarès que le Tèf. Les encadrants y sont nombreux, tous tournés vers la performance. J'y ai acquis des "ficelles du métier", une expérience qui me sert encore aujourd'hui au sein du centre de formation de Toulouse.
Au niveau de la population aussi c'est différent : les Bordelais et les supporters des Girondins ne vivent pas avec autant de passion ces fameux "derbys de la Garonne" que les Toulousains.
France 3 Occitanie : comment qualifierais tu la rivalité entre les deux clubs ?
Anthony Bancarel : Les matches entre le TFC et les Girondins de Bordeaux, ça commence avec les équipes de jeunes : c'est sur ce socle que se bâtit la rivalité sur le terrain, même si au fil des années, entre joueurs on finit souvent par devenir amis.
La différence c'est que beaucoup de générations de joueurs à Toulouse se sont appuyées sur les jeunes issus du centre de formation : c'est beaucoup moins le cas à Bordeaux, un club qui a beaucoup plus de moyens pour recruter des joueurs grâce aux transferts.
Cela dit je me souviens qu'une année où les 2 équipes étaient qualifiées en Coupe d'Europe. Le président bordelais Claude Bez avait fait escale à Toulouse avec son avion, pour prendre le président Marcel Delsol au passage, en se rendant sur le lieu du tirage au sort de l'épreuve : un geste empreint d'élégance, qui montre que l'appartenance à notre Sud-Ouest crée un lien particulier entre les deux clubs.
France 3 Occitanie : comment vivais tu ces "derbys de la Garonne" ?
Anthony Bancarel : le "derby de la Garonne", je ne l'ai connu que dans un sens : sous le maillot du TFC entre 1990 et 1994, en1ère Division ; avec Bordeaux je n'ai jamais vécu ces matches du point de vue opposé puisque Toulouse était redescendu en 2ème Division à l'époque.
La différence de standing n'a pas empêché que le TFC a battu les Girondins à plusieurs reprises ces années-là, et parfois nettement : je me souviens qu'en 1993, lors de la 36ème journée de championnat, j'ai marqué le but le plus rapide de l'histoire du "derby de la Garonne", à la 10ème seconde de jeu.
Les supporters n'ont même pas pu le voir tant il y avait de fumigènes. Ce soir-là j'ai inscrit un doublé et nous avons gagné 2-0, ce qui a du même coup assuré notre maintien.
J'ai aussi disputé le fameux "match à rejouer" du 12 décembre 1992, suite à une erreur d'arbitrage de M. Veissière : là aussi c'est une date historique tant cet évènement est rarissime
France 3 Occitanie : tu es plus Toulousain ou Girondin ?
Anthony Bancarel : avec le TFC j'ai connu un double bonheur : celui de débuter dans ce club et d'y connaître une progression régulière, ce qui m'a permis d'être transféré aux Girondins au bout de 5 saisons; et celui de revenir y terminer ma carrière en participant à la double remontée du National à la Ligue 2 puis la Ligue 1 entre 2001 et 2003.
A Bordeaux mon intégration a été un peu plus difficile : j'avais été transféré depuis le rival toulousain, pour un certain montant, et à cause d'une blessure je n'ai pas eu le rendement attendu pour ma 1ère saison ; j'ai alors eu droit à quelques remarques désobligeantes dans les vestiaires.
Mais l'année suivante j'ai emmagasiné mes plus beaux souvenirs de joueur avec les Girondins : en partant de la "coupe Intertoto", qui servait de tour préliminaire pour la coupe de l'UEFA, nous avons gagné à chaque tour jusqu'à nous qualifier pour la finale, que nous avons disputée contre le grand Bayern de Munich. Un sacré parcours.
Au bout du compte je me sens privilégié d'avoir vécu 2 aventures humaines : aujourd'hui en tant qu'entraîneur au centre de formation du TFC je suis toujours heureux quand j'ai l'occasion de revenir sur les terrains du Haillan à Bordeaux ; j'y retrouve des amis et j'y suis toujours très bien accueilli.