Elle est meurtrie bien au-delà de ses "ailes brisées". A Perpignan, face au collège Saint-Exupéry, l'oeuvre de l'américain Alexandre Calder est régulièrement taguée et dégradée. Méconnaissance de l'art et de sa valeur alors qu'une oeuvre du même auteur vient de se vendre près de 5 millions d'euros.
On dirait une grosse cocotte en papier échouée. Noire. Les ailes brisées. C'est d'ailleurs le nom de cette sculpture faite en 1967 pour le collège Saint-Exupéry, juste à côté. Son créateur est reconnu comme l'un des plus grands sculpteurs du 20ème siècle. L'Américain Alexandre Calder a jonglé entre surréalisme, expressionnisme et art moderne et a laissé à la ville de Perpignan ce chef-d'oeuvre que tout le monde, ou presque, semble avoir oublié.
Un trésor artistique méconnu et vandalisé
Récemment, une vente aux enchères parisienne a remis en lumière le travail du sculpteur américain. Un autre stabile monumental de Calder s'est vendu 4,9 millions d'euros. Et il est de la même veine que celui du collège Saint Exupéry. Sans être vénal, cela donne une idée de la valeur marchande de l'oeuvre perpignanaise, mais aussi de sa préciosité artistique.Alors on comprend mieux l'indignation de Clément Cividino, l’un des spécialistes dans le design et l’architecture du XX ème, lorsqu'il inspecte la statue régulièrement vandalisée:
" Il y a des insultes, des tags. Elle a été poncée, partiellement repeinte. Là il manque un boulon. Là on voit parfaitement les traces de ponçage, les coups de peintures et les nouveaux tags. C'est scandaleux"
"C'est une audace pour la ville de Perpignan et le département tout entier d'avoir une sculpture de cette envergure de Calder", conclut Clément Cividino.
Mettre l'oeuvre en valeur
La sculpture "Les ailes brisées" ayant été conçue pour le collège Saint-Exupéry en 1967, c'est à l'établissement et au département qu'elle appartient. Selon le conseil départemental, une restauration n'est pas necessaire, mais la statue subira bientôt un autre nettoyage, et peut-être un déménagement de quelques mètres.
"Elle est forcément attachée au collège, explique la présidente du Conseil départemental des Pyrénées-Orientales. On ne peut pas la mettre ailleurs qu'à proximité du collège." Hemeline Malherbe dit suivre le dossier :
Ça fait plus d'un an qu'on travaille à voir comment on peut mieux la protéger en la déplaçant de quelques mètres pour qu'elle soit toujours visible mais moins accessible physiquement
En attendant, les "Ailes brisées" de Calder sont toujours gribouillées de petits coeurs et autres motifs plus obscènes. Et les amateurs d'art attendent toujours que les Pyrénées-Orientales en prennent autant soin que les fameuses statues de Maillol dont les Catalans s'enorgueillissent à raison.
Pour en savoir plus sur les oeuvres de Calder, un coup d'oeil sur ses célèbres mobiles exposés il y a deux ans au musée Soulages de Rodez.