Le casse-tête des parents dont les enfants ne retournent pas à l'école

Comment reprendre le travail avec des écoles fermées ou n’accueillant que très partiellement les élèves ? Un dilemme auquel beaucoup de parents dans l'impossibilité de télétravailler sont confrontés. Témoignages.
 

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Après deux mois à la maison avec son fils de 4 ans, Bruno Cailler comptait reprendre le travail cette semaine. Il avait d’ailleurs averti sa direction. Mais vendredi, il a reçu une lettre de l’école qui a définitivement douché ses espoirs. "Ils ont pris la décision de sacrifier les enfants de petite et de moyenne section pour favoriser les grandes sections. Mon fils ne reprendra pas avant septembre", raconte ce directeur technique dépité. Pourtant, dans un courrier adressé à sa mairie de Chaville dans les Hauts-de-Seine, Bruno Cailler avait indiqué qu’il ne pouvait pas exercer son travail à distance. Tout comme sa femme intermittente. Mais rien n’y a fait. "Je ne suis pas considéré comme prioritaire car je ne fais pas un métier qui peut sauver des vies. Je n’ai pas de famille à proximité, je ne sais pas comment on va faire…"

Même déception pour Charlotte Gabin dans le XIe arrondissement de Paris. La fleuriste espérait que ses deux enfants puissent repartir à l’école pour reprendre les rênes de sa boutique, fermée depuis le 14 mars. "Nous avons eu une réponse positive pour la petite dont la rentrée a été décalée. Mais pour la grande en CM1, on n'a toujours pas de date." Le travail dans les prochaines semaines ? "Ça sera au ralenti... et avec l'aînée. On fera les leçons à la boutique mais il faudra qu’elle soit beaucoup plus autonome. Ce n’est vraiment pas l’idéal." 
 



La reprise pour tous : une illusion

Reprendre une activité au sein de son entreprise avec des enfants toujours à domicile : c’est le casse-tête auquel sont confrontés de nombreux parents. Certains pensaient voir le bout du tunnel à partir du 11 mai mais les perspectives de reprise se sont éloignées… Une frustration imputable au gouvernement selon Jean-André Lasserre, président de FCPE de Paris, une association de parents d’élèves. "Le ministre de l’Education, Jean-Michel Blanquer, n’a pas arrêté de créer l’illusion sur tout. De dire que les écoles rouvriraient, c’était faux, en tous cas juste pour un petit nombre. Ce sont des effets d’annonce. Car on le sait, l’école ne peut pas accueillir tout le monde vu le protocole sanitaire mis en place." 

Pour choisir entre les enfants que les parents souhaitent remettre à l’école, ceux dont les parents doivent reprendre une activité professionnelle et les autres enfants en situation de décrochage scolaire, les directeurs d'école ont dû procéder à des arbitrages. Quitte à en décevoir plus d'un. Résultat à Paris, seuls 20 000 élèves sur un total de 130 000 pourraient être accueillis dès jeudi. A Melun en Seine-et-Marne, ils ne sont que 280 sur 4 600 habituellement. A Limay et à Mantes-la-ville dans les Yvelines, toutes les écoles resteront fermées. Quant à Aubervilliers en Seine-Saint-Denis, ce sont trois groupes scolaires qui sont ouvert mais uniquement pour les enfants de soignants, de pompiers ou de policiers. "Aujourd’hui, les conditions d’hygiène et de sécurité ne sont pas réunies pour rouvrir toutes les écoles. Elles le seront, nous l’espérons, à la rentrée", indique la maire PCF Mériem Derkaoui. 
  

"Si c’est pas le covid qui m’emporte, ça sera le burn out !"

Difficile pour certains parents d’attendre jusque-là. D’autant que des centres de loisirs pourraient rester porte close cet été. Alors, depuis plusieurs jours, chacun tente de s’organiser en faisant appel à des gardes à domicile. Ou en jouant sur la solidarité. A l’école maternelle du 111 Parmentier dans le XIe, des parents envisagent d'accueillir à tour de rôle les enfants à domicile, par petit groupe. Une solution également envisagée par Georgia Bucur, mère d’un petit garçon de 3 ans, dans le XIXe  arrondissement. "Mardi prochain, je garde mon fils et un de ses copains pour que sa maman puisse donner tranquillement ses cours en visioconférence aux étudiants de l’école Polytechnique. Jeudi, pour soulager la charge mentale d’une autre maman, on se réunit pour faire à manger ensemble avec nos deux enfants. Et pour faire mon travail à moi, je travaille de 23h à 2h du matin, ou de 5h à 9h, avant que mon fils ne se réveille ainsi que le week-end quand mon conjoint est là, explique cette trentenaire qui cumule les jobs et a dû refuser plusieurs contrats dans l’audiovisuel depuis deux mois. C’est une organisation de dingue, intenable sur le long terme. Faut que la mairie et l’éducation embauchent des contractuels pour ouvrir les écoles. Ou alors, j’arrête d'essayer de travailler. Je peux pas tout faire. Si c’est pas le covid qui m’emporte, ça sera le burn out !"

Faute de date de reprise, certains songent aussi à envoyer leurs bambins chez les grand-parents. Une solution prise à contrecœur pour cette mère du Ve arrondissement. "Nous voulons protéger nos parents mais il faut que nous retournions travailler dans nos entreprises. Et si jamais les enfants reprennent, ça ne sera vraisemblablement pas à temps plein. Donc galère." 
 

Trouver des solutions avant septembre

Des difficultés pointées par la FCPE qui milite pour un "arrêt Covid". L’association demande une prise en charge financière, sans aucune perte de salaire, pour tous les parents qui souhaiteraient ou devraient s'occuper de leurs enfants jusqu'à ce que la situation sanitaire du pays permette un retour à l'école. "Il faut à la fois que les employeurs ne mettent pas la pression sur les salariés, explique Jean-André Lasserre, président de la FCPE de Paris. Et pour permettre aux parents de souffler, peut-être pourrait-on imaginer un accueil plus souple en mobilisant toutes les forces en présence : communauté enseignante, éducateurs, associations…"
Des solutions qui, pour le moment, ne sont pas mises en place mais auxquelles il faudra réfléchir si la situation ne s’améliore pas en septembre. Une rentrée scolaire qui pourrait ressembler peu ou prou à celle du 11 mai selon le ministre de l’Education.
 
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