Samedi 1er novembre : premier jour de la trève hivernale

Un soulagement pour des milliers de familles en difficulté, la trêve des expulsions a débuté vendredi soir.

Société
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Elles vivent dans la crainte de voir arriver l'huissier et les policiers et de se retrouver à la rue: des milliers de familles menacées d'expulsion pour impayés
vont bénéficier d'un répit à partir de vendredi soir, avec le début de la trêve hivernale.

Cette trêve, obtenue par l'Abbé Pierre après l'hiver 54, démarre chaque année le 1er novembre mais débute véritablement la veille au soir, les expulsions étant interdites entre 21H00 et 6H00. Elle interdit jusqu'au 31 mars toute expulsion de locataires, même si le propriétaire a entamé une procédure judiciaire.

"Jusqu'à vendredi soir, la situation reste tendue pour beaucoup de foyers", souligne Benoit Filippi, du Réseau Stop aux expulsions (Resel), car "les expulsions s'accentuent juste avant la trêve".

"Forcément, souligne Jean Perrin, président de l'Union nationale des propriétaires immobiliers, puisque la trêve réduit la période d'intervention. Il plaide pour
sa suppression, qui permettrait d'étaler sur l'année les expulsions, qui selon lui "ne sont pas plus nombreuses"
. Par contre, "il y a beaucoup de retard de paiement. Au lieu de payer le 5 du mois, le locataire paye le 25".

La Fondation Abbé Pierre note elle "une aggravation de la situation". De plus en plus de femmes seules avec enfants, de personnes au chômage ou en fin de droit appellent sa plateforme téléphonique "Allo prévention expulsion".

Ce sont des gens "qui ne se chauffent plus ou a minima", qui vivent "une vie de restriction" pour tenter de rester dans leur logement, mais qui "finissent par
basculer"
, explique Patrick Doutreligne, délégué général de la Fondation.

La trêve constitue "un répit" pour eux, dit-il. "La crise entraîne une augmentation des impayés, qui entraîne une augmentation des assignations en justice, qui entraîne une augmentation des jugements, et donc une augmentation des expulsions".

En 2013, près de 162.000 assignations en justice ont eu lieu, et près de 123.000 familles ont fait l'objet d'une décision d'expulsion pour dette locative.
Toutes ces décisions n'aboutissent pas à une expulsion par la force publique.
En 2012 (derniers chiffres connus), les interventions manu militari s'établissaient autour de 11.000. Car au fil de la procédure, beaucoup de ménages partent d'eux-mêmes, souvent en catimini par honte, parfois aussi par la violence de certains propriétaires.

"Il y a une pression permanente sur les locataires. C'est une vrai tension psychologique", insiste Benoit Filippi.

A la Rochelle, un locataire de 64 ans s'est suicidé le jour prévu de son expulsion. A la Seyne-sur-mer, une mère de deux enfants a tenté de se jeter de son balcon à l'arrivée de l'huissier, souligne l'association Droit au Logement.

"Pire, ceux qui devaient être protégés ne le sont plus", ajoute M. Filippi. "Alors que les bénéficiaires du droit au logement opposable (dalo) sont supposés ne pas être expulsés tant que l'Etat ne leur a pas proposé de relogement, de plus en plus de cas d'expulsions ont été dénoncés".

Pour Patrick Doutreligne, "la prévention des expulsions a été abandonnée". Et "le drame c'est qu'il n'y a pas de solution de relogement", face à un manque de logements sociaux et un dispositif d'hébergement saturé qui laisse déjà de plus en plus de SDF dehors.

Le reportage de Aude Blacher et Jean Laurent Serra sur la situation d'une famille à Paris

 

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