Avec cette dixième manifestation, l'aspect financier devient le nerf de la grève. Une journée de mobilisation c'est un jour de moins sur la fiche de paie. Beaucoup de salariés ne sont plus en mesure de cesser le travail. Au cœur du mouvement, les caisses de solidarités battent des records de dons.
Les jours de grève se multiplient et les fins de mois commencent à être compliqués. Mobilisés depuis le départ, certains grévistes se retrouvent un petit peu à sec pour poursuivre le mouvement contre la réforme des retraites. Heureusement, la solidarité s'organise. Syndicats, associations et partis politiques sont là pour aider les grévistes avec des dons et des cagnottes bien remplies.
La solidarité selon les syndicats
Chez sud-rail à Toulouse, pas de caisse de grève. Pour les militants mobilisés, il faut tenir bon et toute forme de solidarité est la bienvenue. Ce midi, les grévistes mangent une fois de plus ensemble. Quelques pommes de terre et une rouelle de jambon feront l'affaire. "Les repas de midi, on les prend en commun reconnaît Yann Puech, délégué syndical de sud-rail Occitanie. Une maraîchère du Tarn nous a donné des légumes pour que l'on puisse les préparer pour les grévistes. On est prêt à tenir."
Côté CFDT, les salariés peuvent être indemnisés lorsqu'ils font grève. Après 15 jours de mobilisation le secrétaire général CFDT cheminots Occitanie Johann Bedel-Navarro va en faire la demande. "C'est un montant de 7,70€ qui est donné à chaque adhérent par heure. Je vais percevoir 53,90 € par jour à la fin du mouvement. C'est une indemnité mais pas le paiement des jours de grève. Je ne suis pas payé à faire grève."
Une Caisse nationale d'action syndicale (CNDS) a été créée en 1973 par la CFDT au niveau confédéral. Un trésor de guerre de plus de 140 millions d'euros que nous explique Pierre-Louis Canavelli, le trésorier de la CFDT sur la région Occitanie. "C'est des fonds mis de côté sur les cotisations des adhérents (8,6%), c'est public et déclaré. Quand il y a un appel à la mobilisation, on peut ainsi soutenir nos adhérents."
La caisse a beaucoup grossi en 1992, lorsque des milliers de routiers bloquaient les routes de France pour protester contre l'instauration du permis de conduire à points, paralysant les départs en vacances.
Les autres centrales syndicales comme la CGT ou FO ont aussi mis en place des caisses de solidarité. Et depuis le début du conflit, elles battent des records de dons. La cagnotte Leetchi de la CGT a franchi la barre de 1,6 million d'euros récoltés. La plus grosse caisse de solidarité mise en place par la CGT frôle même les 3M de dons.
La France Insoumise a récolté plus de 700 000 €
Les syndicats ne sont pas les seuls à venir en aide. De son coté la France insoumise a mis en place une cagnotte sur internet en octobre 2022 qui a déjà récolté plus de 700.000 euros de dons. "Beaucoup de salariés ne peuvent malheureusement pas faire grève et donc par procuration essaient d'aider ceux qui ont encore ce droit sans pression de leur hiérarchie, selon le député NUPES François Piquemal.
Le jeune député toulousain assure que cette cagnotte a été mise en place dès le début de la mandature pour venir en aide aux différents mouvements de grève notamment dans les hôpitaux. Les députés l'alimentent mais aussi les militants, les sympathisants et toutes les personnes qui le souhaitent. "On organise des événements sur les réseaux sociaux (les grèves events). On discute politique autour des enjeux de chaque grève. On incite les gens à participer à hauteur de leurs moyens."
Le parti mélenchonien redistribue ensuite cet argent aux organisations qui en font la demande comme ce fut le cas pour la CGT Energie à Toulouse.
L'argent, le nerf de la grève au cœur de la survie de l'action. Et même en période d'inflation et de crise énergétique, la solidarité n'a jamais été aussi forte. Le gouvernement est prévenu : ce mouvement contre la réforme des retraites a de la ressource.
(Benoît Roux avec Christophe Romain)