Magistrats absents, greffiers en sous-effectifs, conditions de travail dégradées… Le tribunal judiciaire de Toulouse traverse une crise à tous les niveaux. Le barreau de Toulouse monte au créneau et organise le 8 février un procès fictif pour tentative de meurtrede la justice.
Ce vendredi 27 janvier, le tribunal judiciaire de Toulouse a fait sa rentrée solennelle. Une rentrée sous tensions. Le barreau des avocats toulousains dénonce une dégradation continue des conditions de travail. La bâtonnière toulousaine Me Caroline Marty parle même d’une “situation dramatique”, assurant même qu’à ce jour, “la justice ne peut plus être rendue dans des conditions normales à Toulouse”.
Manque de magistrats et alertes successives
Le délitement des moyens alloués à la justice en France, Me Marty y assiste depuis plusieurs années, avec “colère et incompréhension”. “Mon prédécesseur, déjà, avait lancé des alertes notamment auprès du juge des affaires familiales. Mais là, ça s’est démultiplié. Je crois que personne ne se rend compte de notre réalité sur le terrain”.
Cette réalité-là, ce sont les audiences renvoyées systématiquement, le nombre incalculable de magistrats empêchés et non remplacés. Résultat : “on se retrouve à prioriser certaines activités au détriment d’autres. Parce qu’on n’a pas le choix”.
On a besoin d’un plan d’urgence pour Toulouse
Me Caroline Marty, à la tête du barreau de Toulouse
La responsabilité de l'État
“Les cours criminelles ne sont composées que de magistrats. Si on en manque, on renvoie les affaires. Ça demande plus de moyens humains. Et à la cour criminelle, l’accusé doit être jugé dans les six mois. À l’heure actuelle, nous n’avons pas les ressources pour le faire dans ces délais. Alors l’accusé… ressort ou on est obligé de saisir la cour d’appel pour une éventuelle prolongation de délai”, explique Me Marty.
Bref, la situation semble inextricable. Et le responsable est tout trouvé : “c’est l’État, le ministère de la Justice, le ministère de l’Économie”, assène Me Marty. “Le garde des Sceaux nous annonce des recrutements et des créations de postes sur cinq ans. Mais ce n’est pas sur cinq ans qu’on en a besoin. C’est tout de suite. On a besoin d’un plan d’urgence pour Toulouse”, assène Me Marty.
Un procès fictif pour alerter
Alors, face à cette situation jugée "dramatique et inquiétante", le barreau de Toulouse veut passer à l’action. Le 8 février prochain, les robes noires vont organiser un procès fictif pour tentative de meurtre de la justice. Un projet entériné par une motion adoptée par tout le barreau de Toulouse lors d’une assemblée générale qui s’est tenue à la mi-janvier.
Témoins, audiences reportées, délais à rallonge pour saisir un magistrat : le 8 février, cet événement imaginé à Toulouse doit permettre d’illustrer le plus fidèlement possible le quotidien bien réel des magistrats toulousains. “Cette audience dénoncera le manque de moyens humains et matériels affectant le tribunal judiciaire de Toulouse”, explique le barreau de Toulouse dans un communiqué.
Il faut que les pouvoirs publics se rendent compte de la situation dans laquelle Toulouse se trouve.
Caroline Marty, bâtonnière de Toulouse
Et surtout, ce procès fictif sera l'occasion de revenir sur les conséquences que cette situation peut avoir sur un justiciable. “Il faut que les pouvoirs publics se rendent compte de la situation dans laquelle Toulouse se trouve”, achève Me Marty. Ouvert au public, ce faux procès se tiendra à la salle Tolosa de l’institut catholique de Toulouse (ICT). L’entrée est gratuite. La prestation sera également diffusée en direct sur la chaîne YouTube du barreau toulousain.