Muséum Nationale d'Histoire Naturelle : "Notre travail au quotidien est menacé"

Des chercheurs ont lancé une pétition en ligne pour s'opposer au projet de déménagement d'une partie des collections du Muséum National d'Histoire Naturelle de Paris. Ce mercredi, celle-ci récolte déjà plus de 5 000 signatures.

Dire "non" au projet des dirigeants du musée. C'est l'objectif des signataires de la pétition "Sauvons les collections du Muséum National d'Histoire Naturelle". Sur le site Change.org, des enseignants-chercheurs ont lancé un appel aux internautes pour s'opposer au déplacement hors de Paris d'une partie des collections. "Nous souhaitons l'abandon de ce projet qui menace les missions de recherche du muséum et donc ses objectifs scientifiques", explique Nicolas Puillandre, spécialiste des mollusques au sein du musée à l'origine de la pétition. Ce mercredi, la pétition en ligne compte plus de 5 000 signataires.

Les signataires reconnaissent qu'il y a urgence à "trouver plus d’espace, à rénover les locaux et améliorer les conditions de travail, très loin des standards d’hygiène et de sécurité."

Néanmoins, ils s'opposent à la solution proposée par la direction : déplacer une partie des collections "à Dijon pendant 10 ans" selon le texte de la pétition. " La bonne tenue de notre travail au quotidien est menacée dans une période critique pour la communauté scientifique. Nous sommes la première génération de chercheurs qui connaîtra l'extinction d'un quart des espèces vivantes sur Terre", précise Nicolas Puillandre.

Les syndicats des personnels du musée dénoncent eux une décision prise de manière unilatérale. "Nous n'avons été consultés ni pour donner notre avis sur le déménagement ni sur le volet financier du projet", dénonce Julie Castiglione, co-secrétaire générale du syndicat Sud-éducation du Muséum et membre du conseil d'administration.

Déplacement de collections et de fonds documentaires 

Ce déménagement qui devrait durer entre dix et quinze ans selon le musée concerne des collections conservées dans l'alcool mais aussi des collections sèches et des fonds documentaires. Il s'agit de collections zoologiques et géologiques. "Cela concerne entre autres une partie des vertébrés et invertébrés marins", explique Gildas Illien directeur général délégué aux collections du Muséum. Ce déplacement inquiète les chercheurs qui craignent de ne plus avoir accès aux collections tous les jours. "Cela va être mission impossible pour nous, aller à 2h30 de route pour comparer les collections, ce sera très compliqué ", estime Nicolas Puillandre.

Le scientifique craint également que ce déplacement mette à mal les projets des chercheurs du musée dans les prochaines années. "Il est difficile de demander des financements pour un projet à long terme si l'on sait que l'accès à certaines collections sera limité. De son côté, Gildas Illien,  estime que "cela demandera une nouvelle organisation mais nous mettrons en œuvre ce qu'il faut pour que les chercheurs pussent continuer à travailler."

"Manque de place" 

Pour justifier ce déplacement, le musée évoque un "manque de place" due à l'arrivée régulière de nouvelles pièces. "Il faut trouver des solutions pour éviter des situations qui favoriseraient le risque d'incendie comme celui subi par le Musée d'Histoire Naturelle de Rio en 2017", justifie Gildas Illien. En cause le dépassement du nombre de mètres cubes d'alcool autorisé par la préfecture de Paris dans un même lieu.. .

"On a dépassé le seuil qui est limité à 180 mètres cubes et cela peut être dangereux." Les chercheurs du Muséum proposent en alternative le déplacement des collections sur des sites appartenant au Musée en région parisienne. "Nous avons des sites de plusieurs hectares à Chèvreloup dans les Yvelines ou Brunoy dans l'Essonne qui seraient plus pratiques pour les chercheurs.", explique la co-secrétaire générale de Sud-Education dans le Muséum.

Les représentants syndicaux craignent que le déplacement hors de Paris  menace de nombreux emplois au sein du musée parisien. "Pour les chercheurs, il va falloir s'adapter et tout le monde ne pourra pas aller à Dijon", déplore Julie Castiglione. Les emplois menacés ne concernent pas seulement les personnes en charge des collections mais également les personnels administratifs du musée. Cela risque de mener à un appauvrissement du musée qui ne doit pas perdre sa vocation première qui est la recherche et l'enseignement", craint Julie Castiglione. Elle rappelle que dans cette double vocation "la conservation des collections est un des aspects les plus importants."  

Autre problème soulevé par les chercheurs, l'impossibilité pour eux de savoir précisément ce qui sera déplacé. " On n’a pas de listes précises de ce qui sera concerné par le déménagement. C'est un problème en termes d'inventaire car nous avons besoin de savoir ce sur quoi nous allons pouvoir travailler", indique Nicolas Puillandre.

Concernant la destination de Dijon comme point d'arrivée des collections déplacées, le directeur général délégué aux collections a informé France 3 Paris Île-de-France que la décision sur la destination n'était "pas encore arrêtée

Soutien de la communauté scientifique internationale 

Parmi les soutiens de la pétition, les personnels du musée bénéficient de l'appui de nombreux membres de la communauté scientifique internationale. "Nous avons reçu des signatures de 100 pays différents dont des scientifiques qui comprennent que ce déménagement nuirait à la réputation du Muséum." selon le spécialiste des mollusques. 

De nombreux messages de chercheurs internationaux adressés aux initiateurs de la pétition qu'a pu consulter France 3 Paris Île-de-France attestent de ce soutien transcontinental. Lors d'une réunion organisée ce mercredi entre les syndicats et les personnels du musée, une motion de censure a été votée à l'unanimité contre la délocalisation des collections et pour l'instauration d'un dialogue entre dirigeants et personnels.              

   

 

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