Dans le Gard ou l’Hérault, la course camarguaise fait partie intégrante de la culture locale. Passionnés par ce sport, deux jeunes français issus de l'immigration se lancent dans l’arène pour affirmer leur identité. Un sport sans mise à mort du taureau, ni volonté de le blesser, mais une façon pour eux d’être reconnus et prendre leur place dans la société.
"Fragments d'une jeunesse française" : un film de Jérémie Battaglia à voir le jeudi 14 décembre 2023 à 22h50. Une coproduction Extérieur jour/Les productions du Lagon/13 Prods/Aljazeera Documentary Channel. Avec la participation de France 3 Occitanie.
A suivre le débat sur la même thématique, présenté par Patrick Noviello, dès 23h40.
Belkacem Benhammou s'élance. Il est suivi par huit jeunes hommes. Tous vêtus de blanc, comme lui, s'éparpillent dans l'arène. Quelques instants plus tard, le taureau massif apparaît. La danse entre l’homme et l’animal peut commencer.
La course camarguaise
Si la course camarguaise est un sport, elle est aussi considérée comme un art, celui du spectacle traditionnel qui se déroule dans quelques départements du sud de la France, comme l’Hérault ou le Gard. La saison commence au mois de mars et se termine au mois d’octobre. Contrairement à la corrida, il n’y a ni mise à mort, ni volonté de blesser l’animal.
Le raseteur, entièrement vêtu de blanc, est positionné dans l’arène pour affronter le taureau. Son objectif est d'enlever, avec un outil particulier en forme de peigne (le crochet), tous les attributs placés entre ses cornes : cocardes, glands et ficelles. L’action doit se faire dans un ordre et un temps bien définis. Un rôle qui nécessite une bonne connaissance de l'animal, des qualités techniques et une excellente condition physique.
Un sport professionnel vecteur d’intégration
Jawad et Belkacem, deux jeunes français issus de l'immigration, font partie de ces jeunes qui se sont pris de passion pour cette pratique profondément ancrée dans le patrimoine local. Ils sont tous deux, raseteurs : "Mes parents ne voulaient pas que je fasse de la course camarguaise. Je leur disais que j’allais au foot et je partais m’initier à Baillargues" raconte Jawad. "Ce n'était pas dans nos traditions" rajoute-t-il. "Mes parents ont subi mes choix et puis, ils ont accepté".
Pour Belkacem, la vie avec les taureaux a commencé avec son père, puisqu’il était lui-même raseteur "il a commencé juste après la guerre d’Algérie, par plaisir, mais aussi pour ramener 2-3 sous à la maison..." confie-t-il.
Une pratique professionnelle qui oblige bien souvent ces jeunes à trouver un travail à côté, sachant que du jour au lendemain, tout peut s’arrêter "On gagne 200 euros par prestation" précise l’un d’eux.
Mais au-delà du défi, du plaisir et de l’adrénaline que le jeu procure, ces jeunes mènent à travers cette pratique, un tout autre combat : celui qui leur permet de trouver leur place dans la société, susciter le respect et affirmer leur identité.
Une volonté à toute épreuve
Leur volonté et leur détermination pour atteindre l’excellence forcent le respect. Jawad et Belkacem en sont conscients, leur engouement pour la course camarguaise n’est pas sans risque.
Cette reconnaissance que j'ai eue à travers la course camarguaise, c'est qu'en fait on m’a laissé le droit de m’exprimer et montrer mes qualités. Après, c’est le taureau qui décide si j’ai le niveau ou pas.
Jawad Bakloul, raseteur professionnel
Ils savent qu'ils peuvent à tout moment se faire encorner, essuyer de graves blessures ou pire, y laisser la vie. Malgré tout, rien ne les arrête. À travers la course, c’est une place dans la société que ces jeunes hommes tentent de s’approprier.