Mardi 23 mars, le procès des personnes en situation de handicap, jugées pour être rentrées sur les pistes de l'aéroport Toulouse-Blagnac et avoir bloqué des voies à la gare Matabiau, est devenu celui de la justice incapable de s'adapter aux nécessités d'accueil des handicapés.
Le procès de militants pour les droits des personnes en situation de handicap, jugées pour entrave à la circulation après avoir envahi les pistes de l'aéroport Toulouse-Blagnac et pour avoir bloqué le départ d'un train à la gare Matabiau, est devenu celui de la justice et de son incompétence à accueillir des handicapés ce mardi 23 mars.
Avant même le début de l'audience, les prévenus démontrent les difficultés d'accès au palais judiciaire de Toulouse (Haute-Garonne). L'élévateur, pas aux normes, ne permet pas aux utilisateurs de s'en servir seuls.
@odile31 pointe du doigt le manque d'accessibilité de l'élévateur prévu pour rejoindre le Tribunal. Le dispositif ne permet pas une utilisation autonome et le magistrat n'a pas prévu l'assistance nécessaire ! pic.twitter.com/7FsAJ7aXlq
— Nikola Dobric ? (@Nikola_Dbrc) March 23, 2021
Public et journalistes dehors
L'arrivée dans la salle d'audience aboutit à un autre triste constat. Avec seize prévenus dont douze en fauteuil roulant, huit avocats et une dizaine de journalistes, impossible de faire respecter la jauge de 28 personnes maximum dans cette pièce et d'assurer la sécurité sanitaire. La présidente de la cour décide que seuls les prévenus et les avocats peuvent rester. Il est demandé au public et aux journalistes de sortir.
À l'instant, la police refuse de laisser entrer la presse au tribunal judiciaire de Toulouse sur instruction spécifique... #handisocial @SnjCgt @SNJ_national pic.twitter.com/0Jlgry8QYF
— Arié Alimi (@AA_Avocats) March 23, 2021
Une justice qui ne s'adapte pas aux personnes handicapées
L'audience s'ouvre. Les avocats des prévenus dénoncent l'absence de mesures de l'institution judiciaire pour s'adapter aux personnes en situation de handicap afin de leur offrir un procès digne et leur permettant de se défendre dans les meilleures conditions.
L’institution judiciaire doit s’adapter aux personnes en situation de handicap et non l’inverse. Nous avons trois personnes qui ne peuvent pas répondre de manière équitable devant la cour aujourd'hui. Nous avons une personne qui n’entend pas. Et qui ne peut pas s’approcher car les dimensions de la salle d’audience ne permettent pas de garantir des distances d’un mètre. C’est particulièrement dangereux pour cette personne qui présente des comorbidités. Nous avons une autre personne qui ne s’exprime pas correctement et a besoin d’un interprète. La justice n'a même pas pensé à lui en proposer un alors que dans la procédure il est indiqué qu’elle en a besoin.
Suspension d'audience. Un prévenu sort en pleurs, une autre "j'ai de la pisse plein les chaussures" (bcp sont venus avec des couches, anticipant qu'ils ne pourraient pas être aidés). "C'est d'une violence", répète en boucle @odile31. Ils sont là depuis 10h ce matin. #toulouse
— Lola Cros (@LolaCros) March 23, 2021
Bloqués au tribunal
L'audience se termine sur les coups de vingt-deux heures. A cette heure tardive, plus aucun transport adapté pour des personnes handicapées n'est disponible. Les prévenus et leurs soutiens sont bloqués à l'intérieur du tribunal. Il faut attendre encore deux heures avant de trouver une solution.
Il est minuit nous sortons enfin du Tribunal. Des mobibus ont été réquisitionnés. La réalité vécue par les personnes en situation de #handicap l'inadaptation de la société, l'absence de connaissance de leurs contraintes @lemondefr @Mediapart @ladepechedumidi @E_DupondM @odile31 https://t.co/G5Rd1BzilX
— Me David Nabet-Martin (@dnm_avocat) March 23, 2021
La mobilisation paye - Merci @infoTisseo pic.twitter.com/Jti7Zn6nTT
— Christophe LEGUEVAQUES (@CLeguevaques31) March 23, 2021
Mercredi 24 mars, en fin de journée, le président du tribunal judiciaire et le procureur de la République de Toulouse ont envoyé en réponse le communiqué ci-dessous à l'ensemble des médias :
Après les articles évoquant le procès à Toulouse de militants de l'association Handi Social, Le président du tribunal judiciaire et le procureur de la République "tiennent à rappeler certains éléments factuels" pic.twitter.com/dCOnHcBBIn
— Sylvain Duchampt (@duchampt) March 24, 2021
Autant d'évènements qui feraient oublier qu'un procès s'est tenu dans la soirée. Le procureur de la République y a requis des peines avec sursis allant de trois à huit mois (pour Odile Maurin). La décision a été mise en délibéré au 4 mai prochain.