Après 8 ans de séparation Zebda reprend le chemin de la scène à Cahors
Après 8 ans de digressions en solo, Zebda revient pour faire du Zebda. Nouvel album et nouvelle tournée qui a débuté aux Docks de Cahors
Après huit années de digressions en solo, Zebda revient pour faire du Zebda. Nouvelle tournée et nouvel album, les Toulousains veulent "mettre le feu" avec un mix classique d'énergie et de poésie sociale, sous-tendu par un constat politique désabusé.
Les auteurs de l'imparable "Tomber la chemise" ont choisi les rives du Lot et la salle des Docks de Cahors pour leurs premiers concerts vendredi et samedi. Cinq membres du Zebda historique sont là, sur la scène, à peaufiner les derniers réglages: Mouss et Hakim Amokrane (chant, guitare), Magyd Cherfi (textes, chant), Joël Saurin (basse) et Rémy Sanchez (clavier, accordéon).
La tournée du groupe issu des cités de la Ville rose les mènera jusqu'au 17 décembre et mélangera anciens titres et nouveaux extraits de l'album qu'ils viennent d'enregistrer (à 90% à Toulouse et à 10% à New York) et qui sortira en janvier, explique Mouss. "On ne peut pas revenir sans les anciens morceaux et sans la fraîcheur des nouveaux".
Mais les Zebda reviennent pour faire du Zebda. "Il y a eu une période où on voulait visiter d'autres horizons esthétiques. Les années nous ont éclairés sur ce qu'on devait être, nous mêmes", dit Magyd. "On doit se recentrer sur ce qu'était l'essence Zebda, quelque chose
d'ensoleillé, quelque chose de rythmé, une proposition multiculturelle".
"On a retrouvé ce qu'on appelle le power Zebda", renchérit Magyd, parlant de "poésie sociale" appliquée à "l'énergie musicale" de leurs compositions.
Après avoir connu des succès énormes, les auteurs d'Essence ordinaire (1998) avaient décidé en 2003, 15 ans après la naissance du groupe en 1988, de tenter l'aventure solo.
Deux albums plus tard pour Mouss et Hakim, deux albums et deux livres pour Magyd, le constat est en demi-teinte. "Ca n'a pas très bien marché", reconnaît Mouss. "L'accueil a été mitigé", dit Magyd.
Ils finissent par accepter des propositions occasionnelles de se retrouver sur scène et à partir de là, le groupe, qui est toujours resté "en lien", trouve la reconstitution "naturelle". "C'est revenu comme le vélo, c'est assez incroyable", raconte Magyd, qui parle d'"effet magique", de retour "à l'enfance, à la bande de copains, au partage avec le public".
Pour ceux qui en ont encore, les cheveux ont blanchi. Mais les Zebda ont encore des
batailles à livrer même s'ils ne sont pas dans la posture "de l'artiste qui a des choses à dire et qui veut plomber l'ambiance".
"On a le sentiment que depuis le Bruit et l'odeur", l'album de 1995 dont la chanson titre faisait référence à des propos controversés de Jacques Chirac sur les immigrés, "quelque chose s'est dégradé considérablement", constate Mouss.
"Aujourd'hui, c'est toutes les semaines qu'on entend des paroles comme ça, ça va jusqu'à la condamnation d'un ministre de l'Intérieur", dit-il, en référence à celle de Brice Hortefeux en 2010 pour propos "outrageants" envers les Arabes, condamnation dont il a été relaxé en appel.
"On nous renvoie sans cesse des insultes et du mépris. On nous parle de sous-cultures, d'invasion, de sauvages", poursuit Mouss. Et à la "libération de cette parole-là, il n'y a pas forcément de réaction". Au contraire, "on sent que c'est fait de manière consciente pour continuer de pratiquer le hold-up électoral", ajoute-t-il.
"Depuis 20 ans, on traite des mêmes thèmes, dicriminations, exclusions, injustices sociales et raciales", et la "difficulté, c'est de trouver des angles nouveaux", résume Magyd. "On aurait tort d'aller ailleurs car notre seule existence nous met sur le terrain du combat. C'est une lutte depuis la nuit des temps que d'essayer de mettre en place une société plus juste".