Dans un courrier, Laurent Nunez, préfet de police de Paris, répond aux protestations de ses effectifs. Il les appelle à continuer leurs missions du quotidien. Malgré cela, la colère policière, partie de Marseille, gagne rapidement les commissariats d'Île-de-France.
"J'appelle chacune et chacun d'entre vous à mesurer le tort qu'il ferait s'il s'aventurait à délaisser le service des autres, fondement du respect et de l'admiration que l'immense majorité de nos concitoyens vous porte". Ces mots, ce sont ceux que Laurent Nunez, préfet de police de Paris, a adressés à ses agents dans une lettre consultée par l'AFP ce mercredi.
"Vous savez que je répondrai toujours présent pour votre défense. Je considère ce rôle comme une obligation, comme un honneur même, à la hauteur de l'exigence de votre mission. Cela implique évidemment des attentes de ma part", a-t-il poursuivi.
Cette lettre fait suite au mouvement de protestation qui gagne actuellement les effectifs de police, depuis le placement en détention provisoire d'un policier marseillais, accusé de violences sur un jeune homme. Des faits qui seraient survenus dans la nuit du 1er au 2 juillet dans la cité phocéenne, alors que les émeutes embrasaient le pays suite à la mort de Nahel à Nanterre.
Les commissariats franciliens concernés
Depuis la mise en détention provisoire de ce policier, des fonctionnaires de police ont décidé de se mettre en arrêt maladie, ou d'appliquer le code 562, qui consiste à faire acte de présence, et à assurer un service minimum.
Cette dernière solution est celle plutôt choisie par les policiers franciliens, selon Bruno Angelo, secrétaire national Unité SGP Police Île-de-France : "L'appel de notre organisation à lever le pied et à se mettre en position d'attente a été largement suivi. Il y a également quelques fonctionnaires en arrêt maladie, mais à moindre échelle. Il nous paraît plus judicieux d'être présent dans les commissariats et de montrer notre mécontentement. En tant que policier républicain, cela nous permet aussi d'intervenir sur des missions d'urgence", explique-t-il.
Pour Bruno Angelo, difficile de dire combien de policiers ont décidé d'appliquer ce code 562. Mais une chose est sûre, tous les territoires sont concernés. "Sur les 33 000 fonctionnaires de police d'Île-de-France, tous les départements ont suivi de manière homogène la revendication", précise-t-il.
En effet, la contestation gagne progressivement l'Île-de-France, à l'image des villes des Lilas, de Pantin, de Noisy-le-Grand ou encore de Villepinte (Seine-Saint-Denis). Pour Bruno Angelo, cela s'explique par le sentiment de "ras-le-bol".
"Depuis les attentats, on ne cesse d'être appelé, sollicité. Rapidement, nous sommes passés du statut de héros à celui de responsable. Nous avons eu les gilets jaunes, le Covid-19, la réforme des retraites et dernièrement les émeutes. Ce sont ces tensions qui petit à petit font déborder le vase", raconte-t-il. "On estime que la justice est beaucoup plus bienveillante avec les malfrats qu'avec les fonctionnaires de police".
La création d'un "statut policier"
Les syndicats, comme Unité SGP Police ont plusieurs revendications. Ils demandent notamment l'anonymisation totale dès le début de carrière du policier, le recours à des magistrats spécialisés en usage des armes par les FDO, ainsi qu'un statut spécifique du policier mis en examen dans le cadre de sa mission.
"Quand on intervient en mission et qu'on doit faire usage de notre arme, on le fait en tant que policier. On voudrait que ce statut de policier soit pris en compte pendant ces interventions de police, car il faut bien comprendre qu'un policier doit souvent agir avec rapidité pour prendre une décision et stopper un crime", argue Bruno Angelo. "Si les fonctionnaires de police sont amenés à faire des erreurs, seule une enquête judiciaire doit pouvoir le dire."
Un avis partagé par le directeur général de la police nationale Frédéric Veaux qui a dit souhaiter la libération du policier, indiquant qu'"avant un éventuel procès, un policier n'a pas sa place en prison, même s'il a pu commettre des fautes ou des erreurs graves dans le cadre de son travail".
Des propos qui ont provoqué une vague d'indignation chez les magistrats et dans la classe politique. Mais que Laurent Nuñez a affirmé partager. "Il faut voir l'interview de Frédéric Veaux comme étant un soutien apporté à l'institution policière et j'apporte également moi-même mon soutien à l'ensemble des effectifs de la police nationale et singulièrement sur ma zone de compétence", a souligné ce mercredi le préfet de police de Paris sur Radio Classique. Dans son courrier adressé à ses troupes, il rappelle que "non la police n'est pas au-dessus des lois", ajoutant que "quand il y a des comportements individuels déviants ils sont sanctionnés".