Le patron d'Airbus, Tom Enders, a accusé jeudi le gouvernement autrichien de se servir de la justice à des fins électorales dans le cadre d'une enquête sur des faits de corruption et de fraude lors de la vente de l'avion de combat Eurofighter.
"Ce qui se passe en Autriche est un abus du système judiciaire à motivation politique" dans la perspective des élections législatives qui doivent se tenir au plus tard en 2018, a affirmé Tom Enders, dans une véhémente déclaration écrite.
Le groupe a annoncé mercredi que son patron figurait parmi les personnes visées par une enquête en Autriche sur un contrat controversé de vente de 18 avions de combat Eurofighter pour 2 milliards d'euros en 2003.
A l'époque, Tom Enders dirigeait la branche défense du groupe EADS, devenu Airbus Group depuis janvier 2014.
"Je confirme qu'il (M. Enders) est un suspect dans cette enquête", a indiqué mercredi soir à l'AFP Nika Bussek, une porte-parole du parquet de Vienne, refusant de donner toute autre information, l'enquête étant en cours.
L'Autriche avait annoncé en février avoir porté plainte contre Airbus, auquel il réclame jusqu'à 1,1 milliard d'euros.
Les accusations de l'Autriche sont "infondées", a répété Tom Enders dans sa déclaration, ajoutant que "les autorités judiciaires arriveront également à cette conclusion - mais certainement seulement après les élections".
Punching ball électoral
"D'ici là, cette posture va durer parce que ce dont il s'agit, c'est de distraire le public jusqu'au jour de l'élection", a-t-il poursuivi, dénonçant une affaire qui "n'est rien d'autre que de la rhétorique électorale de bas étage"."Nous ne laisserons pas le gouvernement autrichien se servir de nous comme d'un punching ball qu'il pourra frapper pour gagner facilement des points politiques", a-t-il poursuivi.
L'écologiste Alexander Van der Bellen a remporté en décembre l'élection présidentielle en Autriche. Les élections législatives sont prévues pour 2018.
En mars, Airbus avait déjà "formellement rejeté" les "accusations de tromperie et de fraude" de Vienne et dénoncé une "manoeuvre politique". "Le
ministère ne nous a ni informés de ces allégations, ni demandé des explications", avait assuré le groupe.
Jeudi, Tom Enders a réitéré ces griefs. "Pire, dans un premier temps, nous n'avons pas pu avoir accès aux documents en question", a-t-il ajouté, estimant que tout cela a été fait "purement pour gagner du temps" et empêcher un "démenti argumenté (...) aussi longtemps que possible et empêcher le château de cartes du gouvernement de s'écrouler".
Vienne entend réclamer réparation du préjudice, estimé au minimum à 183,4 millions d'euros, correspondant à des commissions facturées en catimini par le groupe aéronautique, selon les enquêteurs autrichiens.
Le consortium européen a "depuis 2002 délibérément trompé la République d'Autriche tant sur le vrai prix que sur les vraies capacités de livraison et les vrais équipements" des appareils, selon le contenu d'une enquête ouverte par le ministère en 2012 et dévoilée en février.