L'ancien chef du gouvernement socialiste espagnol José Luis Rodríguez Zapatero s'est recueilli, samedi, à Montauban, sur la tombe du dernier président de la République espagnole, Manuel Azaña, mort en 1940 en exil en France après la victoire de Franco.
Cette visite était la première d'un ancien chef de gouvernement espagnol sur la tombe du dernier président de la Seconde République (de 1936 à 1939, à l'époque de la guerre civile). Il y a 15 ans, Jorge Semprun (1923-2011) s'y était rendu en tant que ministre espagnol de la Culture du gouvernement socialiste de Felipe Gonzalez.
M. Zapatero a rendu un "hommage" appuyé à M. Azaña, en évoquant "une dette" envers lui. "C'était avant tout un grand intellectuel et une personne très profonde dans la réflexion sur les valeurs démocratiques", a-t-il dit, au cimetière urbain de Montauban, à 50 km au nord de Toulouse.
Dans une boîte à lettres en souvenir de l'ancien chef d'Etat espagnol, à l'entrée du cimetière, M. Zapatero a tenu à déposer le préambule de la loi sur la "mémoire historique" adoptée fin 2007 par le parlement espagnol afin de rendre "hommage à toutes les personnes ayant perdu leur vie, leur famille, leur patrie" pendant la guerre civile (1936-39) et la dictature de Francisco Franco (1939-75).
"Alors que je venais ici, j'ai ressenti une certaine tranquillité pour avoir fait cette loi", a dit M. Zapatero, lui-même petit-fils d'un combattant républicain
fusillé. "C'était une loi de grands principes mais aussi de décisions concrètes: plus de 300.000 personnes ont acquis la nationalité espagnole parce qu'elles étaient enfants ou petits-enfants d'exilés (...) et beaucoup d'Espagnols ont pu savoir (...) où étaient (enterrés, ndlr) leurs ancêtres et proches".
"Il y a encore du travail et il faut souhaiter que toutes les administrations appliquent cette loi de reconnaissance des droits de ceux qui ont souffert durant
la guerre civile et la dictature", a-t-il dit.
Quelque 150 personnes assistaient à cet hommage. Parmi eux, on comptait de nombreux descendants de républicains espagnols.
Après la victoire du Frente popular aux élections de février 1936, M. Azaña avait été élu président de la République en mai. En février 1939, il avait démissionné puis s'était exilé en France, après la victoire des nationalistes de Franco aidés par l'Allemagne nazie.
Il était mort, le 3 novembre 1940 à Montauban où "il avait finalement atterri, malade, et dans l'affolement, après avoir erré sur les routes
de France, en fonction de l'avancée des troupes allemandes".
Jean-Pierre Amalric, président de l'association "Présence de Manuel Azaña" à Montauban. "L'ambassade du Mexique l'avait pris en charge en l'installant dans un hôtel où il était décédé de mort naturelle, alors qu'un commando franquiste avait voulu l'enlever, l'emmener en Espagne et l'exécuter", a ajouté M. Amalric, ancien enseignant d'histoire à l'Université de Toulouse.
A Montauban, M. Zapatero a par ailleurs évoqué "l'Europe de la paix, de l'unité, de la concorde" d'aujourd'hui. Et, dix jours après les attentats qui ont fait 17 morts à Paris, il a souhaité que l'accent soit mis encore davantage sur la construction d'"une Europe pour tous", "dans le dialogue".