Mercredi 11 mars, Jean-Paul Huchon poste sur son blog une lettre aux abstentionnistes. Il y explique les raisons du désaveu entre citoyens et responsables politiques et fait le mea culpa de sa génération.
Jean-Paul Huchon s'adresse sur son blog aux abstentionnistes.
A dix jours du scrutin, cela peut apparaître comme une ultime tentative pour sauver le camp socialiste d'une débâcle annoncée lors des départementales. Les abstentionnistes, selon les études d'opinion, se situant majoritairement à gauche.
"Lettre ouverte à ceux qui n’y croient plus" est le titre que le président du conseil régional d'Ile-de-France, candidat à sa succession, à choisi.
Néanmoins au-delà de la manoeuvre politique, Jean-Paul Huchon dit, nous semble-t-il, des choses assez justes sur le fossé entre citoyens et politiques
"Commençons par reconnaître que si nous en sommes là aujourd’hui, c’est parce que des erreurs ont été commises et que nous avons tous laissé s’installer une incompréhension mutuelle. Commençons par reconnaître une responsabilité. Ma génération en a et je n’ai pas peur de le dire : j’ai acquis suffisamment d’expérience et de recul pour être capable de l’assumer", écrit-il tout d'abord en forme de mea culpa.
Il explique ensuite la nature de ces erreurs, mettant l'accent sur le côté trop techno des politiques, ce qui venant d'un rocardien est une forme d'auto-critique limite stalinienne. (on s'amuse avec les références car elles ont une portée limitée aujourd'hui).
"Tout ce que nous avons accompli en étant au pouvoir, nous l’avons fait, sincèrement, honnêtement, en pensant à l’intérêt général. Mais à force d’exercer le pouvoir, nous l’avons gardé entièrement. A force de l’exercer, nous avons fini par confondre ce que vous viviez au quotidien et ce que nous en disaient les experts. Leurs mots, mêmes, sont devenus les nôtres. C’était à nos yeux un gage de compétence. Un gage de sérieux. Ce n’est pas une faute, mais c’est devenu un décalage, un gage de distance entre vous et nous", poursuit Jean-Paul Huchon, dans le passage sans doute le plus sincère de son texte.
Il s'adresse ensuite aux électeurs potentiels de Marine Le Pen, dont il rappelle qu'il en a été l'adversaire quand elle a dirigé le groupe FN au conseil régional d'Ile-de-France de 2004 à 2010.
"Vous avez été déçus. Vous avez parfois, par la suite, été en colère. Certains d’entre vous sont même sans doute aujourd’hui désespérés. Il nous est arrivé de refuser de croire en votre déception. Il nous est parfois même arrivé de penser que votre désespoir n’était pas légitime. Et c’est là, sans aucun doute, la plus grossière des erreurs : les émotions ne se discutent pas. Elles sont légitimes parce qu’elles sont là. Ce qui se discute, ce sont les causes qu’on leur attribue, les conséquences qu’on leur prête, les réponses qu’on leur apporte, les responsabilités que l’on est en droit d’imputer. Mais pas les émotions", argumente Jean-Paul Huchon acceptant l'idée que la politique est autant affaire de sentiment que de raison.
La suite de l'article tente de trouver des solutions de façon peut-être plus conventionnelle. "Ce qu’on fait, c’est qu’on retrouve le respect réciproque. On redescend dans l’arène. On vient se parler. On décide ensemble et on agit. On fait confiance. Car nous avons, les uns et les autres, autre chose à dire et à montrer. Rien n’est irrémédiable, à condition qu’on laisse un espace au dialogue et qu’on travaille tous les jours, en respectant sa parole, à améliorer le quotidien de chacun, sans faire de compromis sur l’essentiel – la République, le vivre-ensemble", avance Jean-Paul Huchon qui se lance sur le tard dans la démocratie participative.
Ses adversaires de gauche comme de droite diront sans doute qu'il est un peu tard pour s'y mettre et lui demanderont pourquoi il ne l'a pas fait avant.
Il pourra toujours répondre par un titre du dernier album de Neil Young : "I am glad, I found you".
PS: il n'y a pas de raison que je ne participe pas au petit jeu des citations de Neil Young.