Entre 13 et 15 millions de touristes, 15.000 athlètes et 40.000 représentants des médias sont attendus pour les Jeux olympiques (26 juillet-11 août) et paralympiques (28 août-8 septembre). Pour l'hôpital public déjà fragilisé, l'été représente un défi organisationnel. Les soignants s'inquiètent
À quelques mois de l'échéance olympique, Nicolas Revel, directeur général de l’AP-HP se veut extrêmement rassurant. Les hôpitaux de Paris de l'AP-HP "seront prêts" pour les Jeux olympiques cet été à Paris, avec "davantage d'ouverture de lits" dans certains services qui seront particulièrement "sollicités", a affirmé le directeur général de l'AP-HP sur franceinfo.
Samu, urgences, chirurgies, soins intensifs sont les services ont été identifiés comme "incontestablement sollicités", "on prévoit d'ouvrir davantage de lits", pour ces services, a-t-il ajouté. En revanche, les maternités, les services de cancérologie ou de gériatrie, n'auront "pas de raison d'avoir une pression particulière", estime-t-il.
"150 passages quotidiens aux urgences en plus d'une activité normale"
"Plus de 13 millions de personnes sont attendues en France pour assister aux épreuves mais les supporters devraient pour beaucoup "remplacer" les touristes habituels et les Franciliens qui préféreront éviter la cohue", précise Frédéric Adnet, chef de service au Samu de Paris.
Les 150.000 personnes supplémentaires par jour par rapport à un été normal pourraient se traduire par "150 passages aux urgences" quotidiens de plus, analyse-t-il. En l’Île-de-France, "il est prévu 150 urgences en plus par jour par rapport une période estivale habituelle et une activité hospitalière qu’on en a estimé à plus 5 %", décrit-il.
"Globalement, l’impact sur les structures sanitaires, en dehors d’un évènement exceptionnel, va être très modeste, ce sont les Anglais qui nous l'ont montré lors des Jeux olympiques de Londres, en 2012", explique le médecin.
Des soignants inquiets
Un optimisme qui n'est pas partagé par un collectif d'urgentistes. "Les services d’urgence de l’APHP sont déjà sur le fil du rasoir. La période estivale est chaque année plus difficile à passer à l’hôpital. Dans ce contexte, les JO se rajoutent à une problématique", dénonce le collectif rassemblé ce mardi dans l'enceinte de l'hôpital Bichat à Paris.
À 100 jours des Jeux olympiques, avec l’afflux de millions de touristes et une nouvelle période estivale, le collectif des Urgences de l’USAP, Union syndicale CGT de l’AP-HP, s'inquiète du manque d'anticipation des services d’urgences des établissements de l’AP-HP. Il réclame des "dizaines de milliers d’embauches nécessaires au bon fonctionnement des services et pour les JO, un dispositif spécifique de recrutement et de remplacement estival", indique le collectif qui dénonce une casse du secteur public.
Une prime pour tous
Le collectif demande aussi une égalité de traitement face aux efforts demandés sous la forme d'une prime pour tous de 2000 euros "pour assurer la continuité du service public dans des conditions difficiles" et la création de 10 000 emplois "pour faire valoir les droits au repos et congés et améliorer les conditions de travail dans tous les secteurs de l’hôpital", expose Christophe Prudhomme, médecin urgentiste à l’hôpital Avicenne de Bobigny et porte-parole de l’association des médecins urgentistes de France.
En octobre 2023, L'AP-HP (Assistance publique - Hôpitaux de Paris) avait annoncé, qu'elle allait octroyer des primes par semaine travaillée aux soignants qui renonceraient à leurs vacances : de 2 500 euros brut pour les médecins, 1 200 euros brut pour les fonctionnaires hospitaliers de catégorie A (infirmiers notamment), 1 000 euros brut pour les catégories B, et 800 euros brut pour les catégories C.
Ces primes concerneront les soignants d'une soixantaine de services (sur 800 environ au total) qui auront des besoins d'effectifs supérieurs à la normale estivale du fait des JO.
Pour Christian Prudhomme cette prime est un leurre. "Les conditions pour la toucher font que très peu de gens pourront en profiter", souligne-t-il. "Le plan prévu pendant les JO consiste à augmenter le nombre de lits qui vont rester ouverts cet été et de demander aux gens de décaler leurs congés". Mais pour le médecin urgentiste cette organisation est contre-productive. "Lors de la tenue des JO, c’est l’ensemble du personnel de l’Assistance Publique qui est impacté et si l'on doit faire des efforts, il est logique que l’ensemble du personnel puisse toucher cette prime pas simplement ceux qui seront dans les services dans lesquelles un nombre de lits supplémentaires sera ouvert".
Les JO ne sont que "la goutte d'eau qui fait déborder le vase, déjà extrêmement plein"
Joran Jamelot, du syndicat CGT
"La situation des hôpitaux est chaque été plus catastrophique" en raison des pénuries de personnel, avait estimé mi-mars Joran Jamelot (CGT), et les JO ne sont que "la goutte d'eau qui fait déborder le vase, déjà extrêmement plein".
Une déclaration confirmée par une enquête de septembre 2023 de Samu-Urgences de France qui pointait les fermetures de plus en plus fréquentes de services d’urgences la nuit ou le week-end.
Le ministre de la Santé, Frédéric Valletoux, répondra en exclusivité aux questions de Marlène Blin dans notre JT ce mercredi 24 avril sur France 3 Paris Île-de-France.