La Maison des F&es du 18e arrondissement de Paris a découvert que l'hôtel où elle hébergeait 86 femmes n'était pas aux normes. Les résidentes doivent quitter les lieux d'ici le 31 mars. Elles regrettent le peu de temps pour retrouver un logement.
Les normes ne touchent pas que les agriculteurs. Lors d'une commission de sécurité, l'association Basiliade, qui gère la Maison des F&es à Paris (pour femmes et enfants, à prononcer "fées"), a découvert avec surprise qu'elle hébergeait trop de familles.
"On s'est rendu compte en 2023 que l'hôtel ne pouvait contenir que 64 places. Mais depuis le début, on logeait 86 personnes, en accord avec l'État. Quand on a appris la nouvelle, on a travaillé avec les dispositifs de sécurité pour essayer de trouver une solution. On était prêt à construire un escalier, à mettre un ascenseur. Mais en fait le problème, c'est l'évacuation de l'hôtel en cas d'incendie, il y a qu'une porte de sortie vers l'extérieur", explique Didier Arthaud, président des Maisons des Fées et fondateur de l'association Basiliade.
L'histoire était pourtant belle. Juste après le confinement, des propriétaires de l'hôtel Rooms and Dreams de la rue Doudeauville (18e) ont leurs comptes dans le rouge. "Le propriétaire de l'hôtel avait tout refait pour le passer en 3 étoiles à partir de la fin 2019. Mais avec le confinement, il n'a jamais ouvert", raconte Didier Arthaud.
Le propriétaire accepte alors l'offre qui lui est faite : "Je doutais de l’installation d’occupants sociaux. Je redoutais les dégradations sur nos efforts d’investissements. J’étais proche d’un membre de l’association Basiliade, qui s’occupe de mamans célibataires enceintes ou avec des nouveau-nés. Il y avait une confiance”, détaille Mohand Idoughi, gérant de l'hôtel et interrogé à l'époque par le site lhotellerie-restauration.fr (contacté, il n'a pas donné suite à nos sollicitations.)
"C'est de l'hébergement d'urgence"
Du côté des femmes concernées, l'incompréhension fait place à la colère. "Cela fait presque 4 ans qu'on est là, avec mon fils", regrette une habitante de l'hôtel de la rue Doudeauville. "Ce n'est pas que ça nous embête de partir, mais ça a été brusque. On aimerait partir dans de bonnes conditions. On ne peut pas se lever du jour au lendemain et nous dire de partir dans 3 mois alors que l'on était parti pour 15 ans de bail", poursuit-elle.
Une autre habitante, très remontée, ne comprend pas non plus pourquoi elle doit déménager : "Ça fait un an et demi que je suis à l'hôtel. Ils veulent m'envoyer dans un hôtel avec une chambre de 9 m² avec mes enfants à Champigny-sur-Marne. Je travaille dans le 18e, ma première fille est à Max Dormoy (dans le même arrondissement, ndlr). Ma deuxième fille est à la crèche dans le 18e. Pourquoi enlever les gens et les jeter dans un autre hôtel ?"
"C'est de l'hébergement d'urgence. Malheureusement, on ne peut pas garantir un hébergement pérenne", rétorque le président des Maisons des Fées, dont l'objet est de permettre d'assurer un accompagnement à ces femmes dans le but qu'elles trouvent leur propre logement.
Deux nouvelles Maisons des F&es à Paris
Après l'annonce de cette commission sécurité, l'hôtelier a accepté de donner un délai supplémentaire à l'association pour tenter de trouver des solutions de relogement. Mais la tâche est ardue.
Deux nouvelles Maisons des F&es ont été créées et peuvent désormais accueillir des femmes et leurs enfants : une dans le 10e, l'autre dans le 19e. Mais elles sont, elles aussi, provisoires (les bâtiments appartenant à des promoteurs). Sur les 9 appartements dans celle située quai de Valmy (10e), 6 vont être occupées par des familles qui étaient dans la Maison des F&es de la rue Doudeauville.
"Nos Maisons des F&es sont des Centres d'hébergement d'urgence (CHU), c'est le SIAO (Service Intégré de l'Accueil et de l'Orientation) géré par le Samu social, qui décide qui peut y être accueilli. Quand il y a une place qui se libère dans une chambre ou un appartement, on a 48h pour prévenir le SIAO qui nous envoie une nouvelle famille, mais on n'a pas le choix des familles que l'on accueille", déclare Didier Arthaud.
Selon lui, les femmes accueillies dans ces centres restent, en moyenne, de 6 mois à 3 ans. Ce sont souvent des femmes en situation irrégulière. "Elles ont souvent vécu des parcours migratoires avec des psychotraumatismes. Nous sommes très sensibles à la question des enfants qu'il faut vite scolariser", relate le président de l'association Basiliade.
Mais au fil du temps, les bénéficiaires créent de solides liens dans leur quartier. "Il y a un travail de prise de conscience sur la difficulté de logement à Paris pour que ces familles acceptent la réalité", souligne Didier Arthaud.
Depuis la création des Maisons des F&es, environ 500 familles ont été hébergées, dont une centaine a ensuite trouvé un logement pérenne.