C'est l'histoire de 9 nageuses accros à la natation synchronisée et surtout une bande de copines. Après une pause "maman" mais pas dans leur amitié, elles ont décidé de reprendre la compétition, passé la quarantaine. Derniers préparatifs avant le retour à la compétition ce week-end à Bruxelles puis le championnat de France en juin et le championnat d'Europe le 3 juillet.
Le défi est immense : la reprise d'une compétition exigeante après de longues années d'absences. Le rendez-vous est pris sur le parking de la piscine de Villefranche-de-Lauragais (Haute-Garonne). Les 9 copines sont bien là pour ce week-end de mars, le dernier entraînement avant les compétitions de natation synchronisée. Sourires, bonne humeur et chambrages à tout-va avant la nage.
Les copines de la synchro
Elles ont aujourd'hui entre 40 et 50 ans et certaines se connaissent depuis l'âge de 10 ans. Des passionnées de natation et de synchro, licenciées à l'époque à Toulouse Nat Synchro. En duo, en équipe ou en solo, les filles ont fait briller les bassins.
L'histoire est belle et les performances sportives et artistiques aussi. Tout autant que leur amitié solide qui jamais ne tombe à l'eau. En 2007, elles forment la première équipe master (+ de 25 ans) française de natation synchronisée. Toujours avec la même recette : de la passion, du travail, un peu de folie, le tout bien arrosé et si possible, en dehors des bassins.
La dernière compétition c'était en 2009 pour les championnats d'Europe à Cadix. L'équipe se classe 4e... À quelques brasses du podium comme l'indique la photo.
Puis le temps passe mais pas leur amitié. Au fil de l'eau, les voilà en couple, des retrouvailles pour les mariages avec des enfants et le travail qui reprend ses droits. Le temps passe mais pas l'envie d'être ensemble, ni de faire de la natation synchronisée.
Jusqu'à ce 6 novembre 2021. Un apéro parmi d'autres et cette certitude qui rejaillit : "et si on reprenait nos maillots et pince-nez ?" Pincez-moi je rêve !
Rendez-vous est pris pour 2024. L'équipe a pour objectif de nager lors de plusieurs compétitions "master" nationales et internationales. Et c’est parti pour un ballet combiné de plus de 3 minutes 30. La coach Céline restera hors de l'eau mais va s'occuper de l'affaire.
Une mise au vert à sec
Avant de se jeter à l'eau, il faut se mettre au vert. Les 8 nageuses et leur coach qui avec elle partageait les bassins auparavant se retrouvent pour répéter les gestes et la chorégraphie hors de l'eau. On appelle ça une répétition à sec, et pour les copines de l'apéro, il est bon de préciser : sans alcool !
Trêve de plaisanterie, pour Anne, Audrey, Sophie, Elodie, Aurélie, Cécile, Gwen, Aliénor, Céline et Caroline c'est le moment de se concentrer au son des musiques choisies pour vérifier que tout sera synchro et beau dans et sous l'eau. Caroline Chevalier licenciée au Cercle Nautique de Villefranche-de-Lauragais nous explique. "Tout le ballet est appris et répété à sec. On l'a élaboré et modifié au fur et à mesure dans l'eau et on peut changer des mouvements au tout dernier moment."
Du travail et du sérieux, on vous dit, mais attention, ça peut glisser. "On y travaille depuis 2 ans, à raison d'un week-end par mois avec des séances le vendredi, samedi dimanche. On fait moitié répet' à sec, moitié répet' dans l'eau, moitié apéro, ça fait partie du programme !"
Euh... Une moitié plus une moitié, plus une autre moitié... Ce ne serait pas un tiers plutôt ?!! En-tout-cas, ça prouve que les filles se mettent en quatre.
Retour de maillot
Avant de retrouver les joies du bassin, les 8 nageuses se sont entraînées séparément pour la condition physique. Il faut maintenant répéter à sec pour être parfaites dans l'eau. Pas facile de retrouver les sensations. Céline Saint-Sernin coach des copines de la Synchro. "On a arrêté de nager il y a 15 ans. On avait dit qu'on nagerait à nouveau ensemble. Maintenant que nous avons fait notre vie de famille, les enfants tout ça. On retente l'aventure."
L'euphorie du retour, l'ivresse d'être ensemble mais il faut mouiller le maillot. ''C'est compliqué de compiler avec notre vie de famille. On a tous des maris, des enfants. Pour le corps c'était dur au départ. Chacun s'est entraîné à part, en s'échauffant au niveau du cardio." Et pour faire passer la pilule, rien de mieux que le soutien des potes : "C'est toujours trop sympa de se retrouver, on rigole beaucoup, on se revoit comme il y a 15 ans au bord d'une piscine. Ça va nous manquer quand ça va s'arrêter."
Objectif : championnats master nationaux et internationaux
Après l'échauffement en bord de bassin, reprise des hostilités. Il fait 35 degrés dans la piscine de Villefranche-de-Lauragais, un peu moins sous l'eau. Les musiques résonnent mais encore faut-il les entendre. Pour que le son passe sous l'eau, la coach rythme en tapant sur une perche qui répercute le son.
Il faut que ce soit beau et majestueux en surface mais aussi technique et harmonieux en dessous. Des heures et des heures de répétition pour un léger retard, un geste presque parfait. Les corps parfois tremblent hors de l'eau, les lèvres deviennent violettes. Dire que la nation synchro c'est du sport est un euphémisme.
Maintenant, fini de rigoler. Le ballet combiné de 3 minutes 30 est bien emmanché. Elles se sont inscrites en catégorie Master (plus de 25 ans) et en bout de ligne d'eau :
- une première compétition à Bruxelles le week-end des 6 et 7 avril pour un Open (compétition ouverte)
- les championnats de France le 22 juin à Chenôve (à côté de Dijon)
- les championnats d'Europe le 3 juillet à Belgrade (Serbie)
Reportage France 3 Occitanie : Benoît Roux Elsa Leroy Sarah Grosset Elise Auriaux
Recherche sponsor
Passés, les premiers frissons dans les bassins, place maintenant aux compétitions. Le challenge n'est pas que sportif, il est aussi financier comme le reconnaît Elodie Caquineau, l'une des 9 nageuses. "Nous sommes d'anciennes compétitrices nationales et internationales. Il faut compter beaucoup sur la famille et la compréhension des conjoints, des parents. C'est partir plusieurs fois dans l'année et loin. C'est 15 000 € de budget pour nous en 2024".
Il faut donc partir en quête de sponsors, d'entreprises locales qui voudraient bien appuyer la démarche un peu folle mais maîtrisée des 9 battantes. Voilà ce qu'on peut lire sur leur communiqué. "Dépassement de soi, solidarité, performance, sororité, respect, féminité, travail d’équipe, égalité, passion, discipline, engagement... Nous avons appris toutes ces valeurs au fil de notre carrière de nageuses. Nous sommes fières de pouvoir les porter de nouveau et les transmettre, à nos enfants et à tous ceux qui nous soutiendront. "
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Et n'allez pas croire que c'est juste un délire, un pari un peu fou lancé lors d'une soirée arrosée. Les nageuses ont bien travaillé, ont encore fait des sacrifices et elles attendent leur récompense. "C'est une belle expérience. Bel objectif entre amis et bel objectif sportif de s'y remettre après tant d'années. Le plus compliqué à notre âge c'est la condition physique. L'apprentissage, la technique et les réflexes sont là. L'objectif c'est de se faire plaisir mais nous sommes des compétitrices dans l'âme donc on voudrait faire un podium."
Ce retour est tout sauf un au revoir.
Élodie et ses potes auront un début de réponse lors de l'Open de Bruxelles ce week-end. Quoi qu'il en soit, l'histoire est déjà belle. Il suffirait que les planètes se synchronisent pour qu'elle devienne magnifique.