Les séparatistes catalans ont lancé jeudi leur campagne pour le référendum interdit du 1er octobre, défiant Madrid et le parquet général d'Espagne qui a menacé la veille les maires de Catalogne de poursuites s'ils y participaient.
Mercredi, les menaces du parquet vis-à-vis des maires --ils risquent notamment une arrestation-- ont encore échauffé les esprits dans cette région d'Espagne de 7,5 millions d'habitants, provoquant un tollé parmi les 700 édiles concernés.
Le président indépendantiste catalan Carles Puigdemont a dénoncé une "atrocité... peu digne d'une démocratie", et annoncé qu'il participerait samedi à une manifestation à Barcelone au côté des maires pour protester contre l'annonce.
Jeudi, il a participé à un meeting dans d'anciennes arènes à Tarragone, ville à une centaine de kilomètres au sud-ouest de Barcelone, à 20h00.
Non sans incertitudes : un juge administratif a déjà annulé à Madrid un autre acte de promotion du référendum, partant du principe qu'il est interdit.
La Catalogne divisée
Les Catalans sont profondément divisés, selon les sondages, même si plus de 70% d'entre eux sont favorables à un référendum légal.
Sur les dix villes catalanes les plus peuplées, six ont pour le moment refusé de s'impliquer directement dans l'organisation du scrutin - dont Barcelone qui compte 1,6 million d'habitants.
La Catalogne connaît depuis le début des années 2010 une montée de l'indépendantisme, liée notamment à l'annulation partielle du nouveau statut d'autonomie qui lui conférait des compétences élargies et la reconnaissait en tant que "Nation" dans l'Etat espagnol.
La tension s'est vivement accrue depuis que le parlement catalan a adopté le 6 septembre une loi organisant ce référendum, convoqué ensuite par le gouvernement de Carles Puigdemont.
La loi a été presque immédiatement suspendue par la Cour constitutionnelle, qui a prévenu ses organisateurs qu'ils risquaient des poursuites.
Le chef du gouvernement conservateur espagnol, Mariano Rajoy, bien décidé à empêcher la consultation, a de nouveau appelé les dirigeants catalans à se plier aux décisions de justice: "Si la loi n'est plus respectée, cela signifie que la volonté de la majorité des citoyens ne sert absolument à rien et que chacun peut faire ce qu'il juge opportun", a-t-il déploré.
'La Constitution prévaudra'
Le roi Felipe VI, chef de l'Etat censé incarner son unité, est sorti de sa réserve mercredi se disant sûr que "la Constitution prévaudra sur toute rupture du vivre-ensemble".
Ignorant Madrid, Carles Puigdemont a aussi lancé un nouveau défi à l'Etat en publiant sur Twitter deux nouvelles adresses web consacrées au référendum, alors que la garde civile venait d'annoncer la fermeture d'un précédent site.
Il a promis "que les gens pourront voter le 1er octobre, alors que le gouvernement de Mariano Rajoy répète à qui veut l'entendre "qu'il n'y aura pas de référendum".
Indifférents à la menace, 712 maires catalans sur 948 se sont engagés à céder des locaux pour le référendum.
Mercredi le parquet général a du coup ordonné aux procureurs de Catalogne de citer ces maires à comparaître, "en tant que mis en examen" soupçonnés de coopérer à "l'organisation du référendum illégal".
'Qu'ils nous arrêtent !'
Au cas où un maire ne répondrait pas, le parquet demande même d'"ordonner son arrestation" pour qu'il soit amené au parquet "dans les plus brefs délais".
"Quand plus de 700 maires sont poursuivis par la justice, ce ne sont pas les maires qui ont un problème, c'est la justice", a déclaré Miquel Buch, maire de Premià de Mar (28.000 habitants) et membre du PDeCAT (conservateur et indépendantiste)
"Qu'ils nous arrêtent ! Ils sont fous !", a réagi David Rovira, le maire de l'Espluga de Francoli (3.800 habitants), également du PDeCAT.
La CUP, petit parti d'extrême gauche séparatiste, a de son côté assuré que les maires issus de ses rangs ne comparaîtraient pas.
Lundi, des centaines de milliers de personnes avaient ainsi de nouveau défilé à Barcelone en faveur du référendum et du "oui" à l'indépendance.