Inceste : une réunion publique pour libérer la parole et changer la loi

La Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise) organise une deuxième réunion publique ce lundi soir pour recueillir la parole de victimes d'inceste. Le 17 février dernier, une première réunion avait fait salle comble.

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La Ciivise organise une deuxième réunion publique ce lundi soir à Paris. Objectif : recueillir la parole de victimes. Le 17 février dernier, plusieurs centaines de personnes avaient répondu à l'appel de cette commission indépendante. Retour sur cette première réunion.

Première réunion publique le 17 février

Salle comble ce mercredi 17 février au Palais de la femme à Paris. 200 personnes ont répondu à l’appel de la Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise) pour témoigner des souffrances endurées.

"Je me devais au moins une fois de parler devant vous, de sortir du huis clos familial, en mémoire de la petite fille que j'ai été." Sylvie, âgée de 62 ans, a été violée par son père à l'âge de huit ans. Silence, dépression, rejet de sa famille. "Je ne pensais pas qu'il était possible de souffrir autant sur cette Terre", poursuit-elle.

J'ai pris perpétuité

Victime de violences sexuelles

Arthur, a été abusé par son oncle à l'âge de 15 ans : "On m'a traité comme un sale objet, mais ça suffit maintenant !".

Ils sont venus nombreux. Certains pour écouter celles et ceux qui veulent sortir du silence qui entoure l'inceste. D'autres pour témoigner. Plus de 500 personnes avaient tenté de s'inscrire à cette 5e réunion publique -la première à Paris- organisée par la Ciivise limitée à 200 personnes par les organisateurs pour des raisons liées à la crise sanitaire. 

Après une présentation des travaux de la commission, qui a pour mission de récolter des témoignages et de préconiser des politiques de prévention, le micro est passé de main en main. Les personnes qui le souhaitaient se sont racontées dans une salle pleine et attentive.

Il y a une injonction à écouter et respecter cette parole.

Édouard Durand, co-président de la Ciivise

"Je suis juge des enfants depuis 17 ans avec une attention spécifique aux violences sexuelles faites aux enfants. Je ne peux pas dire que je découvre le nombre de ces violences mais cette vague était souterraine et aujourd’hui elle émerge. Et elle émerge avec une grande force et une grande intelligence. Je suis édifié et il faut bien comprendre que cette parole nous oblige", confie Édouard Durand, co-président de la commission.

Et de poursuivre : "il faut prendre conscience de l’ampleur du nombre de personnes qui ont répondu à l’appel à témoignages. Nous en sommes aujourd’hui à 10 000 et plusieurs centaines au cours des différentes réunions publiques organisées en France. Il faut prendre conscience de ce que cela veut dire : les victimes veulent que leur parole soit confiée à une instance publique et entendue par les instances publiques." 

Mieux protéger les enfants

La Ciivise est chargée d'élaborer d'ici 2023 des recommandations de politiques publiques pour protéger les enfants et rendra des "conclusions intermédiaires" dès cette année, fin mars ou début avril. Selon ses deux co-présidents, elle préconisera notamment de changer la loi pour faire en sorte qu'un parent condamné ou poursuivi pénalement pour agression ou viol incestueux se voit automatiquement privé de son autorité parentale. Elle travaille également sur des politiques de prévention.

Aujourd'hui, il faut que la société aille plus loin

Edouard Durand, co-président de la Ciivise

"La commission n’a pas pour vocation de se substituer à d’autres espaces de parole. Ce n’est ni un espace de soin, ni un temps thérapeutique de même que la commission n’est pas l’espace judiciaire ou du travail social (...) mais notre travail est de faire des préconisations pour faire évoluer la loi", assure le co-président. La Ciivise travaille ainsi sur 4 axes.

La justice doit se conformer davantage aux besoins fondamentaux des enfants.

Edouard Durant, co-président de la Ciivise

"Le premier axe de travail est le repérage des enfants victimes. Nous pouvons dire qu’il y a environ 160 000 enfants victimes chaque année. Ces enfants, nous devons aller les chercher pour les protéger. Le deuxième axe, c’est le traitement judiciaire des victimes de violences sexuelles. Nous avons obtenu une mission interministérielle entre la Justice, l'Intérieur et les Affaires sociales pour comprendre comment fonctionne la chaîne d’intervention des professionnels, du signalement aux traitements judiciaires", détaille le juge pour enfants.

La Ciivise travaille également sur les questions des réparations, du soin, qui "doit répondent aux besoins spécifiques d’une personne qui a été victime de violences sexuelles", et sur la prévention. "Les enfants doivent grandir en sécurité et les institutions doivent être vigilantes", assure le juge pour enfants.

Il faut bien comprendre que cette parole nous oblige.

Edouard Durand, co-président de la Ciivise

Hier soir, tout le monde n'a pas pu prendre la parole.

Plus d'infos sur le site de la Ciivise ou par téléphone (0805.802.804 ou 0800.100.811 pour l'outre-mer).

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