L'artiste connue pour ses tags au pochoirs est décédée des suites d'une maladie. Elle avait marqué les rues de Paris de ses dessins et de ses légendes parfois acerbes. Le monde de la culture lui rend hommage.
Des murs de Montmartre à ceux de la Buttes-aux-Cailles, Miss.Tic aura embelli pendant plus de 40 ans les rues de la capitale. Connue pour ses silhouettes de femmes réalisées au pochoir, la street-artiste de 66 ans est décédée des suites d’une maladie.
Le grand public retiendra sûrement la chevelure noire qu'elle a elle-même longtemps arborée de ses héroïnes graphées sur les murs de la Paris, qui ont ouvert la voie à de nombreux artistes.
Voir cette publication sur Instagram
« J'enfile l'art mur pour bombarder des mots cœurs »
Miss.Tic passe sa jeunesse en Île-de-France, entre le XVIIIème arrondissement de Paris et les cités d’Orly, à l’adolescence. Elle se forme aux arts appliqués et à la photogravure. Après un bref passage dans les milieux punk californien, au début des années 1980, l’artiste s’installe à Paris. Radhia Novat, de son vrai nom, a posé son premier pochoir en 1985 dans le XIVème arrondissement. Un portrait d’elle-même à côté duquel on peut lire : "J'enfile l'art mur pour bombarder des mots cœurs". Dans les quartiers de Ménilmontant, du Marais, de Montorgueil, Miss.Tic habille les murs de Paris de ces silhouettes si distinctives.
Myriade de réactions au décès de Misstic, qui le mérite. Elle n'a eu hélas aucune expo muséale de son vivant, aucune monographie, aucune acquisition par l'Etat, aucune décoration : elle les méritait. C'est le sort de l'art urbain, son plafond de verre. Il faut que cela change. pic.twitter.com/blN3qKJpzu
— Christian Guémy alias C215 (@christianguemy) May 23, 2022
" Je me suis dit d'abord : je vais écrire des poèmes. Puis : il faut des images, avec les poèmes. J'ai commencé par des autoportraits, puis j'ai continué vers les autres femmes", expliquait la plasticienne en 2011. Des dessins de femmes toujours avec parfois des légendes incisives.
"Ses pochoirs devenus iconiques, résolument féministes, continueront longtemps à poétiser nos rues", a réagi sur Twitter la nouvelle ministre de la Culture, Rima Abdul Malak, célébrant "une grande artiste".
Le tag : un art réprimé
Miss.Tic, dont le pseudonyme vient du personnage Miss Tick, la sorcière de la "Bande à Picsou", avait connu de longues années de querelles avec la justice. Ses tags et ses pochoirs étaient considérés comme une détérioration de biens. Son arrestation pour ce motif en 1997 lui vaut une amende. Après cet épisode, elle négocie les espaces urbains où elle souhaite travailler, refusant d'être prise pour une délinquante. Dans les XXème et le Vème arrondissement de Paris, la street-artiste se met d’accord avec les élus et les commerçants pour poursuivre son œuvre.
Son art, éphémère ou pérenne, attire les grandes marques dans les années 2000, notamment dans le milieu de la mode, où elle collabore avec Kenzo, pour un t-shirt en tirage limité, ou Louis Vuitton. Elle signe en 2007 l'affiche du film "La fille coupée en deux", de Claude Chabrol, participe à l'édition 2010 du Petit Larousse en illustrant des mots de la langue française et crée une collection de timbres avec la Poste à l'occasion de la journée des droits des femmes en 2011. Certaines de ses œuvres ont été acquises par le Victoria and Albert Museum, à Londres, et le Fonds d'art contemporain de la Ville de Paris.