"Paris est le berceau du surréalisme" : le mouvement s’expose au Centre Pompidou pour son centenaire

Alors que l’établissement s’apprête à fermer ses portes à l’été 2025 pour des travaux de rénovation, l’exposition "Surréalisme" célèbre la richesse du mouvement né il y a 100 ans dans la capitale, au-delà de son image d’avant-garde des années 1920.

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"Chimère", "illusion", "irréalité", "folie", "mystique", "fantastique"... Quand on demande aux visiteurs ce qu’évoque pour eux le surréalisme, le mot "rêve" revient sans doute le plus souvent. L’exposition "Surréalisme", qui a ouvert ses portes le 4 septembre au Centre Pompidou, propose de plonger dans un labyrinthe de 500 peintures, dessins, photos, films et textes, "entre grandes icônes et découvertes pour le public", résume la commissaire Marie Sarré.

Dès la première salle, au centre du labyrinthe, on peut entendre la voix d’André Breton, auteur du Manifeste du surréalisme en 1924, reconstituée par "clonage vocal" à l’aide de l’intelligence artificielle à l’Institut de recherche et coordination acoustique/musique (Ircam). L’occasion d’expliquer l’origine de l’ouvrage, et du mouvement.

"Paris est le berceau du surréalisme, raconte Marie Sarré. Les jeunes gens qui font le mouvement, qui ont entre 25 et 28 ans en 1924, ne sont pas parisiens, mais le foyer intellectuel est dans la capitale. André Breton, Louis Aragon, Philippe Soupault, Paul Éluard… Ils ont fait l’expérience de la guerre, et en ressortent avec un vrai dégoût des valeurs du progrès, de la civilisation, de la machine, qui ont mené au désastre. Ils veulent se révolter contre ce rationalisme et ces idées modernes."

"Ils rejoignent dans un premier temps le groupe Dada, né en Suisse et en Allemagne, et qui arrive dès 1919 à Paris avec la figure de Tristan Tzara. Ils fondent une revue, 'Littérature,  une transition entre Dada et le surréalisme. Et en 1924, ils installent le 'Bureau central de recherches surréalistes', au 15 rue de Grenelle, avant la publication du manifeste", résume-t-elle.

Au-delà de la rue de Grenelle, de nombreux lieux de la capitale marquent l’histoire du surréalisme. "Dès 1919 à l'Hôtel des Grands Hommes, près du Panthéon, André Breton et Philippe Soupault rédigent les 'Champs magnétiques', en écriture automatique, c’est-à-dire en allant le plus vite possible sans faire appel à la raison. Il y a aussi la rue Blomet, avec l’atelier d’André Masson et Joan Miró. Et le plus important sans doute : le 42 rue Fontaine, l’atelier d’André Breton, où se rencontrent les surréalistes. À proximité, il y a le cabaret de l’Enfer, où les surréalistes ont l’habitude d’aller et dont la porte est reconstituée à l’entrée de l’exposition, en invitant les visiteurs à se perdre dans le labyrinthe. Il y a aussi tous les cafés dans lesquels se rencontrent les artistes, comme la Promenade de Vénus", liste la commissaire.

Le surréalisme, bien plus qu’une "avant-garde des années 1920", "masculine" et "parisienne"

Mais l’exposition est loin de se limiter aux origines du mouvement. "La dernière exposition sur le surréalisme au Centre Pompidou remonte à plus de 20 ans, retrace Marie Sarré. Le mouvement était alors vu comme une avant-garde des années 1920 et 1930, essentiellement masculine, européenne, voire parisienne. Beaucoup de recherches universitaires ont depuis relu le surréalisme comme un mouvement international, qui a fait une place décisive aux artistes femmes, comme Leonora Carrington, Ithell Colquhoun et Remedios Varo."

"Le mouvement naît à Paris, mais c’est très rapidement un mouvement international, bien avant la mondialisation, détaille-t-elle. Dès le début, quand il se développe dans la capitale, il s’enrichit sans cesse d’apports extérieurs. Les artistes sont pour la plupart étrangers : René Magritte, belge, Salvador Dalí, espagnol, ou encore Max Ernst, allemand… Puis il essaime sur tous les continents, en Chine, au Japon et au Maghreb dans les années 1930, au Mexique et en Amérique latine dans les années 1940. Le surréalisme n’est pas un dogme esthétique, mais une philosophie, donc tout le monde peut le rejoindre."

Comment d’ailleurs peut-on définir simplement ce qu’est le surréalisme ? "Lors d’une conférence en 1935, André Breton disait que c’est à la fois le désir de 'changer la vie' d’un point de vue poétique — une expression empruntée à Arthur Rimbaud ; et 'transformer le monde' d’un point de vue politique — une expression empruntée à Karl Marx. C’est être engagé, révolutionnaire, mais aussi réinjecter du merveilleux dans le réel et remettre en question le rationnel", répond la commissaire.

Marie Sarré souligne d’ailleurs que le surréalisme reste "un mouvement très actuel, pionnier dans les questions qu’il pose, avec l’urgence d’inventer un nouveau rapport au monde". "Ces artistes se sont rendu compte qu’il n’était plus possible d’avoir un rapport consumériste à la nature notamment, et ont développé une approche presque écologique", indique-t-elle.

À noter qu’au-delà du Centre Pompidou, une déambulation dans la capitale est proposée avec des événements prévus dans des dizaines de galeries et librairies du "Paris surréaliste". Alors que l’exposition se termine le 13 janvier prochain, l’établissement se prépare en tout cas à fermer ses portes dès l’été 2025, et jusqu’à début 2030, pour des travaux de rénovation.

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