PORTRAIT. Comment François Arago, astronome et homme politique catalan a marqué l’histoire de la France

Tout le monde connaît le nom de François Arago. Une place à Perpignan, un boulevard à Paris, portent son nom. Il est présent dans de nombreuses villes de France. Mais qui était cette grande figure de notre histoire, aujourd'hui un peu méconnue ? François Arago était à la fois un grand homme politique et un immense savant.

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François Arago repose au Père-Lachaise. Chaque année à la Toussaint, les guides ne manquent pas de faire une halte devant sa sépulture pour rappeler aux visiteurs qu’il fut une grande personnalité du 19ème siècle.

Un enfant des Corbières

C’est au pied des Corbières, sur les bords de l’Agly, à Estagel dans les Pyrénées-Orientales, qu’est né François Arago le 26 février 1786, dans une maison devenue depuis la pharmacie du village. Il est l’aîné de six enfants et le plus célèbre de sa fratrie.
"Un enfant héroïque" raconte Michel Cadé, ancien professeur au lycée François-Arago et membre de l’association Villa Stagello : « A peine âgé de sept ans, il attaque à Estagel un groupe d’Espagnols en fuite après la bataille de Peyrestortes ».  C’est le signe du caractère exceptionnel du futur astronome.

Une vie romanesque

Une mère digne et brave, portant fièrement le bonnet catalan. Son père, maire d’Estagel, propriétaire terrien, juge de paix du canton devient en 1795 directeur de l’hôtel de la Monnaie à Perpignan où il y installe toute sa famille. François, inscrit au collège est très vite repéré par ses professeurs pour son don intellectuel. L'adolescent perpignanais qui rêvait de polytechnique est nommé secrétaire-bibliothécaire de l’Observatoire de Paris.
Il est envoyé à Majorque pour poursuivre le relevé du Méridien de Paris. Pris dans la guerre d’Espagne, il est fait prisonnier mais parvient à s’évader et à rejoindre Paris en ayant sauvé ses instruments de mesures ce qui lui vaudra d’être accueilli en héros en 1809. Une aventure épique qui lui permet d’être élu membre de l’Académie des Sciences à seulement vingt-trois ans.
Cette même année il devient professeur à l’école polytechnique. Tous les orateurs, présents lors de l’inauguration de ses statues, insistent en chœur sur ses qualités morales et son désintéressement : « Un homme qui vivait très modestement, cachait ses médailles et décorations dans le fond d’un tiroir. Un homme naturellement généreux incapable de haïr comme de trahir » pour Arthur Conte, secrétaire d’Etat socialiste.

Arago, un homme sentimental et humain

André Tourné, député communiste

Un savant d’exception

Nous sommes un demi-siècle après le grand Newton, et sous l’Empire. Napoléon attache beaucoup d’importance aux sciences, en particulier l’astronomie. A cette époque on connaît peu de choses de la mécanique céleste. Précoce, Arago devient le premier astrophysicien en déterminant le diamètre des planètes, observe le mouvement des astres, calcule les distances qui les séparent, comprend pourquoi les étoiles scintillent, permet d’améliorer la précision du mètre. Arago est l’auteur d’innombrables apports en matière de lumière et d’optique.

Pour Pierre Léna, astrophysicien et membre de l’Académie des Sciences : « François Arago a été un immense savant avec une caractéristique qui lui est propre. C’était un expérimentateur. Il comprend que pour avoir une réponse à une question il faut une expérience car ce n’est pas seulement la pensée qui apporte la solution. Quand Arago émerge, le monde scientifique se demande ce qu’est la lumière. Un fluide ? Elle est mystérieuse, personne ne sait ».

Arago va soutenir avec succès que la lumière a une nature ondulatoire. C’est remarquable !  

Pierre Léna, astrophysicien

François Arago était un grand vulgarisateur scientifique. Avant de devenir directeur de l’Observatoire, il donne à Paris des cours d’astronomie qui remporteront un vif succès auprès des scientifiques et des navigateurs mais également auprès du grand public.

Un orateur politique

François Arago est également un citoyen combattant fier de ses racines françaises et catalanes. Une gloire catalane dont Arthur Conte, le secrétaire d’Etat au Commerce et à l’Artisanat, parlera en ces termes le jour de l’inauguration de la statue François Arago à Estagel le 31 août 1957 sous une chaleur de plomb : « Un citoyen parfait. Arago a été l’intégrité personnifiée. Il avait en horreur la gloriole. Très attaché à sa famille, il était fier de ses origines paysannes. Catalan patriote, il ne fut que mieux un patriote français ».

Arthur Conte ajoute : « Il avait la parole rocailleuse, lente et roulait les « r ». Ce n’était ni un volubile, ni un exalté, ni un impulsif. C’était un homme grave, plutôt taciturne, aux passions internes, aux amitiés lentes, aux admirations prudentes ».

La mort de son épouse, en 1829, est parfois avancée comme l’une des raisons de son engagement dans la vie publique, tant sur le plan scientifique que politique. Un homme de talent, qui doit malgré tout une partie de sa grande carrière politique au Journal l’Indépendant créé en 1846 pour soutenir sa candidature aux législatives. Elu député des Pyrénées-Orientales, il devient une des figures du parti républicain pendant la Monarchie de Juillet. 

Un Républicain engagé

Après la révolution de 1848, Arago sera ministre de la guerre, de la Marine et des Colonies dans le gouvernement provisoire de la Seconde République et deviendra même un éphémère chef de l’Etat durant quelques semaines. « Etant ministre, il s’est rendu compte de la condition de l’esclavage, il a ensuite dirigé la commission qui a aboli l’esclavage en 1848 et permis ainsi au décret Schoelcher d’être signé », raconte Alain Becat, professeur d’Histoire au lycée François-Arago.

Un Républicain modéré mais engagé, farouchement opposé à la Monarchie, clairement contre les régimes autoritaires, inflexible contre l’Empire. Alain Becat poursuit : « Lors du coup d’Etat de Louis-Napoléon Bonaparte le futur Napoléon III, François Arago va refuser de prêter serment de fidélité comme l’Empereur l’exigeait de tous les fonctionnaires d’Etat. Arago a refusé de se soumettre à ce régime qu’il n’approuvait pas parce qu’il le jugeait non républicain. Mais Napoléon III a refusé d’accepter sa démission et dispensé le savant auquel il vouait une grande estime bien qu’il lui soit un opposant irréductible ».

Un homme altruiste

Tout au long de sa carrière politique, Arago a défendu le pauvre contre le riche. L’injustice sociale le mettait hors de lui. Un homme attentif aux humbles, soucieux des conditions de travail des ouvriers auxquels il voulait offrir le progrès alors que ceux-ci n’avaient encore pas de syndicat pour les soutenir ni de parti politique pour les éclairer.

Dans la lignée de Lamartine, Arago est un romantique proche de Victor Hugo et Delacroix guidant lui aussi le peuple vers la liberté. Arago a mis son nom au service d’une juste cause en prononçant un discours en faveur du suffrage universel le 16 mai 1840. A la tribune, François Arago dira ceci : « Dans la tension extrême des ressorts sociaux, la réforme m’apparaît comme la soupape de sûreté », en ajoutant que désormais le peuple a mis sa foi dans le bulletin de vote. Un discours conservé aujourd’hui encore à l’Assemblée nationale et comptant parmi les grands discours de l’Histoire.

Malade, quasiment aveugle, souffrant de diabète, François Arago s’éteint en 1853 à Paris, entouré de l’affection des siens, à l’âge de 67 ans. Jusqu’au bout, il s’est battu pour la fraternité, les droits des peuples et les Droits de l’Homme. Lors de ses obsèques, plusieurs dizaines de milliers de personnes assistèrent au passage du cortège entre l’Observatoire et le cimetière du Père-Lachaise où il est inhumé.

Dans ses mémoires, Alexandre Dumas lui rend un vibrant hommage, avec ces quelques mots simples mais puissants : « Arago était la science mais aussi la conscience ». 

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