Solitude, détresse, angoisses, stress, idées suicidaires, les mots sont forts et ce sont les leurs. De nombreux étudiants d'Occitanie ont répondu à l'appel à témoignages lancé par France 3 Occitanie. Ils nous racontent ce qu'ils traversent au quotidien depuis le début de la crise sanitaire.
Ils sont venus place du Capitole à Toulouse, jeudi 21 janvier, pour clamer leur angoisse, leur colère, leur mal-être mais aussi leur souhait de reprendre les cours.
Avec plusieurs messages #etudiantsfantomes @radioparleur #Toulouse pic.twitter.com/k62O9Ebla1
— Auriane (@DurochAuriane) January 21, 2021
Depuis bientôt un an, les étudiants alternent entre présentiel et distanciel pour suivre leurs cours, avec les difficultés que cela implique. Leur vie sociale a été bouleversée. Leur vie tout court a changé. Voici quelques témoignages.
Mélissa (Montpellier)
"Je suis étudiante à Montpellier, en licence 1 de gestion. Mon université a fermé ses portes fin octobre, je n’ai pas mis les pieds à l’université de toute la deuxième moitié de mon semestre 1 ! Nous sommes donc sur un modèle de cours à distance, certains professeurs ne se donnant même pas la peine de nous faire cours par zoom ou autre support. Ils nous donnent simplement un diaporama contenant le programme, ce qui limite encore un peu plus les interactions humaines. Le seul moyen dans ce cas de poser une question est le mail, avec une réponse pas immédiate et la possibilité de rester bloqué plusieurs jours. L’université est également plutôt mal équipée en terme de matériel. Pour les cours de maths par exemple, c’est un calvaire ! Le tableau est illisible et il est impossible de suivre une correction avec une connexion souvent moyenne qui nous permet d’entendre un mot sur deux du professeur".
"Cela va faire bientôt 3 mois que je suis enfermée chez moi. Tout ce qui peut composer une vie étudiante, moi je ne le vis pas. Après les partiels, pas de fête ni même de verre en terrasse avec les copains, ça n’existe plus.
Maintenant si je veux sortir, c’est pour acheter des coquillettes chez Lidl ou pour faire le tour de mon quartier, exactement comme ma voisine de 85 ans en fait... Je ressens vraiment de l’injustice et perds toute motivation.
Amandine (Hérault et Belgique)
"Je vis chez mes parents dans un village héraultais mais je suis étudiante en Belgique, en deuxième année de Médecine Vétérinaire à la Faculté de Médecine Vétérinaire à Liège. J’ai passé le premier confinement chez mes parents où j’ai eu tous les cours à distance. Ce premier confinement s’est assez bien passé, j’ai réussi à avoir une bonne dynamique dans mon travail et dans ma vie personnelle avec un bon soutien moral de mes proches mais j’ai eu aussi la chance de travailler quelques heures par semaine dans un EHPAD. Mais pour le deuxième confinement, je suis restée en Belgique et cette période a été trèrs longue, déprimante et ennuyeuse. vec ma colocataire, nous étudions tous les jours, sans aucune autre activité autour, vu que nos cours de sports se sont arrêtés et plus de sorties possibles...
Cette situation est très compliquée pour tous les étudiants, notamment pour ceux qui sont seuls dans un petit studio, et qui sont nouveaux dans une ville. Heureusement que je vis en colocation en Belgique, mais il est compliqué de faire des nouvelles connaissances. Normalement une vie étudiante, c’est une vie dynamique, festive, et enrichissante, mais rien de tout cela actuellement… Cette vie-là me manque. La Situation est aussi un peu angoissante, on ne sait pas où on va et il est difficile d’avoir une bonne cadence de travail.
On ne sait pas si notre diplôme va avoir de la valeur, si l’on est bien formé? J’ai l’impression que tous les jours de la semaine sont des dimanches interminables !
Financièrement aussi cela peut-être compliqué : de mars à juin dernier, j’ai payé un loyer tous les mois alors que je n’étais pas à mon appartement et de plus je ne perçois aucune bourse, APL vu que je fais mes études à l’étranger.
Éloïse (Toulouse)
"Je suis actuellement étudiante en deuxième année de philosophie à Toulouse 2 Jean Jaurès. Je ne suis pas retournée à la fac depuis l’année scolaire dernière. En plus d’être étudiante je suis salariée dans un commerce textile en temps partiel pour subvenir à mes besoins car je suis sur Toulouse et je m’assume seule ( je suis étudiante boursière)... Les étudiants....ces grands oubliés!"
Actuellement je ne travaille plus, je suis en arrêt maladie pour des problèmes d’anxiété liée à la situation.
"Et puis on a l’impression que notre diplôme va être dévalorisé « le diplôme covid » or notre charge de travail est très importante, nous ne sommes pas stimulés pour travailler et il est donc plus dur de s’y mettre. Parfois je me demande même si je devrais pas tout laisser tomber ! Après 1 an presque, je n’arrive plus a faire les deux, la situation anxiogène ne me permet même plus de travailler, réveillant des problèmes de stress chez moi"
Noémie (Toulouse)
"Je mène des études de droit (un double diplôme droit français et droit anglais) à l’université UT1 Capitole. Je vis dans un 25m2 mais j’ai la possibilité de rentrer chez moi le week-end et j’espère juste que je pourrai continuer à le faire malgré le couvre feu. Honnêtement je sens qu’on laisse complètement les étudiants de côté !"
On nous a fermé les restaurants universitaires, ce qui est contraignant pour les étudiants boursiers dont je fais partie. Nous avions les repas à 1€. Pour « compenser » on a eu 150€ en décembre...
Alixe (Toulouse)
"Je suis en deuxième année de philosophie à l'université Jean Jaures. J’ai preferé rester chez ma mère en Lozère car je n’avais pas les moyens de payer un appart pour rien sur Toulouse. On a été la filière sacrifiée en gros, on n’a jamais vu le campus depuis le début de l'année, je ne sais pas à quoi mes camarades ressemblent… je ne les ai jamais vus dans la vraie vie ! Mais on est ensemble via Messenger on fait des mises au point santé mentale tous les 2 jours".
Le sentiment collectif qui nous hante, c'est l'abandon du gouvernement, la détresse, le décrochage scolaire aussi.
Agathe (Montpellier)
J’angoisse en permanence, je suis fatiguée alors que je ne fais rien de mes journées, je n’arrive plus à travailler depuis des mois (bientôt un an). Je me sens délaissée. Je ne veux que retourner à l’université, pouvoir étudier dans des conditions convenables. Je veux seulement reprendre une vie “normale”, déjà assez stressante comme ça mais là c’est insoutenable.
J’ai des crises d’angoisse, de panique même tellement c’est dur à vivre. Et je ne peux nier le désespoir grandissant. Oui, j’ai eu des idées suicidaires.
Paul (Toulouse et Paris)
"Je suis en dernière année d'Ecole d'Ingénieur (Arts et Métiers ParisTech), inscrit sur le campus de Paris , je vis à Toulouse depuis Mars et la fermeture des facs (cours 100% à distance). Globalement, une profonde lassitude, et le sentiment d'être abandonné par le corps enseignant : la direction de la formation ne met pas beaucoup de bonne volonté pour assurer la continuité des cours. Lors du 1er confinement , 85% des cours ont "sauté" et ne seront jamais rattrapés. Depuis la rentrée de septembre, environ 50% du volume de cours est programmé, et beaucoup ont annulés/reportés au dernier moment (la veille pour le lendemain )"
"Ce qui manque beaucoup, c'est la vie étudiante ! Au delà des fêtes et apéros qui ponctuent certes la vie étudiante, c'est le reste qui manque: j'étais un étudiant très curieux , je participais presque chaque semaine à des conférences / colloques/ rencontres sur des sujets variés (philosophie, sciences, culture, économie) et j’aimais beaucoup la richesse culturelle (musées, théêtre, cinéma…)".
La vie associative a complètement disparu : nous avions créé un club de débat et d'éloquence à l'ENSAM (inscrit pour les championnats de France) qui n'a pas survécu. Et plus de sport non plus et cet "exutoire" manque cruellement !
Pierre (Paris)
"Je suis en préparation pour passer le concours de greffier donc c’est une prépa. Je ne suis pas retourné à la faculté depuis début octobre 2020".
On n’a aucune information, que ce soit du gouvernement ou de la faculté. J’ai l’impression qu’on est les oubliés !
"Nous, on a déjà du mal à trouver un boulot et quand on en aura un, si un jour on en trouve un, on va devoir payer toutes les dettes de l’Etat avec des impôts qui auront sûrement augmentés".