SCIENCES. "D'habitude, on ne retrouve pas les corps mous" : des fossiles découverts dans l'Hérault bouleversent l'état des connaissances paléontologiques

Un couple de passionnés a découvert des fossiles exceptionnels sur la montagne de Cabrières, dans l'Hérault. Ces derniers révèlent les empreintes des parties molles, presque jamais observées, des animaux marins de l'ordovicien. Et contredisent certains postulats paléontologiques.

Lorsqu'ils extraient ces fossiles des roches de schistes de l'Hérault pour la première fois, Eric et Sylvie ne prennent pas tout de suite la mesure de leur découverte. 

Invité par des chercheurs du CNRS pour étudier un site réputé du Maroc, le couple fait face à des fossiles étrangement similaires à ceux qu'ils ont sortis de terre chez eux, sur la montagne de Cabrières.

Des scientifiques de Lyon récupèrent alors le trésor et confirment : avec celui du Maroc, Cabrières est un des rares gisements de fossiles de "corps mous" connus à ce jour sur terre.

 

Fossiles aux corps mous

"C'est vraiment exceptionnel", commente Enzo Birolini au micro de France 3 Occitanie. L'étudiant en paléontologie déballe les cartons de fossiles en provenance de Cabrières. Et en profite pour les observer un temps avant de les classifier dans les collections de l'université de Lyon.

"D'habitude, on ne retrouve pas les corps mous", soit "les systèmes nerveux ou digestifs" des animaux marins car ils ont été "dégradés par des bactéries”, expose-t-il, un fossile dans les mains. Ce sont plutôt "les organismes durs", "les coquilles", qui survivent jusqu'à notre époque. 

"Encore aujourd'hui, on connaît mieux la surface de la lune que les fonds marins", poursuit l'étudiant, qui en est persuadé : cette découverte améliorera la connaissance des milieux aquatiques de l'ère primaire. De quoi laisser l'étudiant rêver : "Avec une imagerie de très haute qualité, on pourrait retrouver un système nerveux, pourquoi pas des yeux". 

Diversification progressive des espèces

Quoi qu'il reste à découvrir sur ces fossiles de 470 millions d'années, leur existence même amorce une remise en cause des théories scientifiques.

Paléontologue au CNRS de Lyon, Bertrand Lefebvre développe : "Depuis 30 ou 40 ans, la plupart des experts pensent que l'apparition des animaux s'est faite en deux étapes" : certaines espèces n'auraient pas survécu à l'ère du cambrien, tandis que d'autres se seraient diversifiées à l'ère suivante, celle de l'ordovicien. 

La découverte de "fossiles mous" prouve au contraire que les conditions de conservation étaient "déjà bonnes" pendant le cambrien et que "la diversification des espèces s'est faite de manière progressive, sur plus de 100 millions d'années", démontre le professeur.

Espèces marines du pôle Sud

À l’époque, la plupart des continents se situaient dans l'hémisphère sud, contrairement à la répartition actuelle des terres sur le globe. La température moyenne à la surface de la terre était plus élevée qu'aujourd'hui, de 10 degrés environ. 

Ces espèces, dont les fossiles ont été retrouvés dans l'Hérault, étaient donc des animaux marins du pôle Sud, réfugiées dans des eaux fraîches et oxygénées, soit davantage propices au développement du vivant.

Figées dans la roche, leurs empreintes sont remontées, au gré du temps et des phénomènes géologiques, jusqu'au Maghreb et aux montagnes du sud de la France. Elles se retrouvent aujourd'hui dans des cartons, à Lyon, pour que leurs conditions d'existence soient un jour mieux connues des humains. 

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