Entre 600 et 700 places pour les enfants atteints de troubles autistiques ou de handicaps mentaux sont manquantes en Occitanie. Une situation difficile pour les familles, qui doivent les prendre en charge au quotidien.
Chez elle, à Montpellier, Samia Daye s'occupe jour et nuit de sa fille Aya. Cette dernière, âgée d'une dizaine d'années, est atteinte d'autisme sévère et non verbal. "J’ai l’impression de vivre dans un hôpital, que je suis l’infirmière de ma fille. Je travaille de nuit, mais le lendemain matin, je ne peux pas me reposer, exprime la mère de famille.
Depuis 10 ans, Samia Daye a dû mettre en pause son travail d'ingénieur. En cause notamment, le manque de place dans les établissements dédiés. Elle a sollicité l'ensemble des Instituts médico-éducatifs de l'Hérault, a alerté les pouvoirs publics ou encore le procureur, mais n'a jamais pu trouver de place.
"Si je baisse les bras, mes enfants sont perdus", estime la mère de famille en refoulant des larmes. Katia, une éducatrice libérale spécialisée dans l'autisme, vient l'aider à prendre en charge sa fille, à désamorcer les crises et les angoisses de cette dernière.
Entre 600 et 700 places manquantes dans l'Hérault
Dans le département, entre 600 et 700 enfants n'ont pas pu avoir de place dans les centres médico-éducatifs. Ils sont plus de 10 000 en France. En avril dernier, le conseil de l'Europe dénonçait "une violation de la Charte sociale européenne" de la part de la France, en raison de manquements pour développer une politique "pour l’intégration sociale et la participation à la vie de la communauté des personnes handicapées".
À l'institut médico-éducatif du Château d'Ô, à Montpellier, quatre-vingt-dix enfants atteints de handicaps mentaux ou de troubles autistiques sont pris en charge en internat ou bien à la journée. Dans la cuisine, sous l'œil vigilant de Carole Antonoff, éducatrice spécialisée, ils se lancent ce jour-là dans l'épluchage de carottes ou de concombres. “Ici, j’apprends plein de choses, à couper par exemple. Dans la cuisine, il faut faire très attention”, a retenu Ethan, l'un d'entre eux. Une prise en charge qui leur permet de gagner en autonomie.
Souvent, on veut les protéger, et du coup, ils n’apprennent rien. Ils ont un handicap mais ils ont aussi plein de compétences à développer.
Carole Antonoff, éducatrice spécialisée
L'établissement a cependant environ 150 dossiers en attente pour des enfants qui nécessiteraient d'être pris en charge. "À chaque commission d'admission, je me dis, est-ce que je fais le bon choix, et quel enfant je vais accueillir demain au sacrifice d'autres ?", déplore Isabelle Guy, la directrice de l'IME.
"Comme pour tous les enfants, si on ne les prend pas en charge suffisamment tôt, il y a des retards qui s'accumulent, et l'enfant perd en éducation, regrette Bernard Dessimoulie, président de Unapei (Union nationale des associations de parents d'enfants inadaptés) de l'Hérault, invité d'Ici 19/20 de France 3 Occitanie. On ne pourra pas rattraper le manque de place rapidement, parce qu'on ne pourra pas créer 600 à 700 places d'un coup".
Reportage de Caroline Agullo et de Juliette Morch