En 2015, après les attentats de Paris, la devise de Paris était brandie comme un étendard face au terrorisme. Mais d'où vient-elle ?
Fluctuat nec mergitur. Littéralement : "Il est battu par les flots, mais ne sombre pas". Vous avez peut-être déjà entendu ou aperçu cette locution latine inscrite à plusieurs endroits dans Paris, surtout Place de la République ou Quai de Valmy au lendemain des attentats de 2015. Cette phrase était alors devenue un slogan de résistance face au terrorisme.
Il s’agit de la devise officielle de la capitale depuis un arrêté du 24 novembre 1853 pris par le baron Georges Eugène Haussmann, alors préfet de la Seine, sous le Second Empire. Avant cette date, cette phrase n’était qu’une des devises – parmi d’autres – de la capitale. La locution latine figurait par ailleurs (déjà) sur plusieurs jetons durant l’époque moderne, notamment le XVIe siècle.
À travers l’utilisation de cette devise, le baron Haussmann voulait rappeler le risque d'inondation auquel la capitale a régulièrement été confrontée durant son histoire. En effet, si Paris et la Seine ont été souvent submergées par les flots, la capitale n'a jamais coulé. "Cet éminent administrateur a pensé sans doute qu’une telle devise rappelle admirablement les dangers que Paris a courus, les terribles révolutions qui l’ont agitées, les crises de toute nature qu’elle a subies, en même temps qu’elle exprime mieux que toute autre l’idée de vitalité, de force, de perpétuité qui caractérise la longue et glorieuse existence de cette ville", peut-on lire dans l'ouvrage de l’héraldiste (spécialiste du blason) Henri Tausin : "Les devises des villes de France : leur origine, leur historique, avec les descriptions des armoiries et quelques reproductions".
Nautes de Lutèce
Mais quel est le rapport entre cette devise et la ville de Paris ? La réponse se trouve sur le blason de la capitale, ci-dessous.
Le "il" de la devise renvoie au fluctuat latin, lui-même faisant référence au bateau à voile flottant au centre du blason. Ce vaisseau représente la puissante corporation des Nautes de Lutèce, une confrérie de marins marchands qui ont géré les affaires le long de la Seine et ont développé les échanges entre la cité et le reste du monde pendant des siècles. Ce sont par ailleurs eux qui sont à l’origine de la municipalité parisienne, dirigée par le "prévôt des marchands" jusqu’à la Révolution française, en 1789. En guise de comparaison, ce "prévôt" est l'ancêtre du maire de Paris – dont le premier titulaire fut le scientifique Jean Sylvain Bailly le 15 juillet 1789.
Selon le site de la mairie de Paris, le bateau figurait déjà sur le sceau de la corporation au début du XIIIe siècle, mais sans la devise ni les autres symboles qui l'accompagnent aujourd'hui. "Semblable au vaisseau qui, battu par la tempête, se relève plus fier sur le flot qu'il a vaincu et met à profit la fureur même des vents pour arriver plus vite au port, but de son long et périlleux voyage, l'antique et noble cité n'a pas seulement surnagé au-dessus des abîmes ; elle y a puisé, avec une force nouvelle, la conviction que, si de nouvelles épreuves lui sont réservées, elle en sortira toujours victorieuse", précise Henri Tausin dans son ouvrage.